Eléonore Grimbert-Barré évoque son beau parcours artistique ainsi que ses actualités !
Bonjour Eléonore,
Quel plaisir d’effectuer cette interview avec vous !
Vous êtes une artiste aux expériences riches et variées. Si l’on en revient à la genèse de votre parcours, d’où vous vient cette passion pour l’artistique ?
Je viens d’une famille de musiciens, ma mère est professeure de piano, mon père chirurgien-dentiste mais aussi peintre et grand mélomane. J’ai six grands frères, qui sont tous musiciens (violoncelle, alto, violon, piano, composition, production de musiques de films) et je suis la seule fille, en plus la petite dernière. A force de les entendre jouer tout le temps de la musique à la maison, j’ai, il parait, aussi réclamé mon violon quand j’étais toute petite. Donc ma mère m’en a offert un à l’âge de deux ans...Puis, j’ai commencé les cours vers l’âge de 3 ou 4 ans et, en fait, j’avais tout simplement envie de jouer avec mes grands-frères. A la maison, il y avait de la musique tout le temps, partout et, à chaque fois, je dansais dessus. C’est comme cela qu’au même âge, ma mère m’a inscrite à des cours de danse. Par la suite, je suis rentrée au conservatoire, en double cursus !
C’est vrai que, très jeune, je m’y suis consacrée donc je n’avais pas trop le temps d’aller à l’école. Mes parents étaient assez à l’écoute, je leur en suis très reconnaissante de m’avoir laissée faire cette passion, je les remercie aussi de ne pas nous avoir forcé à faire de la musique, c’est venu de nous-mêmes.
A l’âge de 8 ans, j’ai commencé à suivre l’école à la maison. Je viens de la ville de Chartres, les allers retours au conservatoire de Paris ont fini par être fatiguant, la danse demandant un entrainement quotidien. Très vite donc, je suis devenue parisienne…J’étais très contente, je l’avoue, de ne pas avoir été à l’école, même si ce n’est pas si simple que cela. Donc, très vite dans ma vie, j’ai fait le choix de me consacrer à l’art ! Je suis aussi hyper reconnaissante vis-à-vis de mes parents de m’avoir mise très tôt sur scène…Mes grands frères, plus âgés, étaient déjà concertistes et l’un d’entre eux a composé une musique pour moi, un quatuor à cordes. J’en ai eu les larmes aux yeux…Grâce à cela, je suis rentrée dans l’ensemble Grimbert-Barré, on a fait un DVD, des albums, des tournées un peu partout, …C’est donc à l’âge de 10 ans que j’ai fait mes premiers concerts, avec mes grands frères.
Ensuite, un autre de mes grands frères, batteur, pianiste et compositeur, a voulu mélanger batterie et cordes, ce qui ne se fait pas énormément. Je lui suis très reconnaissante, pour que je puisse montrer au public tous mes arts, de m’avoir mise, dans ses œuvres, au piano, au violon et à la danse. En spectacle, je passais de l’un à l’autre, c’est vrai que c’était un gros challenge ! Après avoir dansé, on transpire et, d’un coup, il faut jouer de l’instrument. Ce n’était pas simple mais, à force, j’ai géré de mieux en mieux. En tout cas, c’était un beau partage et c’était émouvant de voir l’émotion du public, de voir les gens touchés par une famille qui joue ensemble. Je pense qu’il y avait déjà beaucoup d’amour dans notre famille et vis-à-vis du public, qui nous transmettait aussi quelque chose de très touchant. Cela a duré jusqu’à mes 16 à 17 ans. On joue d’ailleurs encore de temps en temps… J’espère qu’un jour, on reformera l’équipe. En tout cas, chacun suit son chemin, un de mes frères est devenu producteur de musiques de films, un autre est concertiste en violon solo dans le monde entier,…
De belles rencontres, tout au long de ce parcours, vous ont aussi incitée à aller toujours plus loin dans vos projets…
Avoir fait de la danse et du violon m’a permis de travailler avec deux grands danseurs de l’opéra de Paris, Wilfride Piollet et Jean Guizerix, qui ont créé leur méthode de danse, à laquelle j’ai été formée, de mes 13 ans à maintenant.
Ma mère m’a incitée, de par mon côté polyvalent, à aussi étudier aux Etats-Unis, où l’état d’esprit est un peu plus ouvert. Je suis, ainsi, partie à l’âge de 16 ans, j’y ai beaucoup appris. Je suis revenue en France pour passer le BAC, avant de m’ouvrir encore à plein d’autres choses artistiques, tout en continuant les concerts. J’aime passer, en permanence, de la musique à la danse. J’ai voulu créer un spectacle, « Le choix », qui parle de cela mais aussi du choix de l’amour…J’y travaille le violon et la danse en même temps, ce n’est pas simple du tout mais c’est un challenge qui a plu aux gens et qui m’a incitée à aller encore plus loin dans ce travail. Du coup, avec un partenaire danseur et circassien, on a travaillé énormément pour qu’il me porte pendant que je joue. Je peux vous dire qu’il fallait faire attention, pour moi et pour le violon. J’aime prendre des risques en tout cas…
L’origine en est d’ailleurs assez originale…Ma maman vient de la Guadeloupe, elle a été notre manager un long moment, on a fait énormément de scènes et de tournées grâce à elle. On a même joué pour des scolaires…Ces échanges avec les enfants sont hyper intéressants, ils sont vachement à l’écoute et posent des questions après la démonstration. J’étais la seule fille, du coup beaucoup de garçons criaient pour me voir…et l’un d’eux m’a demandé s’il serait difficile de faire de la danse et du violon en même temps. J’avais compris qu’il parlait d’une question d’organisation, en termes d’emploi du temps, car ces deux arts nécessitent d’y consacrer beaucoup de temps. Mais non, il s’agissait de pratiquer les deux simultanément…Et quand 200 enfants crient en même temps pour que je me lance, c’est dur de dire non. C’est comme cela que, pour la première fois de ma vie, j’ai dansé en jouant du violon en même temps. Cela avait plu et mes grands-frères, qui sont plutôt critiques avec moi, m’ont vraiment encouragée à travailler cet axe. Je devais avoir 13 ou 14 ans et c’est alors que je me suis mise à travailler les deux en même temps…
Proposer ces deux arts en même temps permet aussi de transmettre de beaux messages…
L’année dernière encore, j’étais au Carreau du temple, avec l’orchestre de la garde républicaine et j’ai eu un passage en ce sens. C’était génial ! Je montre, ainsi, que c’est possible…Cela me tient à cœur de mettre cela en avant car c’est hyper enrichissant : il n’y a pas de barrière, quand on veut on peut…
J’avais fait une exposition, à la Fac, sur l’enseignement de la danse. Je parlais de comment les gens ont besoin, parfois, de savoir ce que tu fais exactement, si tu ne fais qu’une chose ou plusieurs. Je parlais de ma propre expérience, en expliquant qu’il y a toujours des gens pour juger, qui ont besoin de catégoriser mais qu’en fait, non, on est capable de faire plusieurs choses, c’est possible. Pas uniquement, d’ailleurs, dans le domaine artistique…Après cet exposé, une fille était d’ailleurs venue me remercier du message. J’aime donner de l’espoir à des gens qui n’ont pas osé…Cela fait plaisir quand, en retour, on sent qu’on a donné envie !
Ces différentes cordes artistiques vous permettent, ainsi, une palette large et variée, qui doit être enrichissante, humainement et professionnellement…
C’est ça ! Je ne me suis jamais ennuyée, je l’avoue, dans ma vie. Mais il y a eu des fois où j’étais un peu tirée par les bras, par des professeurs qui m’incitaient justement à choisir. Je me suis, du coup, parfois tiraillée pour savoir quoi mettre en priorité…Il est, parfois, arrivé que je sois plus dans une période pianiste ou violoniste voire danseuse. D’ailleurs, la danse est similaire à un sportif qui doit s’entretenir tous les jours, je n’ai donc jamais pu la laisser de côté, même un moment : si je ne danse pas pendant une journée, je ne me sens pas bien dans mon corps !
Aujourd’hui, je suis contente de cette polyvalence, elle fait ma force et me permet de trouver du travail tout le temps. C’est, tout simplement, ma joie de vivre que de passer de l’un à l’autre !
En alternant les arts, cela vous permet probablement de revenir avec encore plus de fraicheur sur celui que vous n’avez pas fait pendant un temps…
Bien sûr ! C’est là qu’on voit qu’on ne perd jamais de temps, c’est hyper enrichissant et, dès fois même, ça fait du bien de retrouver certaines choses. Et puis, on continue à travailler inconsciemment dans sa tête…J’aime bien créer aussi donc ça turbine toujours dans mon cerveau ! En vrai, honnêtement, je n’ai jamais l’impression de m’arrêter. Je peux même passer des heures entières à juste penser à ce que j’ai envie de faire…Cela fait partie de l’invention !
Je suis aussi rentrée dans une compagnie de théâtre dansé, du coup je me suis mise également à travailler la comédie…Cela m’aide aussi pour mes autres activités. J’y suis depuis 4 ans…Sur scène, en spectacle, je passe du théâtre à la danse, en faisant un détour par le violon. C’est sur l’histoire du tango, j’aime beaucoup cette pièce, elle est vraiment sympa.
Plus globalement, la scène, au sens large, est un moment particulièrement fort pour vous…L’interaction avec le public permet des instants uniques…
Exactement ! Il y a une force, c’est comme si c’est là où je me sens le mieux parce qu’il faut tout donner, tout simplement, aux spectateurs devant. J’ai vraiment cette sensation d’être portée par le public…Il y a aussi beaucoup de partage. Je me souviens d’avoir accompagné Mademoiselle K, au Zénith de Paris, avec l’ensemble familial. C’était ma première dans un tel lieu, j’ai le souvenir d’entendre des gens crier alors que l’on était tous encore en coulisses. Cela faisait un peu gladiateurs…Quel bonheur, une fois, ensuite, sur scène…J’ai en tête aussi la joie du public de voir son artiste sur scène, le plaisir est donc réciproque !
Régulièrement, vous êtes amenée à voyager à l’étranger, à la rencontre, on l’imagine, d’autres cultures artistiques…
C’est ça ! J’avais toujours eu ce rêve de voyager dans le monde et, en fait, je suis rentrée dans plusieurs boites de production qui m’ont donné cette opportunité. C’est génial parce que l’on aperçoit, effectivement, des cultures différentes et du beau paysage aussi. En même temps, c’est dès fois frustrant parce que l’on ne reste que 2 jours avant de devoir repartir, ce qui ne laisse pas le temps de voir grand-chose. Mais de pouvoir réaliser ce rêve de voyager dans le monde avec mon métier est, je l’avoue, une grande source de satisfaction.
Pour terminer, quels sont vos autres projets en cours ou à venir ?
Je fais aussi de l’orchestre, ce qui me permet de passer par différents styles, du classique à la musique actuelle. Je bouge beaucoup à l’étranger en ce moment, à Istanbul, Dubaï et Marrakech notamment. Chez nous, vous pourrez me retrouver en juin, à Paris, je vous en dirai plus prochainement…D’autres dates avec le spectacle autour du tango seront bientôt proposées à Paris et dans les Yvelines.
Pour la suite, comme mon spectacle « Le choix » a connu un beau succès, à 8 artistes, dont des musiciens qui jouent en live sur scène, j’ai envie d’en faire une suite. Je suis en plein dans l’écriture…
Merci, Eléonore, pour toutes vos réponses !