Seconde Chance : Interview croisée des comédiens, de l'auteur et du metteur en scène de la pièce !
Bonjour Carole-Anne, Candice, Franck et Pascal,
Merci d'avoir accepté de répondre à quelques questions pour notre blog.
1/ Vous êtes respectivement les trois comédiens et le metteur en scène de la pièce « Seconde Chance », qui sera jouée au théâtre du Funambule Montmartre à partir deu 5 juillet prochain. Ajoutons, Franck, que vous en êtes aussi l'auteur.
Tout d'abord, comment présenter ce spectacle ? Quelle histoire y sera racontée ?
Candice : C'est l'histoire de Candice, une enfant star, que j'interprète, même si, je le précise, ce n'est pas mon histoire. Elle a été adulée, elle a eu un énorme succès jusqu'à ses trente ans, plus ou moins. Elle va finalement jouer son dernier concert. C'est toujours un grand moment, dans une carrière, quand on s'arrête. En plus, trente ans, c'est super jeune. Si ça devait m'arriver aujourd'hui… j’ai les larmes aux yeux rien que d'y penser !
Elle va donc faire son dernier concert et Catherine, sa manager, qui a un caractère bien trempé, va l’accompagner, tout en la bousculant pas mal. Fabrice, l'assistant de Catherine, est également présent, il est interprété par l'auteur, Franck.
Franck : Le fond de la pièce est en fait le cadeau empoisonné qu'elle a vécu. Être riche et célèbre à quatorze ans paraît génial mais ce n'est pas forcément le cas. Ce spectacle évoque le retour à des choses essentielles : est-il plus intéressant d'être une star ou de vivre humainement des choses fortes, de faire des choix forts ? La vie n'est pas uniquement faite de strass et de paillettes. Subtilement, c'est un peu ce qui est raconté dans cette pièce.
2/ Comment décririez-vous chacun votre personnage ? Quelles sont leurs principales caractéristiques respectives ?
Carole-Anne : Catherine, la femme que je joue, qui est l'agent artistique et la productrice du fameux dernier concert, est une femme d'affaires. C’est son boulot de gagner de l'argent, de faire en sorte que les choses soient aussi bien carrées. On va apprendre que, derrière cette rigueur et les bousculades qu'elle fait auprès de sa jeune artiste, se cache une faille. A partir de la moitié de la pièce, cette faille se dévoile et on comprend alors mieux pourquoi elle est comme cela. Elle n'est pas que "grande gueule", elle a aussi une histoire qui l'a fragilise, qu'elle n'aime pas montrer. A un moment donné, les rapports de ce dernier concert dans les coulisses vont faire qu'elle va avouer des choses, qu'elle va un peu lâcher prise. Elle va laisser voir ses failles.
Franck : Quand on est autant dans la lumière, car ce sont clairement des gens du très haut niveau de la chanson, une superficialité s'installe. Puisque tout le monde est en haut. Mais, quand on creuse un peu, ils ont tous des états d'âme et une âme tout court.
Pascal : Je crois que, derrière la machine implacable du show-business, des chaînes de télévision font des victimes à tous niveaux, aussi bien les gens qui organisent que ceux qui participent, comme on le voit dans des émissions de télé-réalité. Ces gens-là sont utilisés puis sont jetés. Derrière, il y a des êtres humains qui « morflent ». Je crois que cette pièce parle aussi de cela, elle parle de cette mécanique implacable derrière laquelle se cachent des êtes humains que l'on découvre. On va voir qu'ils ont des histoires, des vies et des sentiments, ce ne sont pas juste des robots qui vont servir à faire travailler la machine à cash.
Candice : Je trouve que c'est très intéressant de comprendre pourquoi on va voir un spectacle, que ce soit une comédie musicale, une pièce de théâtre ou autre chose. Évidemment pour s'évader, pour être surpris, pour rêver mais aussi, consciemment ou non, pour trouver des liens entre le fictif et le réel. On aime pouvoir s'identifier à certains personnages. Dans "Seconde Chance", la sensibilité propre à chacun de personnages touche un très grand nombre. C'est pour cela que c'est un spectacle qui ne s'adresse pas qu'aux adultes, ce n'est pas un spectacle compliqué et l’on peut venir le voir même en étant assez jeune. Cette sensibilité spécifique à chacun des personnages que Franck a essayé de mettre en avant dans son écriture est intéressante. On aura certainement un public divisé en trois, au final, qui s'amourachera plus de Candice, de Catherine ou de Fabrice.
Pascal : C'est un spectacle qui va de 7 à 77 ans, comme une pièce célèbre d'un auteur présent autour de cette table. Voilà, la boucle est bouclée :)
Franck : Fab, que j'interprète, est de la génération de Candice, il fait partie de son public, il était enfant quand elle était enfant star, donc il était, comme 80% des copains du collège, amoureux d'elle. C'est un garçon un peu paumé car, à trente ans, il est assistant stagiaire. Là, il va se retrouver vraiment face à son idole. Il est pur, il sait qu'il l'aime, il va lui dire, il n'a pas peur, alors qu'il est censé ne pas trop lui adresser la parole. Il est censé être à ses petits soins et surtout pas être intime avec elle. Mais il est tellement pur qu'il casse cela de suite. Ce qui l'amène, elle, à des valeurs plus humaines car, pour une fois, il y a un garçon qui est vraiment sincère avec elle. Même s'il est amoureux, au moins il est sincère.
Candice : Candice est une enfant star. Avec le mot « star », on comprend que c'est forcément quelqu'un qui a été trimbalée de droite à gauche. Dans la pièce, elle a été baladée de plateaux télé en plateaux télé, aux quatre coins du monde, elle n'a finalement pas eu beaucoup de temps pour une vie privée. C'est vrai que, dans nos métiers artistiques, c'est compliqué d'avoir une vraie vie très assise. Il y en a qui y arrivent très bien mais, pour d'autres, c'est plus compliqué. Je pense que c'est intéressant, justement, de révéler ce côté-là de l'artiste au public. Parce que les gens s'en doutent mais ne savent pas toujours. Au final, on a beaucoup de monde en face de soi, on connaît beaucoup de monde mais on est dès fois très seul. Rentrer chez soi le soir après des voyages ou des tournées sans pouvoir retrouver quelqu’un qui vous attend n’est pas toujours simple. Je pense que cela est bien mis en avant dans la pièce. Du coup, Fabrice va savoir toucher cette sensibilité de par son amour à Candice et de par la passion du métier qu'elle exerce, qu'elle a.
3/ Si l'on revient à l'origine, Franck, de cette nouvelle aventure, quelles ont été vos principales motivations et vos principales sources d'inspiration pour l'écriture du spectacle ?
Franck : C'était d'entendre Candice chanter. On est copains depuis le collège et on a continué à se suivre virtuellement, via Facebook notamment où on s'auto-likait. Il y a un an et demi, je lui ai demandé si elle voulait venir chanter pour un événement que j'organisais. Elle est venue et j'ai pu la voir en live. J'adore la musique mais je ne vais pas trop en concert et, là, j'avais un concert presque en privé parce qu'elle venait pour moi. J'ai beaucoup aimé son interprétation et, très vite, dans ma tête, m'est venue l'idée de lui écrire quelque chose.
Je ne savais pas quoi au départ mais je voulais évidemment mêler le chant. Candice m'a alors dit qu'elle savait jouer au théâtre, ce qui m'a incité à mélanger les deux. J'avais même pensé, à la base, écrire quelque chose uniquement pour elle et moi. C'est après, avec l'inspiration, que je me suis rendu compte qu'il fallait un clown noir. Ce qui est le cas avec la dureté du personnage de Catherine. Évidemment que l'on va s'attacher à elle parce que, humainement, elle a aussi des valeurs que l'on découvre plus tard, au fil de la pièce et son caractère est tellement en contraste avec le personnage de Fab. On lui dit de sauter, il saute. Pour Catherine, ça dépend de combien c'est payé :). Cela est donc venu avec l'inspiration mais la volonté première était de mêler l'humour, la sincérité avec la musique, ce qui est le talent de Candice.
Candice : Je me permets de faire une parenthèse là-dessus. Un beau matin, je reçois un texto de Franck qui me dit, « Salut Candice, je t'ai écrit une pièce, je vais t'envoyer l'extrait, tu me diras ce que tu en penses ». C'est quand même ultra flatteur ! Vous imaginez ?! Avec Franck, c'est vrai, on se suit, on fait partie des rares de nos écoles qui avons continué dans le milieu artistique. C'était super touchant. J’ai lu, j'ai tout de suite aimé. Cela m'a fait rire, j'ai trouvé ça super. Je me suis dit que ça serait une super opportunité. Cela fait environ dix ans que je fais principalement de la comédie musicale, de ce fait j'ai un peu délaissé le côté comédie au sens stricte du terme. J'ai beau m’être formée pour il y a 10 ans, sans pratique régulière de l’exercice, cela s'estompe un petit peu. Grâce au travail que l'on fait avec Pascal, qui est un formidable metteur en scène avec lequel je suis très heureuse de travailler, j'apprends beaucoup. Quand, justement, on met un peu de côté la comédie, on a un peu peur de ce qui va se passer mais Pascal est super dans le travail, il valorise vraiment ses artistes. C'est très agréable. Cela me fait très plaisir de commencer une nouvelle aventure avec un côté comédie plus important que la musique.

Franck : Au départ, quand je leur ai envoyé le texte, nous n'avions aucune perspective de pouvoir jouer. Je leur ai dit que je n'avais pas d'argent mais je leur ai demandé s'ils voulaient quand même venir dans le bateau. Tous ont dit oui.
4/ La mise en scène, Pascal, doit sans doute, forte de tous ces sujets, être riche à développer. Que cherchez-vous à mettre en avant avec les artistes ?
Pascal : Je souhaite mettre en avant les failles de ces personnages pour qu'ils nous touchent. J'ai envie que l'on soit touché par ces gens-là. Ce n'est pas juste une performance, on a certes une chanteuse qui est admirable et qui va, de toute façon, cueillir tout le monde dès le départ, mais je veux que, derrière, on soit à la hauteur de ce qui va se passer dès le début. Je ne veux pas que l'on dise que c'est un super spectacle de chant, je voudrais plutôt que l'on dise : « c'est super comment on chante dans cette pièce ».
De toute façon, cette pièce m'a intéressée dès que je l'ai lue. Je suis très content de faire partie de ce projet avec eux.
Franck : Pour faire une flatterie mais sincère, c'est la première fois de ma vie que je m’abandonne avec quelqu'un qui met en scène un de mes textes. Je lâche prise, je n'ai pas besoin d'intervenir, Pascal emploie les bons mots pour dire les choses.
Pascal : On a tous les quatre, je pense, une sensibilité un peu commune, on est en phase. C'est ce qui me plaît beaucoup. On n'est pas forcément toujours d'accord sur tout mais ce n'est pas grave, on se laisse aussi la possibilité de changer des choses. C'est une création collective. On a un terreau commun, on va dans la même direction sur ce que l'on a envie de faire. A partir de là, ça va vite. Le bateau a le bon cap.
5/ A quelques semaines de la première, dans quel état d'esprit êtes-vous ? Plutôt impatients ou un peu stressés quand même ?
Franck : Les deux !
Candice : Oui, tout en même temps pour le coup.
Franck : Parce que c'est la magie des premières. Plein de choses nous échappent. Quand on joue depuis longtemps, on contrôle tout, on sait tout. Comme c'est une pièce qui n'est pas que drôle, on ne sait pas où le public va rire ni quand il va être ému. Il y a des passages où on le sait, mais ce n'est pas précis. Cela fait partie des anxiétés parce qu'on craint la réaction.
Aussi l'envie d'y aller. On est pressé, on s'est mis nous même dans un état d'urgence car, en fonction de nos emplois du temps, on a peu de répétitions, ça va venir vite.
Candice : Cela fait un moment que je n'ai pas joué à Paris, je suis très souvent en tournée ou à l'étranger. Là, les amis et la famille vont venir, je me mets un peu la pression. On sait que l'on est attendu au tournant. Je vois toujours cela un peu comme ça. Franchement, je suis trop contente, j'ai trop hâte et c'est génial d'être en fixe dans un endroit. J'ai un peu peur mais j'ai hâte.
Carole-Anne : C'est pareil pour moi. D'autant plus que ça fait, pour raisons personnelles, trois ans que je ne suis pas remontée sur les planches. J'ai joué à la caméra entre temps mais, là, je remonte sur scène. Je suis très contente que Franck m'ait proposé car j'avais refusé plusieurs projets.
Candice : Je suis, moi aussi, contente qu'elle ait accepté.
Carole-Anne : J'avais dit que je ne remonterai sur les planches que pour une rencontre avec des mots et un rôle. C'est pour cela que je n'avais pas fait les autres projets. Je ne suis pas maso à aller m'ennuyer tous les soirs sur scène pendant deux ou trois mois. En ayant vu les autres pièces de Franck, je me suis souvent dit que j'adorerais en être, que j'adorerais m'amuser comme cela. Quand il m'a appelé il y a deux mois pour me proposer de le rejoindre, j'ai facilement accepté. C'est parti, le train avance vite et j'ai hâte. Bizarrement, j'ai le trac en répétition mais je n'ai pas le trac de ce qui va se passer quand on va commencer à jouer. Je ne suis pas certaine de ce qui va arriver mais je sais que, nous, ça va aller. Maintenant, on ne sait jamais ce que sera l'accueil du public.
Franck : Notre appréhension du public vient du côté atypique de ce spectacle. J'ai été voir beaucoup de pièces dans ma vie, je n'en ai jamais vues comme celle-là. Bien sûr, des pièces mélangeant musique et théâtre ont déjà été proposées mais pas faites de la sorte. Même moi, en écrivant, je ne m'en rendais pas compte. Maintenant que ça commence à prendre forme, je me dis que ça n'existait pas avant. D'ailleurs, je ne sais même pas comment on appelle ce spectacle, ce n'est pas une comédie musicale.
Candice : C'est du théâtre musical, c'est une pièce musicale.
Carole-Anne : Nous sommes les précurseurs d'un nouveau courant.
Franck : C'est génial de voir naître de zéro ce projet artistique, on répète dans le salon de la comédienne alors qu'elle ne sait que depuis un mois et demi qu'elle va jouer le rôle. Tout se fait de zéro et on monte les petites marches.
6/ En conclusion, sur quels points aimeriez-vous insister pour définitivement inciter les lecteurs à venir voir ce spectacle ?
Carole-Anne : C'est quelque chose que l'on n'a pas vu.
Franck : Je pense que ça va détendre parce que c'est un spectacle agréable. La profondeur de cette pièce est dite avec beaucoup de subtilité, je le dis et je l'assume. Je pense que, du coup, cette pièce va faire du bien. De part son côté musical mais aussi de part ce que ça dénonce. C'est agréable, ce sont de bons sentiments de la vie.
Candice : Je me suis toujours demandé comment on qualifierait la pièce ? Peut-on la classer dans les comédies ? Comment appellerait-on ce spectacle ?
Franck : Je ne sais pas, c'est un peu ma manière d'écrire, ce sont des cartes postales de la vie. Il y a plein de choses qui se mettent dedans. Il n'y a pas de genre précis, parfois on m'en flatte, parfois on m'en fait le reproche mais c'est moi, tout simplement. On verra bien jusqu’où ça ira.
Candice : On est malheureusement dans une époque où beaucoup de gens ne sortent plus, préférant rester devant leur télé. C'est super, certes, mais c'est bien de sortir aussi. Je sais que beaucoup de gens ne pourront malheureusement pas partir en vacances, faute de temps ou de moyens, et seront donc à Paris cet été. Les places ne vont pas être hors de prix, profitez-en pour être curieux, pour sortir voir de nouveaux spectacles. Allez voir des créations. Franck est jeune, il écrit de belles choses, l'équipe est sympa. En plus, on parlera avec vous après. Soyez curieux, allez voir des nouveautés, pas seulement celles qui sont vendues ou sur-vendues dans les médias. Nous serons dans un sublime petit théâtre, c'est super sympa, je peux même vous trouver des adresses de restaurants pour avant ou après, sans problème. Donc venez, ça vaut vraiment le coup !
Franck : Pour le coup, le public a un rôle majeur dans la pièce, il y a une interaction réelle...
Ce fut un vrai plaisir d'échanger avec vous quatre !