Les amants de Montmartre : Interview croisée avec France et Michael, les comédiens de cette belle pièce !

Publié le par Julian STOCKY

 

 

Bonjour France, bonjour Michael,

Quel plaisir d’effectuer cette interview avec vous deux !

Vous êtes à l’affiche, jusqu’au premier week-end de septembre, de la pièce « Les amants de Montmartre », au théâtre du Funambule Montmartre, les samedis à 17h et les dimanches à 20h. A titre personnel, après plusieurs dates en province, on imagine sans doute la joie que cela doit être pour vous ?

France : Ah oui, en plus à Montmartre, au Funambule ! On est très contents, c’était le meilleur endroit possibleJ.

Michael : Comme on le dit dans la pièce : « Nos rêves accrochés aux marches du Sacré Cœur ». C’est une super aventure, on est contents, le public l’est aussi, c’est chouette !

Avec vos mots, comment présenter ce spectacle ?

Michael : C’est une comédie pétillante. On l’avait jouée au festival d’Avignon et quelqu’un avait dit, en sortant, que « c’est une pièce champagne ». C’est exactement cela, c’est très joyeux, très festif. La pièce se joue au début du XXe siècle, il y avait alors un côté très misogyne que l’on combat avec un second degré, évidemment. Cela résonne davantage encore depuis qu’il y a eu MeToo, c’est assez impressionnant. Finalement, cette pièce est super contemporaine !

France : On suit un couple, avec la rencontre, la séduction, les désillusions, les engueulades, les réconciliations, le traintrain. Comme on est entre 1910 et 1920, on fait un petit passage par la première guerre mondiale. Le couple est universel, il y a des hauts et des bas : dans les années 1900 aussi, avec des caractères bien trempés et, comme le disait Michael, tout le côté misogyne de l’époque. C’était l’époque qui voulait ça et, heureusement, beaucoup de chemin a été fait depuis.

 

 

Michael : Courteline, l’auteur des textes, a été joué maintes et maintes fois et je pense que l’originalité de cette pièce vient de l’idée de la metteuse en scène d’incorporer des chansons de l’époque, jouées en live à l’accordéon. C’est le petit truc en plus ! C’est varié, chantant, fluide, on passe de scène en scène et c’est pour cela que c’est un beau spectacle, que nous sommes très heureux de jouer.

Lors du passage à la guerre, les deux chansons sont très émouvantes, avant ensuite de retomber dans la comédie avec le texte de Courteline « La paix chez soi » où je fais les comptes, au moment où ma compagne vient chercher ses sous. A l’époque, la femme était tributaire financièrement, elle n’avait pas le droit de signer des chèques ni même d’avoir un compte bancaire. Lorsqu’elle vient récupérer son argent, je ne vais pas tout lui donner parce que je l’ai mise à l’amende. Des femmes qui viennent voir la pièce se rendent compte à quel point c’était terrible à l’époque. On a encore du chemin à faire sur l’égalité homme/femme mais il y a déjà eu un beau progrès.

France : Après, Marguerite, mon personnage, a aussi des armes, elle ne se laisse pas faire… J

Justement, sans tout en dévoiler, quelles sont les principales caractéristiques de vos personnages respectifs ?

France : On pourrait dire que Marguerite n’a pas inventé la poudre mais qu’elle a plus de suite dans les idées que ce que l’on pourrait bien croire.

Michael : René est un mec un peu terre-à-terre, un peu gouailleur, de son temps, avec la misogynie de son temps. Par contre, c’est un pleutre, c’est un peureux, il se la raconte, il fait le fier, il fait son coq mais il n’est pas très fute-fute non plus finalement.

France : Je dirais qu’il fait le fier mais que, au fond, il a le cœur tendreJ.

 

 

Si l’on revient quelques temps en arrière, au moment de rentrer dans la peau de ces personnages pour la première fois, vous étiez-vous (re)plongés dans l’atmosphère de l’époque ? Ou aviez-vous préféré garder une certaine distance ?

France : Pour le coup, quand on monte du classique, on peut soit le faire de façon contemporaine en décalant la situation à aujourd’hui, soit, comme on l’a fait ici, rester dans l’époque. Notre metteuse en scène voulait donner à la pièce un petit côté gouailleur, titi parisien… J’ai re-regardé des films de cette époque, notamment « Hôtel du nord », « La môme » ou encore « Les enfants du paradis ».

Michael : D’ailleurs, il y a un beau clin d’œil, à un moment donné : dans une scène qui s’appelle « Le Madère », où Marguerite a bu tout le Madère, tout en faisant semblant du contraire, elle s’exclame « Le Madère ? Quel Madère ? », avant que je ne lui réponde « Quel Madère, quel Madère… », en allusion à la fameuse tirade d’Arletty « Atmosphère, atmosphère… »

C’est pareil pour moi, je me suis replongé dans cette époque-là, l’époque des Gabin et Louis Jouvet.

Vous avez rapidement commencé à l’évoquer, quels principaux retours pouvez-vous avoir du public ?

France : On me parle souvent des chansons, je pense que les gens ne s’attendent pas à ce qu’il y en ait autant. Ils sont très contents de réentendre ces airs, qu’ils connaissent plus ou moins bien mais qui ont toujours quelque chose de familier. Il y a un petit coté nostalgique, qui fait plaisir, qui nous replonge dans les souvenirs que l’on a pu avoir avec ses parents ou ses grands-parents.

Michael : C’est la deuxième version de la pièce. On avait déjà joué avant la Covid et avant MeToo et, même quand on l’a rejouée assez récemment dans le nord, certaines femmes sont ressorties un peu braquées et offusquées du propos de ces textes de Courteline. On s’est dit qu’il faudrait peut-être adapter un peu pour que le second degré passe beaucoup mieux. De ce fait-là, pour le Funambule, la metteuse en scène a eu l’idée de faire chanter à France « La Marseillaise des cotillons », qui est finalement la première chanson féministe, de 1848. En fait, cette chanson-là est appréciée des femmes notamment, c’est un bon moment du spectacle, qui fait office de bascule : le public comprend qu’il y a du second degré dans la pièce et que l’on sait de quoi on parle.

 

 

France : Courteline n’était pas forcément misogyne, c’est surtout que c’est ancré dans une époque qui était comme ça. Là, effectivement, avec tout ce que l’on a rajouté, on voit que la situation ne convient pas à Marguerite et qu’elle veut se rebeller !

Michael : Les aphorismes dits par l’accordéoniste, qui joue le rôle de narrateur de la pièce, ont été en fait relevés par Courteline dans des bistrots, notamment rue Lepic, un peu comme des brèves de comptoir. Notamment « La femme ne voit jamais ce que l’on fait pour elle, elle ne voit que ce qu’on ne fait pas » ou encore « Il y a deux sortes de femmes : celles qui commandent et celles qui n’obéissent pas ». C’est un beau témoignage de son temps, tout simplement.

On a ajouté aussi un côté burlesque, dans la manière de jouer. Moi qui suis d’un faciès très visuel, qui aime beaucoup les mimiques, certaines scènes peuvent faire un peu Tex Avery.

Pour vous, artistiquement parlant, ce spectacle vous permet sans doute une palette de jeu large et variée…

Michael : Ce qui fait que l’on s’amuse beaucoup !

France : Entre la chanson, la comédie, le drame, le texte de Courteline, qui est très bien écrit, coloré, imagé, avec des mots désuets mais qui sont très agréables à réutiliser, tout cela donne une belle palette de jeu. D’avoir un musicien en live est vraiment top.

Michael : Quand il arrive avec son accordéon, pour faire un néologisme, le public est « stupébahi », les gens sont à la fois stupéfaits et ébahis.

 

 

Au-delà des dates déjà programmées jusqu’à début septembre, que peut-on vous souhaiter pour la suite de cette aventure ?

France : On aimerait continuer à jouer, pourquoi pas via une tournée internationale, il faut viser grandJ. Oui, faisons découvrir le patrimoine français par-delà les frontières. En plus, c’est bien, on est une petite équipe, c’est facile pour nous d’aller partout.

Michael : Il faut juste que l’on achète un banc un peu plus léger que celui en fonte que nous avons actuellementJ. Mais c’est un détail… J

Merci à tous les deux pour vos réponses !

Publié dans Théâtre

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