Quel plaisir d’effectuer cette interview avec vous !
Vous êtes actuellement sur scène, tous les samedis soir, à l’Appart de la Villette, avec le spectacle « Les accords de Vénus ». A titre personnel, on imagine sans doute la joie que cela doit être pour vous ?
Complètement ! J'ai choisi de faire une pause dans ma carrière quand j’ai eu mon fils, j’ai vraiment tout arrêté jusqu'à ce qu'il entre à la maternelle, et cette année, je remonte enfin sur scène et il était temps …Avant de tomber enceinte, je jouais notamment un spectacle sur Whitney Houston, j'ai eu la chance de donner 150 dates de ce spectacle, notamment au théâtre de l’Archipel et au festival d’Avignon. « Les accords de Vénus » est mon troisième spectacle musical et, effectivement, c’est une grande grande joie…Je le dis d’ailleurs dans le spectacle, la scène est l’endroit où je me sens le plus à ma place, peut-être presque l’un des seuls endroits où je me sens vraiment à ma place, où j’ai l’impression, à la fois, de servir à quelque chose et d’être encore plus moi-même.
Dans ce spectacle, je joue mon propre rôle, je raconte mon histoire, le scénario est très très personnel, j'ai essayé d'aller le plus possible en profondeur à travers ma vision de la vie en général, de la famille, ma position en tant que femme, en tant qu’artiste etc… alors à la joie s'ajoute un véritable sentiment d'accomplissement grâce à ce projet. Et puis, c’est la première fois que j’interprète mes chansons dans un spectacle écrit et mis en scène, c'est du théâtre musical, on peut parler d’un seule-en-scène où à la fois ma musique et mon parcours sont comme mis à nu je dirais, dans la version la plus simple, en piano voix, je m'exprime sans tabous ni fioritures. Après, je ne suis pas fermée, plus tard, je sais que je serai amenée à jouer mes morceaux avec un orchestre, des choeurs et même des danseurs ah ah !…
Ce côté intimiste du piano voix et des thèmes personnels abordés s’inscrit parfaitement dans le côté intimiste du lieu, où le public est au plus proche de vous et inversement…
Tout à fait ! C’est hyper agréable pour moi de jouer ici, je tends les bras et je peux toucher les gens:). La déco rappelle celle d’un appartement, on se croit à la maison, c’est particulièrement chaleureux…Bien sûr, j’ai quand même envie de jouer plus tard ce spectacle dans de plus grandes salles. Je l’avais déjà fait en partie au TMG, j’ai pu avoir la sensation sur une vraie scène de théâtre avec le rideau rouge et tout, et c’est encore différent, c’est une autre énergie. Ici, à l'Appart' de la Villette, la proximité est l’occasion pour moi de bien rencontrer mon public, d’avoir une première approche très intimiste mais j’ai hâte aussi d’aller dans un grand théâtre. En tout cas, j’adore jouer dans des lieux intimistes, j’y reviendrai toujours. J’aime l’échange particulier et ce que je donne dans ce cadre-là. D'ailleurs quand je suis moi-même dans le public, je préfère toujours voir les artistes dans de petites salles, avoir cette sensation privilégiée d'être au plus près de la scène...
Pour en revenir au spectacle en lui-même, quels principaux thèmes y abordez-vous et quels registres musicaux y associez-vous ?
Excellente question ! C’est vrai que c’est intéressant de faire le lien entre le registre musical et les thèmes… Les thématiques que j’aborde sont centrées sur mon propre parcours. Il y a la mixité culturelle, je suis avec un homme qui n’est pas de ma culture, ce qui était d’ailleurs déjà le cas de mes parents qui ne sont pas de la même culture tous les deux. Cette mixité va avec le fait de chercher sa place dans la société, notamment culturellement parlant. C’est le cœur du spectacle. Derrière cela, il y a la parentalité en général, la vie de couple, l'ambition et, surtout, l’hypersensibilité. Je me définis comme cela aujourd’hui, même si, il y a quelques années, je ne connaissais même pas ce concept ah ah. C’est vrai que je me reconnais dans ce terme-là car j’ai une tendance à être hyper émotive, hyper angoissée, ultra excessive. Donc c’est un fil rouge dans le spectacle, qui traverse à la fois ma position de femme dans mon couple, ma position de maman, ma position de femme qui essaie de s’en sortir dans la vie et d’avanver dans une carrière artistique, ma position de fille dans une famille, ma position d’amie etc...
En fonction des chansons, avec un peu de recul, si je les écoute sans me dire que c’est moi qui les ai écrites, il y a quelque chose de l'ordre d'un voyage dans le temps. Par exemple, j’ai une chanson qui parle du mariage de mes parents - j’étais alors déjà adulte : je me suis inspirée d’une chanson yiddish, ça donne une tonalité un peu hors du temps. Après, il y a des morceaux beaucoup plus actuels, notamment ceux liés à mon fils. Dans la globalité, on reste toujours dans de la chanson française, il y a une recherche dans l’écriture, je ne fais pas de la musique juste pour faire de la musique, j'ai toujours une volonté d’apporter des messages à ma musique. Cette chanson française est accompagnée de plein d’influences, pop, hip hop, parfois même plus exotique, on s'est inspirés de sonorités Klezmer et afro-caraïbeennes notamment.
Je pense au titre « L’impertinente », qui est un auto-portrait dans lequel j'évoque le fait d’arriver à lâcher prise pour m’accepter telle que je suis : c’est un mélange entre un peu d’afro et un peu de yiddish avec un flow urbain. Un autre morceau, « Que chaque jour soit le premier », est un titre OVNI : l’idée était de faire presque un morceau de science-fiction un peu philosophique. Il est assez hybride, on a un refrain très entêtant, c’est plutôt un morceau de pop dans l’absolu mais avec une tonalité hip hop et une autre de chanson française classique. C’est ce qui me définit : je suis quelqu’un de très nostalgique et en même temps fascinée par le futur. J'ai grandi avec la chanson française, avec le hip hop, avec la pop, la musique classique et tout ça a du se mélanger dans ma tête. Donc, en fonction des époques que je raconte, on va avoir aussi, dans la musique, différentes époques et différentes contrées du monde.
Quels principaux retours avez-vous pu avoir du public, principalement à l’issue du spectacle ?
J’ai eu l’impression, après plusieurs représentations, que mon parcours intéresse les gens donc je suis très contente. Il y a deux mots qui reviennent souvent : l’authenticité et l’émotion. Les spectateurs ont réussi à capter que j’étais allée en profondeur dans ce que je suis. L’autre défi que je semble avoir relevé, les gens m’en parlant souvent, est de leur faire traverser différentes palettes d'émotions : du rire, des larmes, des surprises, de la rage... De vivre…C’était mon ambition donc je me dis que je suis plutôt sur le bon chemin…Après, il reste encore du travail, je n’arrête pas d’essayer de me perfectionner d’une date à l’autre, je change des passages, je remplace même parfois une chanson par une autre…
Plus jeune, j’ai fait une école de cinéma et j’essaie de travailler mon spectacle comme un film. Volontairement, j’ai mis une chanson un peu triste après une autre plus enlevée, une scène un peu basse après une scène un peu haute,…pour jouer avec l’émotion du public, au même titre que je joue avec mes propres émotions. Il y a, par exemple, une chanson hyper dure qui parle d’un enfant abandonné par ses enfants et, tout de suite après, j’enchaine avec une vanne puis avec un petit extrait de Bob Marley, qui nous relève. Cela fait partie aussi des messages du spectacle : on peut toujours se relever de tout et, surtout, ce qui est super important pour accéder à un certain bonheur, c’est de s’assumer, de s’accepter comme on est, avec ses défauts, ses qualités, ses failles, ses forces.
Que peut-on vous souhaiter pour la suite de cette belle aventure ?
Un petit Olympia :) :) :) :), un petit Stade de France :) :) :) :)… J’ai commencé à avoir quelques dates en Province, on peut me souhaiter que ça se multiplie, que les gens écoutent et cherchent à écouter ma musique, également sur l’album qui sort officiellement le 8 mars sur les plateformes, la journée des droits de la femme (comme par hasard).
On peut aussi me souhaiter un peu plus encore de visibilité. C’est vrai que c’est ça, aujourd’hui, qui fera la différence… Des gens que je ne connaissais pas sont déjà venus voir le spectacle 2 à 3 fois, et ça c’est mon succès, une petite réussite personnelle. Certainement que ça leur a parlé, qu’il y a eu cet effet miroir qui a fonctionné, ce qui était vraiment mon but à la base. Si j’ai raconté mon histoire, bien sûr c’est qu’il y a de l’égo là-dedans mais pas seulement, j’ai aussi envie de dire aux gens – et c’est d'ailleurs ce que je fais souvent dans la vie de tous les jours : « Vas-y, c’est cool, ne t’inquiète pas, tu as le droit d’être comme tu es et tout ira bien ». C’est encore plus important dans le contexte que l’on vit actuellement, dans toute cette violence perpétuelle qu’on nous envoie de tous les côtés…
En complément, vous serez à nouveau sur la scène du TMG ce lundi 19 février, pour une nouvelle soirée « OriginAllive », où plusieurs artistes se présentent à tour de rôle face au public…
En fait, c’est Vincent Lafleur qui organise cette soirée, c’est un très très grand artiste qui est, à la fois, auteur, compositeur, interprète, pianiste, producteur. Je l’ai rencontré il y a une dizaine d’années, il m’accompagnait dans les piano-bars, je démarrais à peine, je me testais sur scène à l'époque, je ne jouais pas encore, je chantais simplement. On a baroudé ensemble puis on ne s’est plus vus pendant des années. Récemment, il a monté ce projet et je suis super contente qu’il ait pensé à moi. C’est la quatrième édition, où il rassemble sur scène des artistes indépendants, qui n’ont pas forcément la chance de se faire connaître. C’est un joli théâtre, ça donne un petit côté prestigieux et même glamour je trouve. C’est une super aventure, j’adore. Et tout le monde a beaucoup de talent, je suis toujours très impressionnée par les autres artistes. C’est aussi l’occasion, pour les gens, de découvrir des artistes qu’ils n’ont pas forcément encore eu l’opportunité d’entendre ailleurs.
Quel plaisir d’effectuer cette nouvelle interview avec vous !
Vous serez sur scène, le samedi 3 février prochain, à Villeneuve-Saint-Georges, pour la première de la pièce « Ravage ». A titre personnel, on imagine la joie que cela doit être pour vous ?
Oui, ça fait un an que l’on est en répétitions, à la somme de 4 sessions. Enfin la première arrive….Cela a permis de créer une petit famille, dans une ambiance très chaleureuse sur le plateau et très bienveillante entre nous. Il y a beaucoup d’amour…et beaucoup d’humour aussi, on rigole bien entre nous. Je suis ravie de remonter sur le plateau entourée de camarades, après avoir fait pendant 5 ans un seule-en-scène : ça fait du bien de me retrouver avec du monde. Cela m’a permis de renouer avec ce premier amour du théâtre de troupe, même si le seule-en-scène est une expérience que j’ai adorée, qui m’a faite vibrer. Etre en groupe est aussi un grand bonheur et on est tous très heureux de se retrouver à chaque fois. J’espère que cela va durer, au-delà de la première date évoquée.
Plus concrètement, sans tout en dévoiler, comment présenter ce spectacle ?
« Ravage » est une tragi-comédie : 7 personnages vont se retrouver enfermés, un soir d’orage, dans une villa. Ils représentent les 7 péchés capitaux et on va voir leurs relations évoluer sur une heure et quart à peu près. Comme les spectateurs le verront, il y a plein de petites nuances…C’est très bien écrit par l’auteur Clark James, qui est aussi le metteur en scène, tout en jouant dedans la paresse. De mon côté, j’interprète la colère et je suis le personnage qui n’est pas si comique que cela…Cela fait du bien de retrouver un personnage profond, avec beaucoup de fêlures et de souffrances. On en parlait avec le metteur en scène, c’est le personnage sans doute le plus justifié dans son péché…
Au moment de rentrer dans la peau de votre personnage, avez-vous eu des sources personnelles d’inspiration pour certains traits de sa personnalité ?
En vrai, cette pièce m’est un peu tombée dans les mains par hasard. En la lisant, c’était bizarre, elle correspondait un peu à un parcours que je venais de vivre. J’avais l’impression de faire ma catharsis, de tout nettoyer en jouantJ. C’est toujours délicat, on fait semblant en jouant mais il faut être assez pro pour se servir de ce que l’on est sans trop s’écorcher. D’ailleurs, j’ai vécu des moments, en répétition, assez difficiles par rapport à cela. Mais, comme il y a énormément de bienveillance de la part de toute l’équipe, j’ai pu avancer…
C’est traité avec beaucoup d’humour, c’est aussi cela qui m’a plu. Clark est bienveillant, très ouvert à ce que l’on peut proposer et c’était assez facile de se mettre dedans. Ce qui était plus dur, comme on a tous une note très marquée, c’était d’y trouver beaucoup de nuances pour pas que le public ne s’ennuie. En plus, je ne suis pas quelqu’un de colérique à la base, je suis plutôt assez zen mais je suis une ancienne nerveuse : aller réveiller cela n’était pas si simple que cela, il ne fallait pas que ce travail personnel n’ait servi à rien. Mais je me connais bien…En tout cas, c’est un travail très intéressant !
La date du 3 février est d’autant plus importante qu’elle a vocation à inciter ensuite d’autres théâtres à vous programmer…
Exactement ! On a choisi une très grande salle pour cela donc venez ! On a de la chance, le théâtre nous épaule énormément. La jauge est de 500 places et on remplit déjà plutôt très bien, on espère que ça va continuer comme cela, afin de présenter la pièce à un maximum de monde.
Je suis trop contente de faire ce projet très drôle : même si mon personnage ne l’est pas, je sais que mes camarades autour font un excellent travail. J’ai hâte de les voir eux-aussi sur scène !
On sent, dans vos propos, que, au-delà de l’aventure artistique, c’est aussi une très chouette aventure humaine…
Complètement ! Après seulement 20 minutes avec eux, j’étais à la maison et très à l’aise avec tout le monde. On vient tous d’horizons différents, nos parcours sont assez fous, certains viennent du conservatoire national, d’autres ont de belles expériences à la télévision, beaucoup ont de chouettes parcours sur scène, un est cascadeur…Me concernant, j’ai un parcours atypique dans la comédie musicale… En tout cas, tous sont incroyables, on a matché et c’est aussi cela qui fait la richesse de notre groupe. C’est trop beau, on est tous allés soutenir les projets des autres : vraiment, c’est une magnifique rencontre et on ne se quitte plus depuis un an.
A quelques jours de la date du 3 février, dans quel état d’esprit êtes-vous ? Quels sentiments prédominent actuellement ?
Je suis surtout très impatiente de les retrouver pour les derniers jours de répétitions ! L’excitation et le stress arriveront progressivement je pense, face à la charge de travail restante. En tout cas, les promesses sont très belles et c’est plaisant de voir un an de travail arriver au bout.
En parallèle, le 24 février prochain, vous serez en concert au Billy Bob’s au Disney Village. C’est, là aussi, une autre belle aventure artistique…
Oui ! Ce sera entrée libre donc, là aussi, n’hésitez pas à venir…En fait, le tout premier concert que j’ai vu dans ma vie était là-bas, alors que je n’avais pas encore 4 ans. Donc la boucle est bouclée et c’est un honneur de pouvoir y faire quelques représentations. J’en avais déjà faites en fin d’année dernière et j’y retourne dans quelques semaines. J’y interprète essentiellement des reprises, dans le registre pop-rock, ainsi que des compositions personnelles dans le même registre. C’est un beau cadeau, c’est une très belle opportunité pour moi !
J’ai créé un petit groupe, « Sunny dream », avec mon meilleur ami, chanteur également. On se produira dans le même lieu, le 24 avril, avec plein de reprises.
En parallèle, le programme « En terrasse » est toujours disponible sur Prime, j’y joue Juliette.
Ces différentes cordes artistiques, bien que pouvant paraitre peut-être éloignées, sont certainement très complémentaires pour vous…
Cela a toujours été le cas pour moi. Je l’ai dit, je viens de la comédie musicale et j’ai vraiment besoin de faire différentes choses à la fois. D’avoir tous ces projets est vraiment important pour moi, avec toujours la musique en toile de fond. Tous les projets permettent en tout cas de se renouveler et de se recréer en permanence : ce côté caméléon permet également de voir de quoi on est capable car chaque histoire est un nouveau challenge et chaque personnage est une nouvelle rencontre avec soi-même. C’est ce qui est intéressant et c’est ce que j’aime !
Quel plaisir d’effectuer cette nouvelle interview avec vous !
Nous pourrons vous retrouver en prime time sur TF1 le 25 décembre prochain, dans un nouvel épisode inédit de « Joséphine, ange gardien », sous les traits du personnage de Gilles. A titre personnel, on imagine sans doute la joie que cela doit être pour vous ?
Oui, c’était une joie, à plus d’un titre en plus ! Mimie est une partenaire que j’avais déjà croisée il y a presque dix ans, dans un épisode qui s’appelait « Je ne vous oublierai jamais », avec Alain Doutey. C’est un très très beau souvenir de tournage, avec une très belle écriture très sensible, très touchante. On se connaissait et, entre temps, il y a eu DNA et Mimie a accroché à la série. Entre autres, elle aime beaucoup le personnage de Martin donc, quand on s’est retrouvés, il y avait Franck mais il y avait Martin qu’elle attendait beaucoup aussi. On a beaucoup ri parce qu’elle essayait d’en savoir un peu plus sur les intrigues de DNA, avant tout le monde. Ce que je ne lui accordais pas forcément d’ailleursJ.
Ce tournage m’a permis aussi de retrouver Vanessa Demouy, une partenaire que j’avais croisée sur DNA. Là, pour le coup, on a carrément été propulsés en tant que couple donc c’était très agréable et très joyeux de se retrouver. La troisième chose est que TF1, en me proposant l’épisode, m’avait prévenu que ce serait un épisode plutôt musical et m’avait demandé si j’avais envie de pousser la chansonnette. Moi qui étais en plein développement musical, j’ai dit un grand oui, malgré la peur que j’avais.
Quel regard portez-vous d’ailleurs sur Gilles, un ancien ami de Nora, la directrice du centre de vacances, qu’il retrouve 20 ans après ?
Gilles m’a permis de faire un contrepied d’avec Martin, je lui ai accordé beaucoup de douceur, beaucoup d’empathie, beaucoup de bienveillance. On n’oublie pas que l’on est dans un épisode de « Joséphine », je trouvais cela touchant que l’on puisse, contre toute attente, vingt ans après, faire aboutir une histoire que l’on aurait souhaitée bien plus tôt. C’est joli, il y a de l’espoir !
En tout cas, ce personnage vous permet une palette de jeu large et variée, ce qui doit être plaisant, artistiquement parlant…
C’est nécessaire même parce qu’on reste des artistes créateurs, on aime se surprendre, surprendre les autres et découvrir quels autres tiroirs émotionnels nous composent. Donc quand on a un projet qui nous permet d’aborder des facettes que les gens n’ont pas encore eu le plaisir de découvrir, c’est cadeau !
Les images le montrent tout au long de l’épisode, le cadre de tournage, estival, semble très agréable, aidant aussi à la qualité du rendu final…
Ayant fait quelques post-synchros, j’ai effectivement remarqué que Stéphane Kopecky, le réalisateur, avait eu le talent de ce repérage. J’ai trouvé certains plans très très esthétiques, notamment un moment de retrouvailles avec Vanessa, avec, derrière, un fond de nature sublime, qui était un accessoire de luxe pour ce moment privilégié. J’ai trouvé cela très joli !
Les drones, lors des trajets en bus, survolaient la campagne, il y avait comme quelque chose d’hors France…Peut-être aussi parce que ce bus rappelle les Etats-Unis…On se sentait vraiment ailleurs et je crois que ce sera encore plus le cas en visionnant l’épisode. Cela va transposer vraiment dans une bulle, j’ai l’impression que cet épisode va échapper aux codes du « Joséphine » que l’on a l’habitude d’aborder.
Le chant y est peut-être aussi pour quelque chose : outre ma partie et la musique du film, il y a ces jeunes formidables et très talentueux. On a quand même eu la chance d’avoir Bastiaan et Isabella, pour ne nommer qu’eux, le premier fait de la comédie musicale à Paris, la seconde a été demi-finaliste de « The Voice Kids ». Quand ils abordent leurs morceaux de choral, en plus menés par Victor Jacob, révélation chef d’orchestre des « Victoires de la musique 2023 », ça a donné lieu à un mille-feuilles qualitatif d’associations de talent et je pense que ça va se ressentir aussi quand on va entendre les jeunes aborder Jeanne Mas, Soprano, Kendji Girac…C’est très agréable !
Vous êtes donc certainement curieux et impatient de découvrir le rendu final le 25 décembre prochain et les retours des téléspectateurs…
Oui ! Je suis allé faire quelques petites choses mais c’est le premier grand rôle masculin depuis que j’ai démarré DNA qui m’a été offert donc je voudrais effectivement que ce soit un joli rendez-vous qui marque les esprits et, surtout, que j’ai le talent, le temps d’un épisode, de faire oublier aux gens Martin. Et puis, en ce 25 décembre, d’essayer de faire oublier un petit peu l’environnement ambiant du monde, pour faire du bien…Peut-être que j’ai envie que cet épisode, oui, soit un soin pour les gens !
En parallèle, toujours à l’image, votre personnage Martin Constant sur la quotidienne « Demain Nous Appartient » va participer activement à une enquête sur des cambriolages de cadeaux de Noel qui sévissent à Sète. Retrouver la peau de ce personnage quelques temps après a certainement dû vous faire particulièrement plaisir…
Ouiii, j’ai retrouvé le chemin des studios, j’ai retrouvé les camarades, j’ai retrouvé Jennifer Lauret. C’était au moment où on se rapprochait que l’on a dû se détacher puis à nouveau se retrouver. Avec Jennifer, c’est tellement simple, ce couple Martin/Raphaëlle est assez évident. Martin a eu beaucoup d’histoires joyeuses et fortes mais aucune ne permettait la liberté de sa partenaire : elles avaient toutes des problématiques et Raphaëlle n’en a aucune. Elle aussi avait très très envie de ce couple, je pense que c’est quelque chose qui transparait à l’écran…c’est très important d’avoir envie de former un couple de fiction. C’est très casse gueule aussi parce qu’un couple qui ne marche est, potentiellement dans la fiction, un couple ennuyeux, c’est un couple à qui il faut qu’il arrive des choses…mais, pour l’instant, on a esquivé les écueils.
Et puis de retrouver de suite cette ambiance de Noel…Même si je suis revenu fin septembre, on abordait déjà cette période, avec cette enquête légère mais légère à un degré de lecture car ça va cacher autre chose de plus grave. Effectivement, il y a ce fameux gentleman cambrioleur, qui cambriole par idéologie.
En plus de mener, avec exigence mais humanité, l’équipe du commissariat, il a récemment retrouvé l’amour, vous l’avez évoqué, avec le personnage de Raphaëlle, l’avocate…Votre duo avec la comédienne Jennifer Lauret est l’occasion pour vous de partir sur d’autres enjeux, dans des registres différents, tant dans le binôme amoureux que dans les interactions professionnelles que peuvent avoir les deux personnages lorsqu’ils se retrouvent sur une enquête…
Oui et ça va l’être encore plus parce qu’il va falloir qu’ils se recroisent au travail. Raphaëlle n’en reste pas moins une avocate sur le terrain et Martin interroge de nombreux suspects qu’elle défend. Il va être question, effectivement, d’avoir un comportement adéquat et privilégié avec le personnage de Raphaëlle qui va, parfois, être mon opposante. Cela va être très intéressant !
Vous incarnez ce personnage depuis de nombreuses années maintenant, il a vécu pas mal de choses, personnellement et professionnellement. Là aussi, il doit sans doute vous permettre d’explorer des facettes artistiques diverses mais aussi complémentaires de celles que vous pouvez avoir sur d’autres projets…
Pour le personnage de Gilles, j’ai vraiment été cherché des choses qui, normalement, n’ont jamais été dégagées du côté de Martin. Avec Martin, dès que j’enfile le jean et le cuir, il y a quelque chose qui revient de suite, c’est comme un masque qu’on enfile et qui ne peut évoquer que certaines choses. Dans DNA, je suis employé pour certaines choses et pas d’autres. Je n’ai pas trop l’occasion de m’éloigner de Martin quand je fais DNA. En tout cas, par rapport à Gilles, je ne pense pas que l’un ait nourri l’autre, j’ai voulu les opposer, j’ai voulu les distancier.
Enfin, dans un autre registre, vous sortez le 22 décembre prochain un nouveau titre, « Jouer », truffé de métaphores cinématographiques. D’où vous sont venues l’envie et l’idée de ce contenu ?
La démarche était murie de longue date, c’est juste le passage à l’acte avec lequel je procrastinais, qui était un faux problème parce que, il y a quelques années, j’avais déjà mené, durant un an, un stage de chant à La manufacture de la chanson, qui avait été conclu par trois petits concerts intimistes, dans lesquels j’avais pu m’éprouver en tant que chanteur et réaliser à quel point on ne s’improvise pas dans cet art-là. Ensuite, DNA est entré dans ma vie et a pris le temps que ça a pris mais j’ai toujours eu cette soif de continuer sur le chemin musical. J’ai toujours eu la curiosité de vouloir éprouver le processus créatif de la confection d’un morceau. Tout est parti de là…J’ai choisi un artiste, que j’ai harponné sur Instagram parce que les réseaux sociaux servent à être sociables. Cet artiste a accepté de me rencontrer, a aimé ma démarche, a aimé la naïveté et l’amusement de ma démarche, il m’a pris par la main et m’a emmené en studio. Si j’avais envie alors de parler de quelque chose, je ne devais pas m’inquiéter, il s’occupait du reste. J’ai évoqué une idée, qu’il a posée sur le papier. Il avait un son de prêt, qu’il m’a proposé, on a travaillé le morceau et c’est devenu le morceau qui est sorti précédemment, qui s’appelle « Et puis il y a moi ». Ce n’est pas le premier morceau de Mancini qui est sorti mais c’est le premier que j’ai travaillé en studio avec mon partenaire, JP Manova.
Après ce premier morceau ensemble, il m’a encouragé, il sentait qu’il pourrait y avoir un beau chemin à parcourir pour moi et il m’a engagé à continuer. C’est ce que j’ai fait et j’ai dû apprendre vite. J’ai rencontré d’autres partenaires qui m’ont aidé sur ce cheminement et ça nous a amenés, le 22 décembre, à sortir ce troisième single qui, effectivement, est un morceau qui évoque la traversée dans une journée que nous faisons tous, parfois, dans la peau d’un autre. On se réveille on est nous, avec les nôtres on est nous mais, parfois, en société, au travail, on est avec un masque. J’ai aimé l’idée de transposer musicalement cette journée, jusqu’à ce que l’on retrouve l’être aimé, nos enfants ou nos proches, avec lesquels on redevient nous-même.
C’est là une autre de vos cordes artistiques, que l’on peut croire différente mais certainement complémentaire elle-aussi de vos rôles sur les plateaux…
Oui, je pense que les différentes palettes de jeu qu’un comédien peut rencontrer dans sa vie forment le puzzle qu’on espère un jour finir.
Quel plaisir d’effectuer cette interview avec vous !
Nous pouvons vous retrouver actuellement dans la série quotidienne à succès de France 2 « Un Si Grand Soleil », sous les traits du personnage de Louis. A titre personnel, on imagine sans doute la joie que cela doit être pour vous de faire partie de cette belle famille artistique ?
Oui, complètement ! C’était un peu impressionnant au début, je me disais que c’était énorme. J’ai découvert les 4 équipes, j’ai essayé de « juste » faire mon travail bien comme il faut. On est hyper bien accueilli, c’est très humain et, très vite, je me suis attaché aux équipes techniques, aux réalisateurs, aux comédiens. Des affinités se sont créées, on partage des moments en dehors du tournage : des repas, des fêtes,…On s’entend tous très bien, la chaleur humaine est très très agréable dans cette équipe.
Les conditions de tournage sont particulièrement plaisantes, aidant sans doute à la qualité du rendu final…
Il n’y a que des experts de l’image ! En plus, rien qu’en se baladant dans Montpellier, on sent que c’est une ville à décors. La lumière y est impressionnante, avec plein de teintes selon la journée et les saisons. Les studios de Vendargues sont impressionnants, ils sont modulables, de nouveaux décors ont été ajoutées récemment, notamment le lycée. Personnellement, je préfère tourner en extérieur mais c’est propre à chacun.
Avec le recul, quel regard portez-vous à présent sur Louis, votre personnage ?
J’ai de plus en plus de tendresse pour Louis, je trouve qu’il s’est étoffé. Au casting, on me l’avait présenté comme un jeune ayant une phobie scolaire, c’était vraiment le trait particulier de ce personnage. Je savais alors déjà qu’il avait des parents divorcés et qu’il n’oserait pas dire ses sentiments à une fille. Mais c’était encore assez flou. En fait, on remarque qu’au fil des mois, la trame du personnage s’est beaucoup développée en lien avec ma façon d’interpréter le rôle. Du coup, il y a de plus en plus d’aspects de ma personne en Louis. Personnellement, je n’ai pas connu de phobie scolaire donc, pour mon personnage, j’ai essayé d’y mettre de la phobie sociale et d’autres choses détournées de moi.
Au final, je trouve qu’il est large et qu’il a grandi. Là, ce qui va être intéressant, c’est sa rentrée dans le monde des adultes. Donc plein de choses sont censées arriver : d’autres amours, d’autres projets, professionnels peut-être, …ça va être chouette !
Au travers des différentes intrigues, on a le sentiment que ce personnage permet de véhiculer certains messages et certaines valeurs, avec lesquels on peut être d’accord ou pas…
C’est très agréable à défendre ! Qu’on soit effectivement d’accord avec lui ou non, les sujets ne sont pas neutres, il y a obligatoirement un engagement. Il n’est pas forcément toujours du bon côté mais, à chaque fois, il y va à fond et je pense qu’il est touchant en cela, comme n’importe qui qui se bat pour quelque chose. Je ne peux pas être en jugement de ce personnage, il est parfois un peu naïf mais reste très convaincu, tout en cherchant à se remettre en question, sans être forcément tête baissée. J’ai, moi aussi, un peu ce côté militant et c’est à moi de trouver les subtilités de ce rôle. Ce n’est pas si simple, il faut en fait y aller de manière humble et naïve.
Artistiquement parlant, ce personnage vous permet une palette de jeu hyper large et variée…
Cela me permet de rencontrer plein de personnages différents, j’ai une relation particulière avec chacun et cela crée plein d’angles. Je crois que c’est le côté professionnel qui va s’avancer, j’ai hâte parce que je ne sais pas trop comment Louis va alors y interagir. Pour moi, il a un petit côté flémard, ce n’est pas le plus gros bosseur mais, en même temps, si c’est un métier passion, j’ai l’impression qu’il peut se donner à fond. Un peu comme Marc…Il est bien le fils de son père. Ce rapport aux parents est très agréable ! On se rend compte, volontairement ou pas, qu’il y a des similitudes et on joue là-dessus, ce qui est chouette.
On le sait, le rythme de tournage d’une quotidienne est particulièrement soutenu. Sans doute que, au fur et à mesure des mois sur le plateau, vous êtes de plus en plus à l’aise avec cette organisation ?
J’ai beaucoup appris et, maintenant, j’estime que j’ai acquis en gymnastique, en élasticité, en souplesse de jeu pour très vite essayer de comprendre les indications, les styles de jeu, les lumières et les déplacements. Il ne faut jamais oublier que c’est un style de tournage et que, dès fois, même si on peut faire quelque chose de très bien et de très appliqué, cela peut ne pas forcément correspondre à un autre rythme de tournage, beaucoup plus lent. Donc, en fait, c’est une certaine manière de travailler mais qui n’aide pas forcément dans tout. Quand même, on intègre une rigueur et une efficacité de travail, je crois que j’aime bien cela : on se pose moins de questions et on est obligé d’essayer des choses. C’est un rythme prenant et, sur la longueur, quand on enchaine plusieurs semaines, on sent que l’on a besoin ensuite de prendre l’air. En tout cas, c’est génial, c’est un bon exercice !
Même si ce n’est pas forcément toujours évident, aimez-vous regarder le rendu final pour capitaliser sur votre propre jeu ?
Ce n’est pas toujours simple de se regarder ni de s’écouter, on a l’impression de ne pas avoir la même voix. Mais c’est important de le faire, on voit très vite ce qui va et ce qui ne va pas. On capte plein de détails, ce qui permet d’améliorer pas mal de choses. L’année dernière, j’étais dans des questions de dramaturgie au théâtre pour mes autres activités, où il fallait penser à la cohérence globale entre les différents thèmes donc j’ai plus regardé les épisodes en ce sens, pour comprendre comment ils étaient axés afin d’avoir une couleur commune.
Toujours à propose d’image, au moment de rejoindre, quelques temps en arrière, le plateau pour la première fois, vous étiez-vous (re)plongé dans les épisodes en cours pour mieux encore vous imprégner de l’atmosphère ? Ou aviez-vous préféré arriver plus neutre, avec une touche plus personnelle ?
Bonne question…J’avais regardé des anciens épisodes, pour mieux découvrir certains personnages avec lesquels je serai en interaction, notamment ceux de Kira et des autres jeunes du lycée. Tout ceci pour cerner le ton et la musique.
Au final, cela n’est qu’une histoire de rencontres. Depuis, d’autres jeunes nous ont aussi rejoints, on sent que ça marche, il y a belle une énergie collective. C’est sûr que ça va continuer !
Plus globalement, quels retours pouvez-vous avoir du public concernant votre personnage et la série ?
C’est souvent très mignon ! Je suis très touché par les enfants. Une fois, j’applaudissais à un spectacle, j’étais en plus très ému et un petit est arrivé, m’a tiré par le bras et m’a demandé si c’était moi Louis. Tout content que je lui réponde positivement, il était ensuite allé se rasseoir. Une autre fois, alors que je faisais des courses pour du bricolage, des enfants me tournaient autour et ont fini par me dire « on n’ose pas te demander mais c’est toi Louis ? », ils étaient très très gentils.
Je regarde aussi un peu les réseaux, il y a de tout ! Je reçois de gentils messages, où certains visent même à défendre à tout prix le personnage. Parfois même, c’est incroyable, certaines personnes me préviennent de ce qui va arriver au personnage dans l’épisode du lendemainJ. C’est chouette, on se rend compte que beaucoup de gens qui nous regardent sont marqués ! On crée un lien spécial avec eux en étant présents quotidiennement à l’image. Je vois, en tout cas, que ça ne laisse pas indifférent et tant mieux !
Vous êtes un artiste aux multiples casquettes et nombreuses cordes. Prochainement, vous serez de retour sur scène, un an après, pour un festival musical…
C’est un petit festival indépendant, « L’entre’potes », à côté du Mans, où on va chanter et rapper, avec Clément, de superbes belles compositions. Nous serons accompagnés d’un ami virtuose du piano. On aura un petit moment acoustique et le reste sera composé d’enregistrements électroniques. Nous pourrons faire chanter le public, j’ai hâte ! Après la sortie de notre EP, ce sera l’occasion de retrouver les spectateurs.
Je vais aussi faire de la création sonore pour une pièce de théâtre Nô. Ce sera plus du montage, pour amener une ambiance. Il ne faudra pas que la musique ressorte du lot, il faudra se fondre dans le contenu pour être simplement dans l’accompagnement.
J’ai aussi des projets de théâtre. Après avoir monté un petit projet en juillet pour une restitution d’études, où nous avons joué 3 fois devant notamment du public pro, je pense cette fois-ci réutiliser des écrits sur des violences policières. J’avais déjà monté une petite capsule de 15 minutes et j’aimerais bien la développer.
Cet été, j’ai également commencé à travailler sur une pièce en lien avec l’Arménie, d’après des témoignages recueillis par ma mère, sociologue, auprès de gens ayant vécu le changement de l’URSS. J’aimerais bien créer une sorte de spectacle semi conférence, pour aller plus loin dans l’échange. J’ai déjà réfléchi au squelette et je suis tout particulièrement intéressé par sa mise en scène.
Le fait d’avoir ces différentes casquettes artistiques vous permet de passer d’un domaine à un autre et donc de revenir au précédent de façon plus fraiche, avec du recul…
Vous avez tout dit ! Cela me rafraichit et me ressource. En même temps, je me rends compte que tout me sert et que tout est connecté. Plein d’autres arts encore m’attirent, j’ai fait de l’initiation au cirque, je suis très fan et j’aimerais bien approfondir mes connaissances. Je ne connais pas la marionnette et j’en suis curieux. Elle est, en plus, en plein développement !
Du coup, en conclusion, que peut-on vous souhaiter pour la suite de votre parcours ?
De continuer à prendre du plaisir ! Ma situation actuelle est chouette, elle me plait et j’aimerais bien pousser notamment la comédie, sur des rôles de plus en plus gauches et gênants. Au théâtre, des tonnes de textes me touchent, que j’aimerais bien monter et jouer.
Quel plaisir de vous retrouver pour cette interview !
Votre nouveau projet musical verra bientôt le jour, avec la sortie le 30 août prochain du premier titre, « Alors je reste ». A titre personnel, on imagine sans doute la joie que cela doit être pour vous de le voir se concrétiser ?
C’est une joie immense ! Cela fait plusieurs années maintenant que j’écris des chansons, notamment depuis la fin de la comédie musicale. J’ai des carnets noirs d’idées, de mots, de ratures et le fait d’avoir réussi à enfin oser sortir et divulguer ces pensées est une sorte de soulagement. Je suis très fière de moi ! Après, j’espère que ça va toucher du monde mais, quoi qu’il en soit, la sortie de ce projet est une belle victoire.
De quoi parle ce premier titre et quel en est le registre musical ?
« Alors je reste » est une chanson qui n’était pas prévue initialement dans le projet. Elle parle de Beyrouth et de comment je vis l’éloignement avec ma ville de cœur, depuis 3 ans et le début de la crise avec l’explosion du port. J’ai essayé plusieurs fois d’écrire un texte ou une poésie pour parler de cela mais je n’y arrivais pas. A chaque fois, les mots me paraissaient insipides par rapport à la charge émotionnelle que ça implique d’être éloignée comme cela de chez soi.
Alors que le projet global était quasi finalisé, je me suis mise derrière mon ordinateur avec mon micro et là, j’ai sorti les paroles en a capela, sans rien avoir écrit avant. Les mots et la mélodie me sont venus en même temps ! J’ai compris alors que ce que je voulais exprimer par rapport à l’éloignement de ma ville est le fait que je suis coincée et obligée de rester là où je suis actuellement. C’est donc une chanson assez triste mais qui me permet de passer à un nouveau chapitre et d’accepter d’avoir connu 3 années de déchirure par rapport à mon pays. On n’oublie pas, on digère et on met les mots dessus pour s’en souvenir mais on peut maintenant passer à autre chose. J’espère y retourner très bientôt !
C’est de la pure chanson française, comme on pouvait entendre à l’époque chez Charles Aznavour ou encore Michel Berger. C’est ce qui me fait vibrer le plus car c’est avec cela que j’ai grandie. Bizarrement, j’ai passé plusieurs années à chercher ce que je voulais faire vraiment, en rejetant un peu ce côté de variété française car on m’avait dit, il y a 10 ans, que c’était has-been. Je me suis un peu perdue dans les conseils des gens alors que c’est ce que j’aime le plus depuis toute petite déjà. Ce sont ces artistes-là qui m’inspirent et, maintenant, je me suis retrouvée !
Où pourrons-nous découvrir cette chanson à partir du 30 ?
Elle sera disponible évidemment sur toutes les plateformes de streaming mais aussi sur Youtube car un clip y sera associé. Il a été fait avec Serapis, un super réalisateur très moderne dans son approche. Comme la chanson a un côté classique, je voulais créer du contraste. J’ai travaillé la direction sonore et la réalisation artistique avec Johsef, qui a lui aussi une approche très moderne. C’est ce qui permet de mettre au gout du jour mes références, de créer de la surprise sur quelque chose de familier.
Certainement que vous avez hâte de découvrir les retours du public ?
J’ai la chance d’avoir autour de moi, depuis 11 ans maintenant, des gens adorables qui prennent de mes nouvelles et qui suivent mes projets. Ils sont toujours là et j’ai vraiment hâte de leur faire découvrir. Je vais d’ailleurs leur proposer une écoute en avant-première. On va faire des sessions individuelles où je vais les appeler et où j’enregistrerai leurs réactions, que je pourrai ensuite partager. Il me tarde !
Ce projet est aussi l’occasion d’utiliser vos nombreuses cordes artistiques, notamment l’écriture, la composition ou encore la coproduction. C’est un peu votre bébé…
Effectivement, c’est le premier projet sur lequel je travaille intégralement. J’ai toujours écrit et composé mais là, vraiment, la démarche de mon directeur artistique a été de me pousser à faire le travail toute seule avant d’intervenir. La première chose qu’il m’a demandée, c’est d’avoir abouti 5 chansons avant de commencer à travailler ensemble dessus. Il a une façon très intelligente de travailler, il ne veut pas influencer la direction, il souhaite que cela reste le projet de l’artiste avant tout.
J’ai cru pendant longtemps qu’il fallait travailler avec des gens pour trouver qui on est et que ce sont eux qui allaient nous aider mais c’est faux : en réalité, ça émane de soi et ça prend des années pour réussir à assumer et à aboutir ce que l’on fait ! Je suis allée me former en production et en musique-business, cela m’a permis de comprendre l’industrie. J’ai monté mon label, qui s’appelle « Grand méchant loup » et j’ai signé mon projet dessus donc c’est vraiment mon bébé intégral !
Ce single est aussi le début d’une plus longue aventure, avec d’autres titres à venir…
Complètement ! Le but de tout cela est de retourner sur scène avec ces chansons. J’ai commencé ce projet par « Alors je reste » car, pour moi, ça pose les bases. J’ai une phrase que j’aime bien dire concernant Beyrouth : à défaut d’être ma prochaine destination, ça reste mon point de départ. Donc je veux vraiment commencer en parlant de Beyrouth, en parlant de ce retour aux origines, aux sources. Je le fais a capela, de façon brute et fidèle à ce que je suis.
Après, les autres chansons sont très intérieures, sur la même tonalité. Je cherche à exprimer une forme de poésie de la solitude, une forme de poésie que l’on peut trouver derrière les épreuves que l’on va vivre. J'aime les chansons tristes ! Elles permettent d'essayer justement de dépasser cette tristesse et trouver du beau dans les épreuves et les difficultés.
J’espère, avant la fin de l’année, remonter sur scène. Même si toutes les chansons ne seront alors pas encore sorties, j’aimerais commencer à les faire vivre en public. J’aimerais faire des tous petits concerts, des pocket concerts, dans des lieux très mignons, secrets, dans un cadre ultra intime. Cela me plairait d’avoir ce côté ultra proche des gens car je pense que les chansons doivent vivre ainsi. Je vise, pour l’instant, à partager ainsi ces petits secrets et peut-être que, plus tard, je les jouerai dans de plus grandes salles.
Plus globalement, chaque chanson a sans doute sa propre histoire, avec des durées de création très variables ?
C’est exactement cela ! Dans le process de création, la plupart du temps, celles qui aboutissent sont assez instantanées. Mais cela ne veut pas dire que j’ai l’aboutissement intégral de la chanson dès le début…je vais avoir un couplet et un refrain par exemple uniquement. Typiquement, j’ai terminé il y a quelques jours seulement la toute première chanson créée pour le projet, il y a 4 ans…J’avais déjà l’ossature mais je viens de changer la tonalité ainsi que quelques paroles et j’ai seulement alors trouvé comment elle devait être interprétée.
Les contenus viennent de moments vécus ou d’instants mélancoliques et je peaufine avec le temps. Parfois, je pense que c’est terminé, avant finalement de revenir dessus. C’est une longue aventure que d’aboutir des chansons… J
A quelques jours de la sortie du premier titre, dans quel état d’esprit êtes-vous ?
J’ai déjà anticipé un petit peu car j’ai révélé le preview le 4 août pour que ça coïncide avec la date tristement anniversaire de l’explosion du port de Beyrouth. C’était important pour moi de lancer la machine à cette date donc, maintenant, je ne suis que dans l’impatience. Je bouillonne ! J’ai envie que ça soit bien fait mais je reste confiante car je suis entourée de gens très proches, qui connaissent leur métier et qui sont bons. Je me sens un peu en famille !
Que peut-on du coup vous souhaiter pour les jours à venir mais surtout pour la suite de ce projet ?
Ce que j’aimerais profondément, c’est toucher les gens avec ce projet. Je souhaiterais que les paroles résonnent chez ceux qui vivent la même chose ou des choses similaires, qu’ils n’ont pas pu exprimer. Cela me plairait que ça réveille des émotions, que ça touche, que les gens aient envie de venir me voir en concert pour partager avec moi ces moments d’intimité. J’aimerais découvrir les histoires que l’on raconterait après avoir entendu mes chansons, j’aimerais vraiment que ces dernières appartiennent aux gens. Elles sont certes intimes et autobiographiques mais j’ai envie de les pousser pour les offrir au monde. Mon rêve absolu serait d’entendre mon public les chanterJ.
Quel plaisir d’effectuer cette interview avec vous !
Vous êtes une artiste aux multiples et nombreuses cordes, nous aurons l’occasion d’y revenir. Récemment, vous avez sorti un nouveau clip, « Ta peau ». On imagine sans doute la joie que cela doit être pour vous ?
Oui, c’est vrai ! C’est assez long de concrétiser même un seul morceau. Déjà, ne serait-ce que dans la créativité, il se peut qu’on change. Ça peut ainsi mettre du temps jusqu’à trouver la formule parfaite. Plus tard, même en studio, il m’arrive aussi de faire des modifications… Celui-là a aussi son histoire en termes de création. Tous les couplets existaient depuis longtemps mais j’ai fait des modifications jusqu’à la dernière minute. Il a mis du temps à accoucher, jusqu’à me convenir donc je suis effectivement très heureuse qu’il sorte.
La réalisation du clip est aussi tout un monde, on a des idées et des envies mais, après, il y a ce qu’on peut faire. Je suis très proactive dans les idées, dans les tenues, je surveille tout, je regarde le moindre détail et je veux que ça soit comme j’ai envie. Je fais vraiment attention, je soigne les détails pour que ça colle le plus possible à ce que j’imagine. Ensuite, il faut aussi définir le bon timing de sortie, avec le label et l’attaché de presse. Ces impératifs-là sont un peu abstraits pour nous, les créateurs mais très concrets pour euxJ.
Pour en revenir à la chanson et au clip en eux-mêmes, quels thèmes y sont abordés ? Comment qualifieriez-vous le registre musical ?
Le thème est sur un amour charnel, assez physique, en rapport avec la peau. Avec des jeux de mots autour de ce que la peau peut évoquer, peut transmettre comme émotions, comme sensations et comme saveurs. Ce thème est assez simple et évident, en lien avec une histoire d’amour, un crush comme on dit maintenant, où on aime la peau de l’autre et où on a envie de rester dans cette découverte-là pendant des heures, des mois, des années…
Le clip est venu assez naturellement de cela, avec cette envie de sensualité. Mais j’ai symbolisé ça plus par des fruits, du chocolat, et d’autres choses qui se mangent. Parce qu’il y a cette notion, quand on est amoureux, que l’on a envie de manger l’autre, que l’autre est un bonbon. C’est cette sensualité-là qui est décrite dans le clip. Au niveau des costumes, j’ai travaillé avec Claude Guillon, qui a un univers assez chamanique, yoga, ce qui a fait le pont avec mes autres passions que l’on évoquera plus tard. Lui avait des tenues déjà assez extravagantes et cool, qui m’ont plu. Le réalisateur a aussi amené ses idées sur le rythme, j’avais également envie de couleurs et de fraicheur, à l’opposé d’un précédent clip. En lien avec mon style musical, un peu pop, dansant, un peu sexy à la fois dans les mots et dans la musique. Je ne voulais pas illustrer avec un couple qui s’embrasse, je voulais laisser de la place au rêve.
Quels principaux retours avez-vous pu avoir du public ?
Ils sont très positifs, les vues sont nombreuses, les gens soutiennent. Les proches, les pros et les anonymes m’ont fait de jolis compliments, c’est chouette. Le public a compris et a adoré.
En complément, début août, vous aurez l’occasion de faire la première partie de Véronique Sanson, au Festival de Ramatuelle. Cela doit être une grande fierté ?
Oui, effectivement ! J’avais déjà écrit un EP, mon premier single avait déjà bien marché sur Europe 2 notamment et j’avais eu l’occasion, l’année dernière, de faire la première partie de Charlie Winston. Et, là, cette nouvelle tombe comme quelque chose de très émouvant. En plus, j’aime vraiment beaucoup Véronique Sanson, je connais bien ses chansons et Ramatuelle est très prestigieux, c’est un très beau Festival, où beaucoup de monde a déjà chanté. Je suis très émue, très heureuse et un peu stressée, il faut le dire.
@ Mary Brown
Vous évoquiez précédemment l’EP, qui fait le lien avec d’autres de vos cordes, le yoga et le bien-être. Vous avez d’ailleurs, en ce sens, développé récemment un nouveau lieu, permettant de mélanger vos différentes passions…
L’EP s’appelle « Liberté, égalité, sororité » et l’un des morceaux s’appelle « Sororité », où je parle de ce lien que l’on a entre les femmes, de cette envie d’être ensemble, du féminin sacré, d’accepter les multiples facettes du féminin. C’est l’une des particularités du féminin, on n’est pas dans une case, on peut être à la fois une poupée, une sorcière et une rebelle. Notre être a différentes facettes.
Dans ce lieu des Vosges, que je développe depuis un an, après dix années de pratique personnelle, je fais des retraites de yoga, avec des thématiques, autour de la detox, des chakras ou encore du féminin sacré. Dans celle-ci, évidemment, et contrairement aux autres, il n’y a que des pratiquantes féminines, avec des scènes de paroles, des cérémonies avec des fleurs et des masques de beauté, ou encore du cacao, et même de la musique. J’ai été formée dans ces différents domaines qui m’intéressent beaucoup parce que ça développe aussi la créativité. D’être entre femmes permet d’avoir vraiment cette notion de sororité, où on se reconnait, où on peut livrer notre vulnérabilité, dans le non-jugement. Ces espaces féminins sont vraiment hyper agréables.
Plus globalement, toutes les retraites sont hyper sympas, d’avoir ce lieu est chouette et j’y fais venir d’autres professeurs de yoga. Cela me permet d’y aller alors en tant que simple participante, cela me repose, ce n’est pas moi qui fais, je reçois. Cela me fait du bien !
Si on prend du recul et de la hauteur, vos différentes cordes et casquettes sont sans doute très complémentaires, personnellement et professionnellement ?
Oui, oui ! En fait, je me rends compte que, sous des formes différentes, cela me permet d’aborder des thèmes communs. J’ai écrit aussi des livres de yoga, autour du tantra, de la sensualité, des chakras. Du coup, c’est aussi le féminin sacré ! Donc c’est vrai que l’on va retrouver, dans l’univers de mes livres, des liens avec mon clip. Ainsi, je boucle la boucle mais dans différents domaines et j’exprime ce à quoi je crois à travers différents médias.
@ Mary Brown
Dans mes cours ou encore mes chansons, je dis ce que je pense, je donne mes outils qui me font du bien, j’essaie d’aider comme je peux. Comme je me suis beaucoup formée et que j’ai fait pas mal de travail sur moi-même, ça peut sans doute aider les autres. Après, je fais aussi du soin et du massage, c’est complémentaire parce que l’on comprend des choses sur l’être humain et sur …sa peau. Tout est assez connecté finalement et je pense que ça nourrit ma créativité. Après, il faut trouver le bon timing de gestion car il y a beaucoup de choses à faire mais, pour le moment, j’y arrive.
Pour terminer, en se projetant sur la suite de votre parcours artistique, quelles seraient vos envies ?
Là, j’ai envie de faire un album, je pense que je vais peut-être faire un ou deux singles avant. Encore une fois, ce sont des choses que je déterminerai avec le label. Avec l’EP à 6 titres et mes autres compositions, j’ai déjà 8 chansons, il ne m’en manque plus beaucoup. J’aimerais aussi faire plus de concerts car faire des premières parties d’artistes est super chouette. Je suis aussi comédienne, peut-être que je reviendrai sur les planches. Concernant le lieu dans les Vosges, j’aimerais faire de plus en plus de rencontres avec les professeurs et de plus en plus de stages. C’est hyper adapté, il est trop beau, en pleine forêt. J’ai aussi l’intention de faire un stage par mois, c’est quand même un rythme assez intense que j’aimerais tenir à partir de septembre. Et, je le dis même si c’est le début, j’écris un roman. Ça prendra le temps que ça prendra. Il y a donc beaucoup d’envies, je déborde d’idées !
Merci, Kym, pour toutes vos réponses !
A noter les références et crédits suivants pour le clip :
Auteur-Compositeur @kymthiriot
Réalisation Clip @jodelsaintmarc
Makeup @bene.goussaudmakeup
Chef Décorateur Accessoiriste et costumes @guyon.claude
Réalisation, arrangements, mixage et Mastering @tieryf.music
Quel plaisir d’effectuer cette nouvelle interview avec vous !
Votre premier album, « En boite », vient se sortir il y a quelques semaines. A titre personnel, on imagine sans doute la joie que cela doit être pour vous de voir ce projet aboutir et se concrétiser physiquement ?
Oui, c’est vrai, c’est un mélange de joie et de soulagement aussi, quelque part. Parce que cet album est la raison pour laquelle j’ai arrêté l’enseignement. En 2020, j’avais commencé à sortir les premiers singles et le projet de l’album a commencé à prendre forme l’année d’après, à la vue du nombre de titres enregistrés. J’ai eu l’envie d’aller jusqu’au bout, pour partager toutes mes chansons. Mais je me suis vite retrouvée dans une impasse où je n’arrivais plus à enregistrer les chansons, travailler les arrangements, en découvrir de nouvelles, réviser pour l’émission, faire les tournées, être mère, être conjointe et être enseignante, un métier qui prend énormément de temps quand on le fait avec passion. En 2022, j’ai réalisé que je n’avais sorti aucun titre…J’arrivais dans une période de ma vie où je n’arrivais justement plus à tout faire et, au final, le domaine qui trinquait le plus était le projet d’album, qui n’avançait plus. Parallèlement, j’ai eu la sensation de ne plus être à ma place à l’école, non pas que je n’aimais plus mon métier – au contraire – mais j’avais l’impression que je laissais passer devant moi une partie de ma vie que j’allais regretter. Donc j’ai pris cette décision d’arrêter l’enseignement pour l’artistique que j’allais délaisser. Prendre cette décision a été très dur pour moi, il y a un enjeu financier conséquent derrière et j’avais la peur de ne pas réussir à aller au bout de ce projet…
Faire un album était une montagne pour moi. Il y avait toute la partie artistique que je sentais être mon domaine mais il y a toute une partie administrative/légale que l’on n’imagine même pas, qui me faisait peur. J’ai commencé à m’y lancer, après la fin du tournage des Masters : en novembre, j’ai commencé à réfléchir à la structure que prendrait cet album, à la manière dont je l’envisageais visuellement et à me renseigner sur les démarches administratives à effectuer. Là, je suis tombée de très haut parce que c’était bien plus complexe que ce que j’avais pu imaginer. En janvier, les démarches se sont concrétisées, j’ai fait appel à la société de pressage et à un infographiste, j’ai fait les démarches auprès de la SACEM, de la SDRM, des plateformes de diffusion, …j’ai découvert un jargon que j’ignorais totalement. C’était drôle, je quittais l’école et ses sigles nombreux pour découvrir ceux du milieu musicalJ. Cela m’a pris beaucoup de temps car les démarches ne sont pas toutes les mêmes…Les démarches administratives sont complexes, c’est juste hallucinant et j’ai bien compris qu’être producteur est un métier à part entière. S’autoproduire, c’est donc vraiment avoir plusieurs casquettes, c’est chanter, c’est travailler sur les arrangements et c’est aussi avoir toute une gestion administrative complexe. Ce sont plusieurs métiers à la fois, ça prend du temps et moi qui déteste l’administratif, j’ai été servieJ. C’est donc pour cela que je parle d’apaisement car, tant que l’on n’a pas l’album dans les mains, on a peur qu’une mauvaise nouvelle administrative nous tombe dessus, on a peur que le colis soit perdu,…J’ai dû faire face d’ailleurs à plusieurs aléas, qui reculaient d’autant la sortie de l’album et quand elle est arrivée, j’ai soufflé…C’est aussi une fierté, à l’issue de toute cette bataille et j’ai beaucoup de reconnaissance envers les personnes qui ont travaillé avec moi et pour moi, de la photographe à l’infographiste, des choristes aux amis qui m’ont conseillée sur chacune des chansons, …Tous ces gens qui ont pris du temps pour m’aider et pour m’accompagner ont fait que cet album ressemble aujourd’hui à ce que j’espérais. Je suis fière de cet album, je trouve que c’est un produit fini, sur lequel on a pris du temps pour qu’il soit comme je le souhaitais, il représente pleinement ma personnalité artistique, je me retrouve vraiment dans cet album et je suis fière de l’exposer. La fierté n’est pas toujours mon point fort, je ne suis pas toujours fière de ce que je montre de moi, mais là, j’ai la tête haute quand je partage et montre aux gens cet album.
Aujourd’hui, où est-il possible de retrouver cet album ?
Au début, j’avais surtout laissé une place à l’album physique pour le privilégier, je l’ai volontairement mis sur les plateformes musicales seulement quelques semaines plus tard. Je voulais laisser une chance de vie à cet album physique car je trouve qu’il y a quelque chose en plus quand on peut le toucher et le feuilleter. J’ai vraiment ce souvenir-là, gamine, de passer des heures sur les livrets, à regarder les photos des artistes que j’admirais. J’ai mis vraiment un accent hyper important sur le mien, il y a un énorme travail de photographie avec tout un projet autour des quatre éléments qui réunissent l’univers de mes chansons. Chaque photo représente une émotion qui se trouve dans la chanson…
Cet album est vendu en mains propres sur mes différents lieux de concert, il sera en vente aussi à l’issue de chacune des dates que je ferai lors des tournées. Pour ceux qui se trouvent plus loin, j’ai créé mon site internet de vente de mon album et je fais aussi secrétaire, en envoyant par voie postale le colis. Il est d’ailleurs possible de me demander de dédicacer l’album envoyé car c’est important, pour moi, d’être reconnaissante et de prendre ce temps pour les personnes qui me soutiennent.
Je continue aussi à démarcher les lieux culturels pour voir s’il y a possibilité de faire une collaboration, afin de vendre cet album.
@ Aurelia Cordiez
Pour en revenir à l’album en lui-même, quels thèmes principaux peut-on y retrouver ?
Si on se fit déjà au titre de mon album, « En boîte », il y a un jeu de mot puisque je suis dans une boite et qu’on me voit en train d’en pousser les parois, comme si je voulais en sortir par la voix, qui a envie de résonner jusqu’à la scène. On peut aussi voir cette boite comme des stéréotypes que j’aurais envie de pousser et de dépasser, en en sortant…L’idée générale de cet album est donc de vouloir aller au-delà des stéréotypes, de casser un peu ce cliché que l’on pourrait mettre sur une femme en général. D’ailleurs, ça fait partie un peu de mon premier single, « Cliché de fille », qui voulait dire que, oui, je ressemble peut-être à un cliché que l’on pourrait avoir d’une femme mais que chaque femme est unique. Chaque femme ne peut donc être que celle qu’elle est. On retrouve cette idée dans beaucoup de mes titres. Une des chansons, « Qui étais-tu ? », parle d’un sujet assez lourd, celui de l’avortement et, pourtant, ce n’est pas une chanson sur laquelle on doit déprimer. Non, c’est un témoignage possible d’une femme unique, qui a pu vivre ça. Il peut y avoir une multitude de ressentis sur cette expérience et, là, c’est un témoignage possible. Cela ne veut pas dire que l’on est dans un cliché ou une boite, où toutes les femmes auraient vécu cela de la même façon. C’est une des manières de vivre cette épreuve, là c’est un questionnement d’une femme qui arrive à un moment de sa vie et qui se demande ce qu’aurait été cette personne. Cela ne veut pas dire qu’elle regrette, pas du tout, mais ça veut dire qu’on se pose la question, à un moment donné de sa vie de : « j’ai vécu cela et qu’est-ce que ça aurait été si j’avais pris une décision ? »
Un autre titre, mon dernier single, « En boîte », inverse les rôles et montre une situation de drague lourde, abusive, oppressante, d’une femme qui insiste auprès d’un homme qui n’est pas intéressé. Alors que, généralement, on a tendance à voir la situation inversée. J’avais donc envie d’une prise de conscience et d’une dénonciation, mais sans me faire porte-parole pour autant, juste pour faire ouvrir les yeux à certaines personnes de la gravité de la situation quand elles deviennent tout de même insistantes alors que l’on a refusé une avance. Mon album n’est pas un combat sociétal, c’est une façon d’ouvrir les yeux sur certains points qui touchent notre société. Je parle aussi d’un amour passion mais autodestructeur, ou encore d’un enfant de parents séparés qui se dit que, à un moment, ils ont bien dû s’aimer.
En fait, c’est vraiment un témoignage de personnes différentes, uniques, qui vivent des choses qui ne sont pas des généralités mais les gens qui écoutent peuvent parfois se sentir concernés par ce genre de témoignages. L’idée est de toucher le cœur des gens, que ce soit par une identification à la chanson ou par la découverte d’un autre point de vue que celui qu’ils avaient.
Comment décrivez-vous le registre musical de votre album ?
La question est hyper intéressante, j’ai eu récemment un très long échange avec un journaliste qui avait pris le temps d’écouter mon album de A à Z. Il m’a fait un retour d’abord sur les thèmes puis sur comment il ressent la musique. Il a écouté cet album avec un de ses amis, un américain venant des Etats-Unis, qui ne comprend donc pas un seul mot à l’album et qui s’est donc focalisé sur la musique. Il a dit que cet album est donc très « musical/music hall » donc c’est musical mais il y a un côté comédie musicale, presque cinématographique de la musique. Lorsque ce journaliste m’a dit cela, j’étais tout à fait d’accord avec lui et ça a révélé la personnalité de l’arrangeur, Nicolas Soulat, avec qui j’ai collaboré.
Ce dernier travaille principalement dans le cinéma donc on retrouve beaucoup de choses assez modernes, parfois osées, dès fois expérimentales qui donnent un aspect audacieux que j’aime beaucoup. Pour le côté musical, j’apprécie quand la chanson est presque entêtante, qu’on se retrouve à la chanter par surprise parce qu’on l’a écoutée juste avant ou la veille. J’adore cela ! Je trouve qu’une chanson marche quand elle reste dans la tête des gens. D’un point de vue personnel, quand j’écoute pour la première fois une chanson, je suis d’abord sensible à une musique avant de comprendre le sens de la chanson. Ce qui me permet d’être une deuxième fois surprise, face à des textes bouleversants une fois qu’on y a mis le sens. Du coup, je fais très attention à cela aussi quand je travaille sur l’arrangement ou quand je découvre une musique qu’on me propose : je peux la refuser si elle a trop de dissonances ou qu’elle ne reste pas en tête. C’est pour cela que, sur l’arrangement de l’album, j’ai insisté sur le fait qu’il y ait un côté presque addictif à la musique. C’est hyper important pour moi !
Vous évoquiez le single « En boite ». Au-delà de la chanson que l’on retrouve dans l’album, un très chouette et très long clip a été réalisé, avec une vraie qualité de réalisation et d’image…
C’est une chanson qui a sa personnalité puisqu’elle est très pop, presque pop-électro. Sur l’album, on retrouve beaucoup de styles musicaux différents, on a de la ballade, du pop-rock, des piano-voix mais aussi cette chanson, « En boite », qui donne envie de bouger. Forcément, il y a tout un jeu de mot là-dessus, encore une fois, sur le fait que ça se passe dans une boite de nuit et sur ces femmes que l’on met en boite, considérant qu’elles sont acquises sans même avoir leur avis à exprimer. D’ailleurs, comme j’inverse les rôles, le refrain dit « je te veux sans savoir si tu vas vouloir ». A travers cette chanson, si on ne voit pas le clip, ça peut mettre un certain temps avant d’en comprendre le sens. On se dit « mince, par rapport aux autres chansons, le niveau de lexique est très bas ». Il y a même un moment où je dis « je n’ai jamais vu un aussi joli cul ». D’ailleurs, ça a été tout un débat avec Dorian car, à la base, il n’y avait pas le mot « cul » dans la chanson : Dorian ayant un verbe très soutenu, ce n’est pas le genre de mot qu’il met dans une chanson. On a rigolé là-dessus et on a fini par y arriverJ, en lien avec le côté ringard des dragues d’aujourd’hui. Si on ne voit pas le clip, on entend ces mots vulgaires et on peut se demander comment je peux chanter des chansons aussi soutenues d’un côté et, d’un coup, arriver sur une chanson si vulgarisée. Dorian m’avait prévenu de cela, me disant que ceux qui ne comprendraient pas la chanson allaient me prendre pour une vraie dévergondée. J’ai donc fait attention, dans le clip, à de suite faire une mise en scène qui contextualisait la chanson, pour faire percevoir son cynisme. Donc ce clip est très long parce que j’ai tenu à avoir une partie sans musique, parlée, qui instaure le contexte.
Le tournage a été très très drôle, c’était génial, on a tourné en journée dans une boite de nuit, c’était donc une sorte de boite de jour et on vraiment fait la fête. C’était super de voir une foule s’ambiancer sur ma chanson ! La lumière et la fumée donnent de jolis images, tout le monde a joué le jeu des tenues, tous ont mis de belles robes de soirée ou des tenues classes. Le responsable du club « L’Ora » à Mouscron nous a accueillis avec une gentillesse incroyable, il a tout fait pour que tout rappelle l’ambiance nocturne, en faisant venir ses serveurs, en mettant des feux de Bengale autour des bouteilles, en faisant sauter les confettis. J’en suis très contente !
Pour la deuxième partie du clip, j’ai souhaité continuer sur le jeu de mots « en boite ». Mon conjoint, Sylvain, a fabriqué une boite blanche, qui rappelle celle dans laquelle je me trouve sur la couverture de mon album. Dedans, j’y ai enfermé le figurant qui, au début du clip, me draguait et avec lequel on inverse les rôles puisque c’est moi qui lui cours après. Je suis alors physiquement complètement différente, je suis l’amoureuse totalement cinglée, je le regarde, je ne le lâche pas, je le harcèle, je lui hurle dans les oreilles, je lui caresse le visage, je m’amuse avec lui comme s’il était mon petit jouet. Lui est dépité, enfermé dans cette boite il a envie de s’enfuir. On s’est beaucoup amusés aussi car c’était très compliqué de rentrer à deux dans cette petite boite qui devait faire 60 centimètres de profondeur. J’ai mis des couleurs très flash pour montrer un côté de petite fille sage mais, en réalité, complètement cinglée. J’ai voulu faire ressortir ce côté presque mignon mais malaisant. En tout cas, ces couleurs vives et naturelles mettent un contraste entre les deux parties du clip.
Je suis heureuse du rendu, le clip a rapidement dépassé les 10 000 vues et j’espère que ça continuera.
@ Aurelia Cordiez
Le 1er avril, vous avez pu interpréter en longueur, pour la première fois sur scène, vos chansons. Sans doute est-ce là un moment marquant duquel vous gardez de chouettes souvenirs ?
Exactement ! C’est une date symbolique pour moi. J’avais déjà chanté sur scène quelques-unes de mes chansons lors de la fête de la musique mais c’était sur bande son. Là, c’était la première fois que je faisais exclusivement mes chansons mais j’avais cette peur incroyable d’ennuyer le public avec uniquement des titres inconnus. Cela a été très symbolique aussi pour moi quand, dès les premières répétitions, j’ai entendu mes chansons jouées par ces fabuleux musiciens qui m’entouraient. Cela fait quelque chose au cœur, physiquement et intérieurement. En particulier sur les chansons à émotion. Je me souviens, j’étais presque à deux doigts de pleurer en commençant à chanter « Je veux que tu sortes ».
Chanter mes chansons avec des musiciens qui partagent mon émotion a été un nouveau coup de foudre pour moi, en répétitions ou en live. Idem, quand j’étais joyeuse sur scène, ils dansaient avec moi. Quand il y avait des ponts musicaux, je n’avais qu’une seule hâte, celle d’aller m’amuser à côté d’eux pour les encourager. Il y avait une communion avec les musiciens, ça a été magique et cela m’a marquée. J’ai été foudroyée car je ne m’y attendais pas. Je pense que c’est lié à la qualité des musiciens avec qui je travaille, ce sont des gens de cœur qui font cela avec passion.
Cette date est aussi très symbolique pour moi car beaucoup de gens ont été au rendez-vous, ce qui m’a énormément touchée. C’est une date qui représentait énormément pour moi, c’était comme un premier cap dans ma vie artistique par rapport à mes propres chansons, c’était mon premier concert rien qu’à moi. Je pense notamment à Merav, qui a été là pour toute la mise en scène, sans que je ne lui demande quoi que ce soit, ce qui m’a émue. Je cite aussi Hervé, venu faire de la figuration sur « En boite ». Je n’oublie pas non plus les choristes de mes premiers clips qui ont tous répondu présents, ni une danseuse du sud-ouest, Sandy, dont j’avais partagé une danse réalisée sur une de mes chansons et qui est venue illustrer « Je veux que tu sortes ». Toutes ces personnes ont répondu présentes, j’étais entourée de magnifiques gens et j’ai été très émue de la réponse positive de chacun, tout comme de la venue du public. La salle était pleine de gens venus me soutenir, cela a été rassurant pour moi. Donc cette première date m’a marquée par ce côté humain, j’en garde un magnifique souvenir !
Quels retours avez-vous déjà pu avoir du public sur votre album et sur ce concert ?
Le premier retour que j’ai est, en général, sur mon énergie sur scène et non pas forcément sur ma voix. Cela me touche énormément parce que j’y suis bien et les gens le voient. Je danse, je suis profondément triste quand je chante une chanson triste et inversement, je fais la fête à fond sur une chanson dansante. Cela fait appel à l’art du théâtre, que je ne connaissais pas et dans lequel je me plais beaucoup. J’aime interpréter, c’est le mot juste, je ne fais pas que chanter, je vis dans la peau des rôles et des personnages. J’ai l’impression d’être plurielle sur scène. Le 1er avril, j’ai été rassurée aussi par le fait que les gens n’aient pas vu le temps passer. C’est génial !
Concernant l’album, c’est un peu, je pense, la même chose. Les chansons étant assez différentes et le rythme varié, il y a du relief, tant par le style musical que par les sujets traités. Les gens aiment cela, je crois, aiment passer d’une émotion très forte à une ambiance festive, tout en abordant parfois des sujets très légers. C’est très varié et c’est ce qui me plait !
@ Frédéric Baussart
Sans doute que cette première expérience sur scène en appelle d’autres ?
Bien sûr ! Je souhaite renouvelle l’expérience et j’en profite pour lancer un appelJ. J’aimerais beaucoup le faire dans le nord, ce serait une grande fierté de pouvoir jouer à domicile et présenter mes chansons dans mon coin. Mais aussi partout en France ! C’est mon but ultime…
Quelle joie de vous retrouver pour cette nouvelle interview !
Vous avez participé il y a peu à l’édition 2022 des Masters de « N’Oubliez Pas Les Paroles » sur France 2. Après deux éditions précédentes pas évidentes pour vous, dans quel état d’esprit avez-vous abordé ces nouveaux tournages ?
Je pense qu’il y a eu déjà un changement dans ma façon de préparer ces Masters 2022. Les conditions de préparation ont été différentes grâce aux deux années précédentes, qui n’ont pas été très concluantes pour moi. Je me suis servie finalement de ces échecs – parfois des échecs qui dépendaient de moi, parfois des échecs qui étaient indépendants de ma volonté – pour en tirer des leçons et pour me préparer différemment. Donc ma préparation a touché à différents domaines. Psychologiquement, j’ai essayé de mettre beaucoup moins d’affect dans ma venue sur le plateau. En tout cas, pour les deux années précédentes, chaque échec que je vivais – alors que, sur le papier, ce n’est qu’un jeu – était considéré comme presque un échec personnel. Cela me touchait, m’affectait et avait des conséquences sur ma confiance en moi.
Cette année, j’ai vraiment pris du recul, j’ai bien intégré l’idée que beaucoup de choses dépendaient de moi mais que certaines ne dépendaient pas de moi, notamment les chansons qui tombaient. Cette année par exemple, on a vu des chansons qui n’étaient jamais tombées dans l’émission donc, techniquement, on peut apprendre autant de chansons que l’on veut mais si elles ne sont jamais tombées, cela réduit clairement les chances de pouvoir s’en sortir. A ce niveau de la compétition, un faux pas peut être fatal donc, forcément, c’est plus compliqué de se démarquer favorablement en tombant sur de nouveaux titres. Donc, d’un point de vue affectif, j’ai pris ce recul de me dire « fais ce que tu peux, pour ne pas regretter mais ne t’en veux pas après parce que tu auras justement tout donné pour y arriver et que, au moins, tu sortiras la tête haute de cela ». Cette démarche aide sur le mental et le conditionnement psychologique quand on se retrouve sur le plateau, cela donne une part de confiance en soi, en se disant que son boulot est fait.
La deuxième chose, ce sont les révisions en elles-mêmes que j’ai complètement changées. Cela a évolué depuis le début de mon parcours de manière assez aléatoire, ensuite on est tombés avec de grands maestros qui sont arrivés dans le classement et qui ont commencé à faire des tableaux de chansons qui tombaient dans telle ou telle catégorie. J’étais dépassée par toutes ces statistiques mais je me suis bien rendue compte que ça portait ses fruits donc j’ai commencé aussi, non pas à me faire des tableaux mais des playlists de même chansons, de chansons qui me sont mal-aimées et des potentielles mêmes chansons. Comme j’ai vu que les chansons devenaient de plus en plus dures de Masters en Masters, j’ai évidemment mis le paquet sur les mêmes chansons, c’était incontournable mais j’ai aussi bien travaillées les mal-aimées, les chansons rares. Donc j’ai fait une liste de chansons que je ne connaissais pas et qui sont peut-être tombées une seule fois dans l’année, que j’ai bien travaillées parce que, avec les souvenirs des années précédentes, je ne voulais pas me faire avoir une troisième fois. Avant, j’abandonnais ce type de chansons, pensant que j’aurais peu de chances de l’avoir et, là, j’ai complètement inversé ma logique de travail, en les révisant.
Comment avez-vous appréhendé, en conséquence, le premier tournage ?
Sur le plateau, je suis arrivée quelques heures avant de tourner, nous étions les premières avec Caroline à enregistrer pour les Masters. Mais on était presque à la fin de la journée de tournage puisque, juste avant, avaient eu lieu ceux des préliminaires. C’était déjà chouette de pouvoir rencontrer ces maestros de l’année et, de mon côté, j’ai reçu une nouvelle qui m’a pas mal bouleversée juste avant de monter sur le plateau. Donc j’étais assez désemparée, ce qui m’a vraiment déstabilisée. Je n’étais pas dans un mood positif. Parallèlement, Caroline était aussi très très stressée parce que c’est quelqu’un de très exigeante avec elle-même, alors qu’elle est très douée. Donc on avait deux candidates hyper stressées, vraiment. On n’a pas eu la même façon de gérer notre stress, je sais que Caroline l’a intériorisé sur le plateau alors que j’ai eu l’effet complètement inverse. Par le passé, j’avais déjà essayé de l’intérioriser aussi mais ça avait été une catastrophe, cela m’avait bloqué la mémoire. Là, effectivement, je n’étais pas dans les meilleures conditions psychologiques mais je ne voulais pas me refaire avoir par mon état. Donc je me suis dit « lâches toi, défoules toi, sors toute cette pression interne que tu as, pour sortir aussi ton potentiel ». Pendant le générique, j’ai commencé à sauter sur place, à secouer mes bras et mon corps pour lâcher toute cette pression que je ressentais. Et ça a continué sur le plateau…
Donc, pendant cette émission contre Caroline, j’étais très dynamique, très sautillante, un peu nerveuse mais de manière joyeuse. C’est comme cela que j’ai vécu cette émission et, en tout cas, ça m’a permis d’aller chercher des paroles dans ma mémoire, de ne pas me braquer. J’ai quand même commis un faux-pas dans la première même chanson et heureusement pour moi – malheureusement pour Caroline -, elle en a commis un aussi qui m’a laissé l’opportunité de gagner le match. Après, j’ai aussi été très très triste parce que je tiens beaucoup à Caroline, c’est quelqu’un que j’affectionne particulièrement et de la voir se tromper sur une chanson d’Aznavour qu’elle aime, j’ai eu mal au cœur car je savais qu’elle allait beaucoup s’en vouloir, comme j’avais déjà pu m’en vouloir dans les années précédentes.
J’ai eu des émotions assez extrêmes mais qui ont été assumées. Beaucoup de gens n’ont pas forcément compris pourquoi j’étais dans cet état-là, je savais pourquoi et, du coup, j’ai vécu cela comme une victoire personnelle d’avoir été capable de faire face à une pression interne que j’avais, tout en étant dans un tel contexte oppressant par lui-même. En étant dans une telle compétition, d’avoir su mettre mes émotions et ma pression interne de côté, c’était ma victoire à moi. En plus, cela s’est terminé par des finales peu évidentes, avec « Ma bataille » et « Rien n’est parfait » donc c’est une grande victoire aussi pour moi d’être repartie avec 15 000 euros.
Victoire qui vous permettait de poursuivre ainsi l’aventure….
Après, il y a eu une très très longue pause de trois semaines dans les tournages. Là, c’était en plein dans le mois de septembre, presque octobre d’ailleurs. Donc c’était la première fois que je me retrouvais dans ma vie à avoir des créneaux de révision vraiment disponibles parce que, avant, j’étais à l’école sur ces heures-là. J’ai décidé de ne pas sacrifier ma fille, c’est-à-dire que je profitais d’elle quand c’était la fin de l’école. Il était hors de question que je la délaisse pour les révisions mais, quand elle était à l’école, je travaillais, c’était mon école à moi. J’ai été à l’école des paroles pendant un mois, pour préparer ce deuxième match. Je m’étais dit que c’était une chance parce que c’est génial d’avoir presque un mois pour réviser à nouveau, surtout que je n’avais pas révisé plus que trois semaines avant le premier match, soit moins que ce que je voulais. Donc c’était une superbe opportunité…sauf que, quand on rebosse pendant un mois, on a l’impression d’aller repasser un premier tour de Masters, avec l’espoir d’avoir une récompense à son travail. Chose qui n’arrivait pas quand toutes les dates s’enchainaient… Là, c’était la première fois que je me mettais autant de pression pour un second tour. Parce qu’il y avait eu à nouveau une période de révision. Quand il a une période d’investissement personnel assez conséquent, on en espère une petite récompense…
Mon deuxième match a été contre Micka, avec qui j’ai adoré partager le plateau, il est d’une grande douceur et bienveillance. C’est à cette émission que Micka et moi avons été les premiers à découvrir ce nouveau concept de la même chanson, qui nous a tous déroutés, qui est de reprendre une même chanson mais avec la version d’un autre artiste. Je suis tombée sur « La vie ne m’apprend rien », version de Liane Foly. Enfant, j’écoutais avec mes parents la version de Balavoine mais, quand j’étais ado, j’étais attirée par les vois fortes et féminines. Donc la version de Liane Foly m’a énormément plu parce que j’ai pu l’interpréter en tant qu’ado, moi qui aimais bien chanter.
J’étais de la génération boys bands donc les « 2 to 3 », les « Spice Girls », les « Worlds Apart » et « Alliage » tapissaient les murs de ma chambre en poster. J’avais donc appris « Le temps qui court » des Alliage, quand j’étais gamine. Sauf qu’elle n’est absolument par construite de la même façon que celle de monsieur Chamfort. Donc, quand je suis entrée à « N’Oubliez Pas Les Paroles », j’ai dû tout déconstruire de ce que j’avais en tête et presque me censurer les versions de reprise pour rester uniquement sur la version d’origine. Je suis fan de Céline Dion, bien sûr que je n’ai pas écouté en boucle la version de Fabienne Thibeault de « Ziggy » et il y a en fait plein de nuances. Donc, arrivée à NOPLP, j’ai dû proscrire Céline Dion pour aller écouter l’originale. J’ai plein d’exemples en tête mais je les ai tellement interdits que, quand j’ai vu la chanson apparaitre, je me suis dit « c’est bon, je la connais…mais non, je ne la connais plus du tout, j’ai proscris tout cela, je ne sais pas ». J’ai été me créer des pièges là où il n’y en avait pas donc j’étais complètement déroutée par cette règle. Je suis tombée mais, heureusement, je n’ai pas été la seule à avoir été déroutée, Micka est tombé aussi. Le pauvre a bafouillé sur les deux. Au fur et à mesure, on s’est rendu compte que le mieux était de rester fidèle à l’originale, jusqu’à ce que ça s’arrête.
Je suis très heureuse d’avoir vécu ce deuxième match, même si je suis ressortie avec 0 euro. En fait, j’étais frustrée lors de l’émission contre Caroline de mettre arrêtée par prudence sur « Rien n’est parfait ». Je pensais la connaitre jusqu’au bout mais je m’étais dit que si je me trompais et que je perdais le match retour, je repartirais avec rien. Donc j’avais préféré m’arrêter là, par sagesse. Cela a joué lors du match contre Micka, où je pensais connaitre mieux « Miss Maggie » que j’ai eue en finale. Je voulais aller au moins jusqu’au 10 000 euros, j’ai été trop confiante et suis retombée à 0. Mais c’est sans regret parce que ça m’a permis d’être plus prudente sur les autres chansons lors des autres matchs suivants.
Justement, en parlant de match suivant, vous rencontrez ensuite Violaine…
Puis il y a eu effectivement les quarts de finale contre Violaine, on est très très amies toutes les deux, c’est quelqu’un que je porte dans mon cœur depuis des années. On a vécu beaucoup de choses ensemble et on était très heureuses, secrètement, de pouvoir partager ce plateau ensemble. Je savais que c’étaient mes derniers Masters donc vivre ce moment-là avec elle était un peu comme espérer partager un jour une émission avec Kévin ou Hervé, des maestros de qui je suis vraiment très proche. Même si les gens de l’extérieur se disent « ils vont s’affronter, quel déchirement », nous voyons cela comme un partage de vivre une expérience ensemble les yeux dans les yeux, la main dans la main. Donc on était trop heureuses de savoir que l’on allait se croiser sur le plateau et vivre de beaux moments. Qui plus est, on a vécu des émotions fortes puisque l’on a eu de belles chansons à vivre ensemble. On a eu la chance de chanter notamment « Allez plus haut », une chanson à voix. A chaque fois que je suis avec Violaine sur scène, je me noie dans ces yeux qui sont d’une grande bienveillance. Il y a un grand partage et de vivre cela, j’avais l’impression d’être comme sur scène avec elle, ce n’était pas du tout une concurrence. Bien sûr que l’on voulait toutes les deux gagner mais c’était tellement beau de vivre ces moments-là avec elle…
En plus, on a eu des chansons qui, je sais, sont très importantes pour elle et qui le sont pour moi aussi. Parce qu’on a un vécu commun sur ces chansons. C’était à croire que les étoiles étaient alignées pour nous montrer que nos choix amicaux sont les bons. C’était incroyable comme elles étaient symboliques pour elle comme pour moi. Donc un magnifique souvenir…Je fais une petite parenthèse, quand je suis tombée sur « Nicolas » en finale, j’ai vu que beaucoup de gens m’avaient reproché mon état presque second au moment de la validation des paroles. Mais, justement, c’est une chanson symbolique qui m’a permis de réaliser que les choix que j’ai dû faire cette année, qui ont suivi mes convictions et mes valeurs, étaient les bons, en voyant cette chanson apparaitre. C’est une chanson qui a beaucoup de valeur à mes yeux et aux yeux de beaucoup de mes amis qui ont vécu cette même expérience que moi sur ce plateau. Du coup, c’était important de gagner cette finale pour moi, bien sûr, mais pour tous ces amis qui étaient là aussi quand j’ai eu des moments difficiles à traverser cette année. Donc, quelque part, je me disais que je ne pouvais pas m’arrêter, même aux 10 000, ne serait-ce que pour eux. Pourtant, j’en ai eu envie, j’avais de gros doutes, je n’ai jamais été regardé le texte et quand j’ai réalisé qu’il y avait des phrases qui ne rimaient pas, ça m’a mis des doutes. Peut-être que j’avais toujours entendu cela mais que la philosophie de Renaud ne marchait pas avec moi ? Peut-être que c’était toujours ce que j’avais chanté mais que j’avais mal chanté ? Mais, là, je refusais de m’arrêter si tôt, je refusais l’idée de retomber à 0 donc ça m’a mise dans tous mes états. Parce que je savais que, en plus de me porter, je portais aussi beaucoup d’amis avec cette chanson. Très peu de personnes l’ont compris, même ma famille se demandait en regardant les diffusions pourquoi j’étais dans cet état-là. Mais cela a été un moment vraiment incroyablement fort…
On était en plus la dernière émission de la journée, les musiciens étaient au bout du bout du bout, ils en étaient à leur douzième émission, Nagui aussi, tout le monde n’en pouvait plus et cette émission est incroyablement longue parce que j’ai tellement le doute, parce que face à Micka je retombe à 0 après avoir été trop ambitieuse, parce que cette chanson est tellement symbolique que j’ai l’interdiction de me tromper. Tout cela m’a mise dans un état de doute incroyable, j’avais besoin de répéter dix fois la phrase pour être sûre, j’avais besoin de kinesthésie pour faire fonctionner ma mémoire donc je bougeais, j’extériorisais tout et je sais que très peu de gens l’ont compris. Maintenant, je ne regrette pas de l’avoir fait parce que c’était très fort et pas du tout du fake, c’était pleinement ressenti tel que ça a été diffusé à la télé. J’étais moi, dans un état second…mais moi, quand je vis des moments très intenses comme celui-ci. C’est un beau souvenir pour moi…
S’en suit alors la demi-finale….
Ensuite, on arrive du coup à la demi-finale et, quelle qu’en soit l’issue, l’expérience était nécessairement gagnée et plaisante. Je suis allée vers cette demi-finale en me disant « Elodie, l’année dernière, tu as perdu au premier tour, l’année d’avant aussi, l’année encore d’avant tu as vécu un âge d’or avec la finale contre Kévin, tu te rediriges à nouveau vers un prime. Cela fait cinq ans que le prime des Masters existe et, au total, oui tu auras deux échecs mais tu auras vécu aussi trois primes ». C’est plus qu’une bonne moyenne, je sais que j’ai des amis, dans les maestros, qui rêveraient ne serait-ce que d’en vivre un et j’ai la chance d’en vivre un troisième…Que voulez-vous de plus ? Aller en finale ? Tu as déjà vécu une finale…Gagner les Masters ? Le trophée prend la poussière sur le rebord de la cheminée… Bien sûr, j’aurais été très très fière de gagner ces Masters mais, quelque part, j’ai tout gagné. J’ai plein de proches qui m’ont dit « ah, j’étais dégoutée lorsque tu as perdu » mais non, je n’ai pas perdu, j’ai gagné l’expérience de revivre ce prime, de revivre un moment avec Renaud où on n’est pas du tout comme au premier tour, on est beaucoup plus détendus, on ne fait que s’amuser et vivre des émotions fortes…Je ne demandais rien de plus, j’étais déjà allée au-delà de mes objectifs que je m’étais fixés avant de commencer les tournages. Ils étaient de ne pas me laisser me déstabiliser par mes émotions, de m’assumer, de ne pas me laisser me déstabiliser par l’extérieur. Donc, pour moi, c’était une très belle victoire d’avoir tenu moralement, malgré ce contexte. C’était aussi une très belle victoire finale parce que j’ai eu des finales qui n’étaient pas évidentes, que ce soient « Nicolas », « Le mur du son » ou les deux premières citées précédemment. Sortir avec 45 000 euros était aussi une très belle fierté. Cela voulait dire qu’orienter mes révisions sur des chansons plus rares était un bon choix. Tout cela me prouvait que mes objectifs étaient atteints et que, maintenant, ce qui arrivait n’était que du plaisir à prendre. J’y suis allée vraiment dans cet état-là, Renaud aussi était dans un mood complètement différent de celui de l’année dernière…
Quand on est sur un premier tour, qu’on sort de plusieurs mois de révisions donc de plusieurs mois de sacrifices, quelque part, on espérait tous les deux sortir gagnants non pas du match mais de nos révisions. C’est ce qu’il espérait l’année dernière et on avait tous les deux une pression par rapport à cela. Là, le contexte était tellement différent, Renaud avait battu le gagnant des préliminaires, il avait gagné contre Arsène, l’un des maestros qui fait trembler tous les camarades, lui qui consacre énormément de temps aux révisions et qui a un self control émotionnel incroyable. Après ces victoires-là, comment voulez-vous que Renaud soit stressé ? Donc on a eu deux personnes qui étaient juste heureuses d’être là, de partager ce moment et on a partagé ce bonheur même avant le tournage. Ce n’était plus une concurrence…bien sûr, on se bat pour aller au bout de nous-même mais je sais qu’il aurait été très heureux pour moi si j’avais gagné et j’étais incroyablement heureuse pour lui, qui n’avait jamais passé de huitièmes de finale et qui le mérite amplement.
On a fait les répétitions du prime avec une superbe convivialité et un bonheur incroyable. J’essayais de rester quand même dans ma bulle de concentration pour ne pas donner trop d’énergie en amont. Mais j’étais heureuse, je savais que je n’avais plus rien à perdre. Cette ouverture du prime a été fabuleuse pour moi, j’ai eu l’honneur de pouvoir ouvrir le premier solo, entourée de mes amis qui ont super bien commencé la chanson. Oui, j’étais très fière d’être parmi ces quatre finalistes, d’être au-devant de ce plateau et d’avoir la chance de pouvoir encore chanter. On a ensuite appris que ce ne seraient que des mêmes chansons inédites donc on s’est dit « ouh là là là là là », j’ai donc fait appel à ma playlist des potentielles, c’était le moment ! Effectivement, c’est tombé sur une chanson, « Comme un boomerang », qui y était et que j’avais récitée par cœur, sans erreur, à Kévin deux semaines avant. Sauf que les phrases sont quasiment identiques, avec un pronom ou un déterminant qui changent. Donc, même si on l’a apprise par cœur, c’est typiquement le genre de chanson qu’il faut relire pour au moins avoir la structure globale en tête. Elle faisait donc partie de ma petite liste papier intitulée « à réviser la veille ». Sauf que, la veille, j’ai fait un aller-retour Lille – Paris dans la même journée donc je n’ai pas eu le temps de me pencher sur mes révisions et….patatras, je suis tombée, là où Renaud est allé beaucoup plus loin. Cela nous a mis plusieurs centaines de points d’écart sur le match aller, je me souviens qu’en perdant, j’ai dit « Désolée Kévin, désolée Kévin », en serrant très fort mon micro. Il avait misé sur ça, il avait partagé ce pari avec moi et je n’ai pas été à la hauteur donc je m’en voulais surtout pour lui.
Il y a eu ensuite une plus longue pause que d’habitude, avec la première partie du match Hervé-Manon puis la préparation du prime. On a donc eu plusieurs heures d’attente. Encore une fois, même si des centaines de points auraient dû me faire peur ou me démotiver, cela n’a pas été le cas, je savais que j’allais faire un prime et j’étais tellement heureuse de cela. Dans ma tête, c’était terminé, je savais que j’allais faire ce que je pouvais pour me battre jusqu’au bout mais que deux cents points contre Renaud étaient irrattrapables. Mais, ayant la main sur le match retour, je me suis dit que, peut-être, je pouvais viser une finale, en allant au bout de la même chanson. Je m’accrochais à cela…on a commencé le prime, j’étais très heureuse, bien, je sentais Renaud aussi très heureux, on était dans le partage de nos émotions. Preuve que j’étais détendue, sur les trente points, j’avais deux chansons sur lesquelles j’étais très mitigée, j’ai choisi « Dur dur d’être bébé » de Jordy, je n’avais pas les paroles mais j’ai chanté avec une voix de bébé et, d’ailleurs, je n’étais pas loin de la bonne réponse. On s’est bien amusés en tout cas et ça n’aurait rien changé aux deux cents moins d’écart. Donc j’étais très heureuse malgré mon retard, j’ai très très bien vécu ce prime. Quand c’étaient des chansons dynamiques, Renaud et moi nous retournions vers nos camarades pour chanter avec eux, ce n’étaient que des moments de partage. Puis est arrivée la même chanson, je vais dans le fauteuil, Renaud ne fait pas beaucoup de points avec « Toutes les machines ont un cœur ». Je l’avais écoutée il y a trois ans, je l’avais à peine entendue donc c’était sûr que je ne la connaissais pas. Je connaissais surtout le premier refrain, je me suis dit que j’allais le répéter une deuxième fois et que ça s’arrêterait quand ça s’arrêterait…et, là, j’entends la sonnette et je me dis « ce n’est pas vrai »…Je commence à tourner sur moi en mode « arrêtez tout parce que, là, c’est bon, je n’irai pas plus loin »…et j’entends tous les copains qui commencent à chanter, je me retourne vers eux et je fais la cheffe d’orchestre parce que je ne connaissais pas du tout la chanson. C’était un moment très rigolo et incroyable, vraiment j’ai mis du temps à réaliser que j’avais gagné sur une chanson que je ne connaissais pas. Donc j’ai pu tenter la finale, avec deux chansons qui, pour moi, devaient me permettre d’aller aux 20 000 euros. Pour la beauté de la chanson, je choisis « Mon vieux », en me disant que j’allais un peu plomber l’ambiance…
Mais, au final, c’est un moment de grande émotion….
Là, je suis beaucoup moins hésitante, j’y vais, je tente les 20 000 et, presque comme surprise, j’entends d’un coup les copains qui se mettent à chanter, une fois que j’ai fait ma proposition. Là, j’oublie complètement que je suis sur le plateau, les caméras disparaissent de ma tête, j’oublie presque Nagui à ce moment-là, avec tout le respect que j’ai pour lui. Parce que les voix de mes amis me portent. Forcément, je me retourne vers eux et je me dis que je ne craquerai pas, moi qui avais passé mon temps à pleurer sur les émissions précédentes. Donc je les regarde avec admiration mais, là, mes yeux se dirigent sur la droite et je vois Lucille qui a ses grands yeux bleus qui restent ouverts, pour ne pas cligner ni faire tomber les larmes, avec les lèvres qui tremblent…Pour ne pas pleurer, je regarde du coup à gauche et je vois Héloïse qui sanglote en essayant de chanter. Donc je me mets à pleurer, au point de ne plus savoir chanter. C’était de toute façon tellement beau que je voulais laisser mes amis chanter. J’étais dos aux caméras, je me noyais dans leurs yeux et c’est un moment hors du temps, tant pour la force de ces paroles que la fierté d’avoir quarante personnes qui me regardent tous, avec les larmes aux yeux et qui partagent ce moment avec moi. C’est ma plus grande des fiertés d’avoir eu la chance de vivre ce moment-là, c’était un instant incroyable.
A la fin de la chanson, Nagui me chuchote à l’oreille pour me demander si mon père va bien. C’était le cas, c’étaient simplement mes amis qui me faisaient pleurer. C’est important de dire aux gens qu’on les aime, ce que j’ai pu faire pour mon papa. Cerise sur le gâteau, je prends la décision d’arrêter le jeu quelques secondes et de me dire « là, c’est la dernière fois que tu es sur le plateau, tu es en prime, tu vas gagner 20 000 euros, tu viens de vivre un moment émotif incroyable,… remercie tes proches », parce qu’on est à la fin de l’aventure. J’ai donc pris le temps de remercier mes proches, ma fille, Sylvain, mes amis, ma famille qui, pendant plus de sept ans, ont compris que j’ai dit non à des moments humains importants à mes yeux et aux leurs. J’ai eu la chance de ne perdre aucun ami et de ne m’éloigner d’aucun membre de ma famille. Cela veut dire que je suis entourée de gens qui sont infiniment compréhensifs et qui m’ont toujours soutenue dans cette démarche, même si c’était long et même si je leur manquais. Même s’ils en ont souffert, ils ont accepté cela et ont tout fait pour ne pas me faire culpabiliser. C’était donc vraiment le moment pour moi de leur exprimer ma reconnaissance et je suis très fière de l’avoir fait. Tout n’a pas été diffusé, j’ai dit à ce moment-là aussi que c’était important de le faire pour moi mais également pour les autres maestros. Finalement, c’est quelque chose qui nous rassemble, beaucoup souffrent de ces sacrifices car, indirectement, nous faisons assumer à nos proches les choix que nous faisons en tant que maestros.
Puis, une fois les paroles bloquées, l’émission s’est très bien terminée avec 20 000 euros à la clé. Ensuite, je suis allée faire la fête avec les copains, dans le public. C’était donc une très belle fin. Je suis très heureuse que Renaud ait gagné ces masters, lui qui a tellement investi de temps personnel pour ses révisions. Il a sans doute vécu la même chose que moi et c’est presque logique qu’il ait enfin une récompense à son travail. Je suis vraiment ravie de cette issue, c’est très bien qu’il ait gagné, je n’ai aucune frustration, je suis très heureuse.
De façon plus globale, les Masters ont également ce charme de rendre les outsiders vainqueurs. Vous l’avez montré d’entrée de jeu face à Caroline. Margaux et Kévin notamment ont également chuté. Au final, sur le prime, il y a une grande hétérogénéité parmi les maestros présents, au regard du classement initial…
C’est vrai ! Avoir des outsiders qui percent dans un endroit où on ne les attend pas met du piment dans la compétition et ça donne encore plus envie de s’y accrocher. Effectivement, c’est alors difficile de dire qu’untel est favori. En tout cas, quand on est classé parmi les derniers, on a moins cette pression du classement. Mais je trouve justement que ce prime des Masters est effectivement très révélateur de l’hétérogénéité. Tant vis-à-vis du classement où on avait les extrêmes mais même sur la façon de réviser. On avait le plus assidu de tous, Renaud, qui lui commence à réviser dès le mois de janvier. Il m’a fait rire, en me disant « j’ai beaucoup moins révisé cette année, une heure par jour au lieu de trois ». Il fournit un travail continu et régulier tout au long de l’année, chose que je ne pourrais pas faire, bien que je travaille beaucoup. Et on a Manon qui a révisé deux semaines avant d’aller au premier tournage. Les deux ont pourtant atteint la demi-finale. C’est aussi révélateur de choix stratégiques. Manon a fait des choix parce qu’elle connaissait son niveau de révisions et qu’elle n’a pas pu réviser avant. Elle a très bien joué, elle est allée jusqu’au prime, je trouve cela pas mal…Finalement, n’est-ce pas elle qui est gagnante, en termes de rentabilité des investissements ? On ne sait pas…
Bien que l’on ait eu une finale masculine, il y avait aussi une parité en demi-finales, c’était bien réparti !
Sans dévoiler de grand secret, comment avez-vous vécu la diffusion des images ?
En fait, je n’en parle pas à mes proches avant. On nous impose d’ailleurs de ne pas divulguer les résultats, ce que je trouve normal. Et puis, on a aussi toujours eu cette habitude, avec mes proches, depuis les toutes premières diffusions, de ne pas se le dire pour le plaisir de regarder l’émission finalement. C’est très drôle, je dis toujours que, à la maison, il y a une ambiance de coupe du monde, ils crient aussi forts que lorsque la France marque un but.
Pour le premier match, j’ai une cinquantaine de personnes à la maison, qui n’étaient pas au courant du résultat, qui cherchent toujours dans mes yeux une quelconque émotion ou qui m’interrogent sur le futur voyage à Tahiti, en référence au séjour gagné par le champion des Masters. Il faut faire, pour le match, de la place pour tout le monde, on essaie de créer des espèces de gradins dans le salon, le tout dans une ambiance très cool. Personnellement, je fais très attention à la façon dont je chante, c’est important pour moi de ne pas faire trop de fausses notes. La famille et les amis s’accrochent à mes mains et au canapé, attendant les résultats. Donc, oui, effectivement, quand ils entendent la sonnette, ça crie d’un coup comme ça, à faire sursauter. C’est un moment incroyable, je me dis que j’ai de la chance d’avoir des gens qui ont le cœur qui vibre à ce moment-là pour moi parce qu’ils m’aiment et qu’ils veulent me voir y arriver. C’est une chance inouïe, c’est extrêmement flatteur et touchant de vivre ces moments-là.
La fois suivante, j’étais partie en Belgique donc on a vu l’émission avec des potes sur place, le tout dans une très bonne ambiance. Pour le quart de finale, c’est tombé en même temps qu’un match de l’équipe de France de football. Pour les raisons que l’on connait, je ne voulais pas encourager cette coupe du monde donc, du coup, je disais à mon mari que je ne voulais pas mettre la rencontre de foot après l’émission. Quitte à n’avoir personne autour de moi…Au final, il y a quand même eu une trentaine de personnes. Certaines sont reparties d’ailleurs juste après pour voir le match mais toutes étaient là pour me soutenir, j’étais donc très contente, encore plus dans ce contexte-là.
Quant au prime, je l’ai vécu d’une manière assez particulière, l’ayant vu quatre jours après sa diffusion. Parce que j’étais trois jours en immersion pour l’organisation d’un concert caritatif dans le Pas de Calais. J’étais bien en retard, je l’ai regardé toute seule mais l’émotion était bien là, ça m’a permis de pouvoir pleurer à chaudes larmes sans être jugée, en revivant ce moment-là. Mais c’était un bon moment, j’ai beaucoup apprécié.
Pour boucler la boucle sur l’aventure NOPLP, vous qui êtes trente-deuxième au classement, on peut penser que vous avez vécu vos derniers Masters. Quel regard, du coup, portez-vous sur cette aventure pendant toutes ces années ?
Cette expérience m’aura apporté tellement de choses. Je pense que la première des choses est l’apprentissage du suivi de mes convictions. Il y a dix ans, jamais je n’aurais imaginé que j’allais quitter l’enseignement, que j’allais suivre ce que me dicte mon cœur, que j’allais peut-être dire non à des opportunités entourées de paillettes, dans le but de rester moi-même et fidèle à celle que je suis. Je pense que la peur était plus présente chez moi avant cette émission, j’étais quelqu’un de plus craintive. Aujourd’hui, j’ai moins peur de suivre celle que je suis, et, ça, c’est énorme, cela m’a fait beaucoup grandir. Les expériences que j’en ai eues m’ont vraiment fait prendre du recul, les personnes que j’ai rencontrées m’ont vraiment faite grandir et m’ont rendue plus solide dans mes convictions. Aujourd’hui, j’ai plus de capacités à prendre du recul, changement que j’ai pu ressentir cette année. Je sais que ça m’aidera dans mes choix artistiques.
En lien avec cela, les expériences et les amis rencontrés dans cette aventure sont incroyables et ont bouleversé ma vie. C’est aussi quelque chose de très positif que je ressors. On parlait de la fin de l’émission mais, pour moi, on n’est qu’au début des amitiés. Elles sont d’une grande sincérité et je sais que certaines continueront bien au-delà de cette aventure.
Artistiquement, j’ai vécu des choses incroyables, en commençant par monter sur un plateau, devant un public. J’ai été à côté d’un grand monsieur, j’ai eu des ambiançeurs derrière moi, j’ai chanté avec un orchestre extrêmement talentueux et doué, le tout en live, sur des chansons que l’on connait parfois à peine. Donc cela développe des capacités d’improvisation et d’adaptation. Je n’oublie pas les premières scènes faites avec mes amis, ni le coup de cœur que j’ai eu justement pour la scène. Je peux même parler d’un coup de foudre, plus que sur le plateau ou que l’enregistrement en studio. Même si cela est aussi une nouvelle expérience que j’ai adorée. Ce que j’aime, c’est la scène, ça a été mon plaisir ultime de toute cette expérience. Cette année, j’en ai vécues des encore plus grandes, avec le Zénith de Lille, avec l’Olympia de Paris, avec l’Arena de Reims. Finalement, même une scène où j’avais deux cent personnes face à moi me faisait complètement vibrer. Quelle que soit la taille de la scène, elle me fait battre le cœur.
Je sais que je dois énormément à cette émission, je sais qu’il y a une réciprocité, je sais qu’aujourd’hui, sans maestros, il n’y a pas de Masters et je sais que Nagui nous avait déjà dit qu’il était très heureux de voir des candidats arrivés de manière lambda faire ensuite des millions de téléspectateurs en prime. C’est un pari fou donc c’est une grande fierté aussi de faire partie de ces gens-là qui font marcher la mécanique des Masters.
Je sais que je dois beaucoup à cette émission mais je dois aussi énormément au fait que mon mari ait eu confiance en moi. Je ne serais jamais allée dans cette émission s’il n’avait pas senti ce potentiel et s’il ne m’y avait pas inscrite finalement de force, après deux ans de réticence et s’il ne m’avait pas boostée dans ces révisions. Et je dois le dire, je dois beaucoup aussi à mon travail. Il ne fait pas tout, la chance y est pour quelque chose aussi mais j’ai su actionner au bon moment certaines ficelles que j’avais en main, parce que j’ai travaillé. Donc c’est un tout ! Je le dois donc à l’ensemble de l’expérience, il y a plein d’acteurs dans tout cela.
Je vous parlais des rencontres humaines, je pense que ça ne s’arrêtera pas là, ce sont des gens que j’aime, en qui j’ai confiance et avec qui j’ai envie de vivre des moments humains mais des moments artistiques aussi. Je n’ai pas, pour l’instant, de projet concret mais je sais que l’on fera des choses ensemble parce que l’on aime être ensemble, tout simplement.
Il faut être honnête, financièrement ça a complètement bouleversé ma vie également, j’ai changé de mode de vie, je suis partie d’un appartement pour arriver dans une maison, à l’âge de 30 ans, c’est une chance que tout le monde n’a pas et j’en ai conscience. Cela m’a permis aussi de faire des investissements qui me permettent, aujourd’hui, de stopper l’enseignement sans me mettre en danger financièrement. Beaucoup de gens rêveraient de se lancer dans la passion dont ils ont toujours rêvé mais ne peuvent pas le faire parce qu’il y a une famille à nourrir et un loyer à payer. Je dois moi aussi payer des choses mais j’ai gagné une belle somme d’argent, que je n’ai pas dilapidée et qui me permet de faire ces choix professionnels aujourd’hui. Donc, oui, c’est aussi une chance.
Pour terminer, des dates sur scène sont en préparation, notamment pour le début d’année….
Tout à fait ! On a deux concerts à Marly organisés le 4 février par un membre de NOPLP, où l’on côtoiera d’autres chanteurs ayant participé à d’autres émissions musicales. L’idée est de faire des concerts comme on les a déjà faits les fois précédentes, avec des costumes, avec de la danse, avec des chansons connues, d’autres un peu moins et de vivre des émotions fortes sur une scène avec le public.
Ensuite commencera une tournée à partir du 16 février, pendant dix jours, où on va sillonner une partie du nord de la France. On va aller jusqu’en Belgique. Je ne sais pas encore si je serai sur toutes les dates mais je me suis portée volontaire pour y être au maximum, la scène étant mon plaisir ultime. Pareil, chorégraphies, danse, fête seront au rendez-vous. L’idée n’est pas forcément de faire des grandes salles, on est plus sur des petites salles, en mode familial, en proximité avec le public, dans une ambiance bon enfant. L’objectif étant de toucher toutes les générations d’une famille, pour que tout le monde s’y retrouve. J’ai hâte d’y être car, en plus d’y vivre des expériences artistiques incroyables, j’y vis des moments de complicité et d’amitié très forts. J’y vis aussi des moments de rencontre avec les nouveaux chanteurs qui nous rejoignent. Ce sont de très bons moments que je savoure parce que je sais qu’ils ne dureront pas éternellement.
Quelle joie d’effectuer cette interview avec vous !
Vous avez récemment terminé une exposition de peintures à Paris. Quels principaux souvenirs gardez-vous de ce mois de mis en avant des œuvres ?
Kat Sroussy m’a proposé d’exposer à la Galerie Le Select suite à un tableau de Betty Boop que j’avais présenté il y a un an à la mairie du Vie à Paris pour l'exposition Florilèges de Saisons de Culture. Il faisait référence à l’affaire Weinstein, j’ai donc décidé de décliner d’autres Betty Boop après ce one-shot. J’ai fait des études d’histoire, j’aime bien l’actualité et ce support s’y prête bien. Cette fois-ci, j’ai proposé notamment une toile sur l’avortement suite à l’interdiction qu’il y a eue aux Etats-Unis. J’aime bien y glisser mon regard, avec des petits messages…
J’étais malheureusement peu à Paris pendant l’exposition, c’est passé très vite. J’exposais avec ma maman ChrisSivi qui est peintre et sculptrice, je garde un très bon souvenir d’avoir fait ensemble une exposition mère/fille.
Quels principaux retours ont pu faire les personnes venues voir cette exposition ?
Je ne sais pas si elles sont toutes objectives. En tout cas, j’ai plutôt eu de jolis retours sur mon travail. A la base, j’ai hérité de la peinture par mes deux grands-mères et par ma mère mais ce n’est pas du tout mon métier. Mais on m’a récemment commandé des toiles pour le nouveau laboratoire d’analyses Bio Eure Seine à Evreux donc c’est vrai que la peinture a été assez présente ces derniers mois.
Cette exposition-ci en appelle-t-elle d’autres prochainement ?
J’ai une prochaine exposition prévue en juin, dans l’Ain à Pérouges au cœur d’un petit village médiéval particulièrement charmant. J’exposerai avec ma mère et le photographe François De Marco. J’adore Betty Boop, je m’éclate à l’intégrer dans divers univers mais, en même temps, ce n’est pas moi qui en suis à l’origine. J’aime la création, j’ai mon propre style donc je me dis qu’il y aura sans doute des Betty Boop mais aussi d’autres thèmes. J’aime les portraits, j’aime les gens en général, j’aime l’humain, j’aime représenter les personnes.
Vous êtes une artiste aux cordes multiples et variés. Un projet de court-métrage devrait voir le jour cette année…
J’ai 10 000 projets en même temps, j’ai la tête pleineJ. Ce court-métrage qui sera réalisé par Thomas Grascoeur se déroule pendant le confinement, c’est basé sur les enjeux de la rencontre : souvent, on s’adapte à l’autre, on se suradapte même, on veut plaire et donc ça part de l’idée de base que, sur les sites de rencontres, on veut tellement séduire qu’on ment un peu et on s’oublie soi-même. En pleine période de Covid, quand on est enfermés, on peut mentir un petit peu mais, au bout d’un moment, le naturel revient au galop…C’est une comédie qui s’annonce très chouette. J’y suis scénariste et comédienne, j’avais écrit une première version il y a très longtemps et je l’ai adaptée suite à la pandémie.
Aurons-nous, en complément, l’occasion de vous revoir prochainement sur scène ?
Oui ! Je prépare un nouveau tour de chant avec Martin Pauvert, qui joue actuellement dans « Les Franglaises », c’est un super musicien multi instrumentiste, il est génial. Je n’ai pas chanté mes chansons depuis 2017, j’étais en pleine écriture de pièces de théâtre, je suis donc contente de retrouver mes premières amours.
Je serai sur scène le 18 mars dans la région lyonnaise. J’aime le texte, j’aime les mots, ce seront des chansons françaises intimistes, où je me livrerai peut-être un peu plus qu’avant. J’ai 40 ans, l’âge de la maturité, c’est un peu une renaissance pour moiJ.
Considérez-vous tous ces domaines comme des métiers différents ou comme un seul et même ensemble ?
Je pense que tout est complémentaire. J’aime dire des choses, j’aime l’écriture et je crois que j’apprécie exprimer des sentiments à travers différents vecteurs. Justement, pour moi, ce sont des techniques différentes mais tout est complémentaire en fait. Le théâtre va apporter à la chanteuse, qui va apporter à la comédienne. J’ai fait pas mal d’assistanat de mise en scène, j’ai eu la chance de travailler aux côtés notamment de Robert Hossein, de Richard Berry, de Niels Arestrup…C’est vrai que j’ai appris aussi beaucoup sur le terrain et j’aime également être de l’autre côté. C’est, là encore, un travail différent mais l’amour de l’art prime. J’aime donner un sens à tout ce que je fais, à travers des supports variés.
Vous allez même parfois encore plus loin, en faisant le lien avec l’œnologie, dans un autre projet qui vous tient à cœur…
Je suis petite fille de vigneron, dans le Beaujolais, j’ai baigné dans les vignes quand j’étais petite, j’ai fait les vendanges pendant des années donc c’est vrai que j’ai toujours été imprégnée par l’univers du vin. Je me suis formée à la dégustation géo-sensorielle et intuitive qui fait appel aux émotions. C’est ce qui m’intéressait, j’avais envie de travailler sur les émotions et d’apporter ma petite touche créative autour de ces dégustations. C’est une aventure œnologique culturelle et multi sensorielle. On y retrouve l’Histoire du vin, l’œnologie, des textes, des musiques, on fait appel aux neurosciences et l’idée est de partager un bon moment avec les gens.
Quelle joie d’effectuer cette interview avec vous !
Vous êtes actuellement sur scène, au théâtre Le Funambule Montmartre, dans la pièce « Folie Baroque ». A titre personnel, on imagine sans doute le plaisir et la joie que cela doit être pour vous ?
C’est un spectacle qui a vu le jour en 2020, nous avions joué 4 dates avant le confinement. Entre temps, l’équipe a pas mal changé, finalement la seule résistante, c’est bien moiJ. J’ai proposé à Alexis de nous rejoindre, c’est un ami comédien et metteur en scène. L’équipe est donc entièrement nouvelle, c’est un peu comme une nouvelle pièce.
Avec vos mots, comment présenteriez-vous ce spectacle ?
Je dirais que c’est une comédie classique musicale, pour ne pas l’associer à de la comédie musicale. On n’est pas du tout là-dessus, on ne vient pas défendre nos répliques en chantant, on est bien sur une pièce de théâtre qui raconte l’histoire de l’arrivée de castrats napolitains en France au XVIIIe siècle. La musique était alors assez présente, dans notre pays, dans les salons, dans les grandes familles aristocrates mais on n’avait encore jamais vu de chanteurs castrés en France.
A titre personnel, je joue le rôle de Claudine, une femme très libre, qui revient de Venise chez elle et qui offre un castrat à son amant ou mari – on ne sait pas exactement quel est leur lien. C’est l’élément déclencheur de la pièce…
Au moment de vous approprier ce personnage, vous étiez-vous plongée dans certains éléments de contexte de l’époque, pour mieux en appréhender l’atmosphère ?
Je ne suis évidemment pas habituée à jouer un personnage du XVIIIe donc, pour le rôle, j’ai regardé beaucoup de films d’époque. Notamment « Madame de Joncquières », avec Cécile de France, qui se tient extrêmement droite. La position des mains, à l’époque, est extrêmement importante. On ne peut évidemment pas les mettre dans les poches…Je connaissais peu le monde des castrats, j’ai regardé « Farinelli », je me suis renseignée, j’ai lu pas mal d’articles. Sabine, l’auteur, nous a beaucoup documentés aussi, elle nous a vraiment donné toute sa bibliographie de tous les bouquins dont elle s’était inspirée. Je suis allée voir pas mal de spectacles pour savoir quels éléments de mise en scène étaient mis en avant et quels étaient les costumes. Je pense notamment à une pièce au La Bruyère qui m’a vraiment marquée, qui s’appelait « Aime comme Marquise ». La comédienne qui jouait cette femme m’a beaucoup inspirée.
Mais, oui, il est évident que l’on s’est tous plus ou moins inspirés de vieux bouquins du lycée que l’on avait en tête, comme « La princesse de Clèves », ainsi que de films d’époque. Aujourd’hui, c’est vrai que pas mal de supports existent, nous permettant de travailler nos rôles.
Pour certaines facettes de Claudine, y avez-vous mis, de près ou de loin, un peu de vous ou de personnes de votre entourage ?
Je pense que Claudine me ressemble sur pas mal d’aspects. Elle est un peu fofolle, extravagante, elle parle beaucoup, elle peut aussi être joueuse avec son mari. Elle est parfois sur la retenue mais elle n’a pas sa langue dans sa poche, quand elle a besoin de dire quelque chose, elle le dit donc elle est assez honnête. Elle est également une femme enfant.
Donc, oui, j’y ai mis un peu de ma personnalité. De toute manière, tu y mets forcément un peu de toi quand tu construis un rôle. Evidemment, la classe sociale est très éloignée de la mienne, l’époque fait toute la différence mais il n’empêche que, dans sa folie, sa générosité et je dirais sa fougue, on se rejoint pas mal.
Les mots et le phrasé sont-ils d’ailleurs ceux de l’époque ? Ou le vocabulaire est-il plus contemporain ?
Je pense que Sabine a vraiment fait un beau travail, justement, sur la retranscription et le langage soutenu de l’époque. Maintenant, nous, comédiens, sommes très très fidèles à son écriture mais on peut y mettre aussi un peu de contemporain dans notre manière de parler pour, peut-être, rendre nos personnages plus quotidiens. Donc c’est vraiment un parti-pris. On a cette liberté de quand même casser un peu ce langage soutenu mais tout le texte est extrêmement classique. J’avoue que ça fait du bien aussi aux oreilles de ne pas avoir un « ouais, grave ! » en plein milieu d’une réplique.
Vous l’avez dit, vous êtes 4 sur scène mais pas forcément 4 comédiens, il y a un mélange de jeu et de musicalité tout au long de la représentation…
Sachant que ça parle des chanteurs castrats, on n’avait pas du tout envie de proposer juste un comédien qui interprète un castrat mais qui ne puisse pas chanter. Donc notre comédien, je vous rassure, n’est pas castré, il est contreténor donc il a une tessiture vocale évidemment très aigue pour un garçon. Il fallait aussi qu’il ait un amour pour Vivaldi, qu’il connaisse ses chansons et ses mélodies, Sébastien a donc fait, lui aussi, un gros travail de recherches. On ne voulait pas non plus se contenter d’une bande son, on souhaitait avoir un vrai piano sur scène. Malheureusement pour nous, ce n’est pas un clavecin car le piano, à l’époque, n’était pas vraiment existant mais, justement, on se marre là-dessus, on dit que c’est un piano droit et que mon mari est un avant-gardiste. Ces deux rôles, de Sébastien et de Magnhild, contrebalancent donc les deux autres personnages.
Quels principaux retours avez-vous déjà pu avoir du public, à l’issue du spectacle ?
Je pense qu’ils ont apprécié l’ambiance générale qui se dégage de cette pièce, on a eu de très beaux compliments sur le texte, sur l’énergie déployée sur le plateau, sur le décor classique de ce salon parisien, sur la beauté des chants. On a eu pas mal de mots gentils mais c’est un début, on verra par la suite.
A propos de début, sans doute peaufinez-vous encore certains éléments, en fonction de vos ressentis et des retours de la salle ?
On s’est rendu compte qu’il y avait quelques petites choses qui ne passaient pas. Pas le texte, qui est écrit et ancré, en revanche en mise en scène il peut y avoir des déplacements à retravailler. Un accessoire de texte peut aussi être déplacé ou changé de timing. Alors même que l’on est sur scène, on va refaire des répétitions pour que le spectacle se bonifie de semaines en semaines. Donc, oui, je pense qu’il va encore bouger, rien n’est fixé.
En complément, vous qui êtes une artiste aux multiples casquettes, vous développez d’autres projets musicaux…
Oui, c’est d’ailleurs aussi pour cela que « Folie Baroque » m’a beaucoup attirée quand on m’a proposé le rôle, c’est qu’il y avait évidemment un lien entre la musique et la comédie, les deux métiers que je fais et qui me plaisent toujours autant.
J’avais sorti un premier EP – un album de 6 titres – en mars 2022 et je suis sur l’écriture d’un second. C’est du travail, de l’écriture des textes à l’enregistrement, sans oublier les scénarii des clips. Je m’en occupe donc à côté du théâtre et j’aurai une date de concert le 27 janvier au Pamela Club, à Saint-Germain. C’est une date gratuite, où seront présentés 2 à 3 nouveaux titres du prochain EP. J’y ferai aussi quelques reprises et chanterai également l’intégralité du premier album.
Avoir cette pluridisciplinarité-là doit être, à titre personnel, particulièrement plaisant et agréable ?
Oui ! Là où je me sens un peu légitime sur scène dans « Folie Baroque », c’est que, comme je suis musicienne, j’ai une certaine oreille et donc je comprends leur langage, ce qu’un autre comédien peut-être ne comprendrait pas. Donc, quand ils parlent de tierces, de changements de tonalité ou de rythme, je les comprends. C’est mon petit plus en tant que comédienneJ. Parfois même, je traduis à Alexis ce qu’ils veulent dire. C’est vrai que c’est hyper sympa : j’ai, sur scène, le plaisir d’écouter de la belle musique et le plaisir pour moi de jouer la comédie.