Judith Margolin nous présente son dernier spectacle !

Publié le par Julian STOCKY

(c) Christine Coquilleau

 

Bonjour Judith,

 

Quelle joie de nous entretenir avec vous !

 

1/ Vous êtes sur scène chaque jeudi soir à 21h30 jusqu’à fin juillet à la Nouvelle Scène pour un spectacle original, « Mudith Monroevitz ». Comment le présenteriez-vous ?

 

C’est un seule-en-scène humoristique : l’histoire d’une fille qui se prend pour la réincarnation ashkénaze de Marilyn Monroe. On va passer la nuit avec elle et son « date » du jour, qui s’appelle Marcus. Le spectacle commence au moment du premier baiser qu’elle échange avec Marcus au restaurant à 22h07 très précisément. Et il se termine à 01h26. Au cours de cette nuit très mouvementée, Mudith va découvrir qui elle est vraiment.

 

Sans tout dévoiler, quels thèmes sont abordés pendant cette heure dix de spectacle ?

 

Qu’est-ce qu’être une femme de la trentaine, célibataire, dans le monde d’aujourd’hui, à 35 ans? J’aborde aussi le thème des galères de la vie d’actrice, car bien sûr, Mudith, comme Marilyn Monroe, est actrice… ou du moins essaye de l’être ! Elle raconte au public avec délectation ses expériences plus ou moins désastreuses de comédienne qui « cachetonne ». Evidemment apparaît aussi la question de l’identité : est-elle ou non ashkénaze ? Quel est l’héritage de ses parents ? Pourquoi elle est la réincarnation ashkénaze de Marilyn Monroe d’ailleurs ? Cette enquête sur elle-même va l’amener très loin… jusqu’à l’intérieur de son propre nez !

 

(c) Sophie Garric

 

Un autre thème important abordé est le consentement, la libération de la femme. Sans pour autant que le spectacle ne soit excluant pour les hommes, au contraire ! Simplement, Mudith va apprendre à dire non pour la première fois de sa vie, au cours de cette nuit.

 

2/ Quelles sont vos sources d’inspiration ? Comment vous est venue l’envie de traiter ces thèmes-là sur scène ?

 

L’écriture a pris deux années, avec quelques interruptions car je travaillais également sur d’autres projets, notamment plusieurs scénarios de courts et longs-métrages..

 

La première chose, c’est bien sûr que j’avais envie de faire rire ! Je désirais exploiter mon potentiel comique et j’avais envie de raconter des histoires drôles et surprenantes, qu’elles soient réelles ou fictives.

 

J’ai mis bout-à-bout toutes les thématiques évoquées plus haut, et bien d’autres : le rendez-vous foireux avec un mec, un moment très gênant avec la mère, une comédienne / animatrice de goûter d’anniversaire pour enfants qui pète les plombs.. des choses très différentes… Ce qui donnait plusieurs sketches pour un one-woman-show. Mais mon intention était de raconter une histoire qui se boucle à la fin du spectacle, de créer un fil conducteur, pour aboutir à un véritable seule-en-scène. Trouver le fil rouge s’est avéré compliqué ! J’ai choisi l’angle d’une fille qui voudrait ressembler à Marilyn Monroe, blonde, voluptueuse et désirant plus que tout être actrice… mais qui, d’après ce qu’on lui dit, ressemble davantage à Barbara Streisand ! L’angle principal du spectacle est finalement devenu : pourquoi vouloir être quelqu’un d’autre que ce que le miroir nous renvoie ? Comment faire pour s’accepter tel qu’on est réellement ? Comment faire pour CHOISIR plutôt que subir ?

 

(c) Viktor Miletic

 

C’est un spectacle qui aborde la question de l’identité, qui me concerne personnellement et que je trouvais originale. Je me suis dit « essayons ! ». A partir de là, et grâce aussi à l’intervention de James Joint, avec lequel j’ai co-signé la mise en scène, tous les « wagons » de mon spectacle se sont alignés pour créer un seul et même train… Oui j’adore les métaphores (sourire) !

 

3/ D’après vos échanges avec les spectateurs, qu’est-ce qui leur plaît, qu’est-ce qui fait le succès de ce seule-en-scène ?

 

Les gens trouvent que je suis folle ! Ils sortent du spectacle en me disant que je suis complètement barrée. Car je crois que je me suis tout permis pour ce spectacle. J’ose. Même pour moi, au départ, certains passages étaient un peu gênants à répéter ! Déjà, lors de l’écriture, je me suis forcée à sortir de ma zone de confort. Ce n’est pas un spectacle écrit pour plaire à mes parents ! Je suis allée au-delà de mes propres tabous et j’ai écrit des choses que je n’oserais pas dire dans la vie, grâce à mon avatar, Mudith, je peux le faire, avec une certaine candeur. Par exemple, Mudith propose de régler les conflits familiaux, notamment son complexe d’Œdipe inversé avec sa mère, en allant en famille en club échangiste ! Mudith est sûre que tout serait plus simple après un 69 avec sa mère, le complexe serait réglé concrètement et en live, ce qui mettrait fin à l’infernale rivalité mère/fille. Chacune « repartirait de son côté, apaisée, repue » et pourrait passer à la suite !

 

Mudith a plein de réflexions comme ça, qui sont des extensions de ce que Freud a pu dire sur la sexualité, sur les complexes d’Œdipe et d’Electre, sur le fait d’avoir envie de coucher avec ses parents etc… J’ai eu envie d’aller au bout de la thématique ! Pour ce personnage, j’ai opté pour une posture très glamour, je suis habillée, coiffée, manucurée, maquillée… J’ai essayé de me fondre dans ce style Hollywoodien des années 50, de Marilyn, pour créer un contraste avec le discours du personnage, qui est assez « trash » et direct. Ça désarçonne un peu le public au départ mais c’est aussi ce qui lui plaît beaucoup, je crois. C’est libérateur.

 

(c) Christine Coquilleau

 

Mudith fait aussi des choses très visuelles dans le spectacle, très physiques, avec de la danse, du chant, des cascades… enfin je ne peux pas trop en dire, mais c’est un vrai show, avec pas mal de surprises, très Broadway ! En plus de tout ça, je ne voulais pas uniquement créer un spectacle d’humour. Je voulais aussi émouvoir avec sincérité. Je tente de faire basculer le spectateur dans l’émotion lorsqu’il ne s’y attend pas. Souvent, les gens me disent qu’ils pensaient seulement qu’ils allaient se marrer et sont surpris, en tout cas pour certains, par l’émotion que le spectacle leur procure, surtout à la fin.

 

4/ Est-ce qu’au fur et à mesure des représentations et des retours du public, vous vous êtes permis des adaptations ?

 

Tout à fait ! Je travaille avec mon co-metteur en scène, James Joint, qui dirige un collectif génial d’acteurs dont je fais partie : « Ouvre Tes Ailes ». On a beaucoup travaillé sur un passage notamment : celui où Mudith rentre dans son propre nez, comme si nous étions dans « Alice au Pays des Merveilles ». Ce passage n’a pas été écrit pour être comique, c’était plutôt une situation absurde, onirique, poétique, un peu à la Terry Gilliam ("Les Aventures du Baron de Munchaüsen"), qui est une grande référence pour moi. Mais beaucoup de gens m’ont dit qu’ils ne comprenaient pas bien ce passage qui tranchait avec le reste du spectacle. Avec James, on a donc beaucoup retravaillé et coupé le texte, ah le nez a été bien raboté ! Mais ça reste un passage que j’adore et qui fait sens pour la suite.

 

De même pour Marcus, le « date » de Mudith, que j’interprète également sur scène. C’est une sorte de macho au charme disons.. ténébreux. Au début, il avait moins de texte… Parce qu’on a eu des retours dans ce sens, on a décidé de l’affiner, de l’incarner beaucoup plus, en lui trouvant des failles qui le fassent sortir un peu de la caricature cliché du dragueur macho. En me mettant vraiment dans sa peau, je me suis mise à trouver et à aimer ce personnage, qui, malgré ses atroces défauts, me plaît de plus en plus à incarner !

 

Parfois, je teste aussi des improvisations en live. James, planqué au fond de la salle, me dit si ça passe ou si ça casse ! Le spectacle reste jeune, les choses vont encore évoluer. On est à l’écoute du public et de ses retours.

 

(c) Christine Coquilleau

 

5/ Vous jouez le rôle principal, Mudith, mais vous interprétez également d’autres personnages, notamment Marcus, le « date », sans pour autant changer de tenue, ni même d’accessoires… Psychologiquement, comment faites-vous la bascule entre les personnages ?

 

C’est un exercice très précis pour un acteur, que je n’avais pas appris dans les écoles de théâtre par lesquelles je suis passée… j’avais l’habitude de travailler un seul personnage à la fois ! Là, c’est quasi du clown, il faut trouver un détail physique très précis dans la tenue du corps ou dans la voix du personnage, pour qu’il soit identifiable immédiatement. C’est une première pour moi dans mon parcours de comédienne de m’attaquer à ce switch, très difficile, d’une seconde, entre une femme élégante qui se tient très droite, et, par exemple, un homme plus viril, lourd, qui bouge davantage, qui regarde par en-dessous. J’ai trouvé en répétition des postures physiques, notamment pour la mère de Mudith, un personnage plutôt angoissé, qui se tient la gorge compulsivement comme si elle s’étranglait, ou la reine des Amazones, qui se tient jambes écartées, mains sur les hanches, tête haute comme Beyoncé... Trouver tous ces “signes distinctifs” nous a demandé beaucoup de travail, avec James, pour affûter et patiner ces transitions. On a répété encore et encore, parfois des heures, le même micro passage de cinq minutes !

 

(c) Christine Coquilleau

 

J’admire beaucoup les artistes capables de nous faire apparaître sur scène de nombreux personnages, comme Philippe Caubère ou Gad Elmaleh. Mon objectif est d’arriver à la même dextérité, car ma plus grande peur est de manquer de crédibilité. Je travaille encore ! Lors des premières représentations, je m’épuisais de trac à chaque transition entre ces différents personnages…mais maintenant je m’amuse de plus en plus, heureusement !

 

6/ En conclusion, que diriez-vous pour inciter définitivement les lecteurs à venir voir ce spectacle ?

 

C’est un vrai show, comme un tour de manège avec plein de loopings, qui va vous surprendre, peut-être vous choquer, vous bousculer, mais qui va surtout, je l’espère, vous faire rire très fort ! Je prends le pari que vous vous reconnaîtrez forcément à un moment du spectacle. Alors à très vite à bord de La Nouvelle Seine, le loveboat de Notre-Dame !

 

Merci Judith pour votre disponibilité !

Publié dans Théâtre

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