RTL & RTL2 : Eric Jean-Jean nous en dit un peu plus encore sur sa passion pour la radio !
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Bonjour Eric,
Quel plaisir d’effectuer cette interview avec vous !
Nous pouvons vous retrouver, sur RTL, chaque soir de la semaine mais aussi en fin de matinée le week-end. Sans oublier RTL2, du lundi au vendredi, à partir de 16h. A titre personnel, on imagine sans doute la joie et la passion que cela doit être pour vous, à chaque fois, de retrouver le micro et de vous adresser aux auditeurs ?
Oui ! En fait, le jour où cette passion s’arrêtera et que ça deviendra un vrai boulot, peut-être qu’il faudra que je me pose de vraies questions sur mon avenir. Je ne dis pas qu’il n’y a pas des matins où je n’ai pas la flemme mais, dès que je me retrouve derrière un micro à raconter mes histoires, ce n’est plus pareil ! Je suis en train de vivre la vie que je rêvais de vivre quand j’avais 15 ans donc j’aurais vraiment tort de me priver, de ne pas être heureux de le faire et de me plaindre. Je parle sur le support que j’aime le plus au monde…Jamais de la vie, ça m’embête de faire cela ! En vrai, je souhaite à tout le monde de connaitre pareille situation !
Par contre, si, un jour, je me mets à ne plus aimer les artistes…C’est d’ailleurs arrivé à mon réalisateur adoré, Bernard Meneguzzi, qui est parti à la retraite pile quand il a eu la possibilité de le faire. J’ai travaillé avec lui pendant vingt ans, il a bossé aussi avec Zégut. A un moment, il y a eu un déclic, il en a eu marre des artistes, du showbiz et il est parti. Donc le jour où ça m’arrivera, il faudra que j’arrête…Mais, pour le moment, je ne connais pas ce sentiment, je n’en ai pas marre d’écouter de la musique, ni de raconter des histoires. Au contraire, ça me plait de le faire !
Justement, à l’antenne, il y a une vraie proximité entre vous et les auditeurs, vous partagez vos souvenirs, vos anecdotes et vos histoires…
C’est la vieille école RTL, avec Philippe Labro, qui a toujours dit que ce n’est pas parce que l’on est une radio populaire qu’il faut prendre nos auditeurs pour des débiles. Je considère que mes auditeurs sont intelligents et qu’ils peuvent écouter ce que j’ai à leur raconter…Il ne faut jamais niveler par le bas donc je m’oblige à travailler, à niveler mon travail par le haut, en essayant de dire et d’expliquer les choses, pour que ce soit ludique, rigolo et sympathique. Je pense qu’on peut être populaire sans être populiste et que l’on peut apprendre des choses aux gens sans les prendre pour des imbéciles. Vraiment, j’aime les gens pour qui je travaille, je n’ai aucun cynisme. Je suis un sale gosse parce que j’adore faire des bêtises d’ado et ricaner avec mes copains mais je ne mépriserai jamais mes auditeurs ni mes collègues. Du coup, cela implique pour moi beaucoup plus de travail mais je trouve que c’est chouette et valorisant. Quand quelqu’un me croise et me dit adorer ce que je fais parce que je lui apprends des choses, c’est super ! Pour moi, il n’y a pas de sous-culture…J’ai l’impression de ne faire que répéter ce que Philippe disait, qu’il faut respecter les gens à qui l’on parle et leur amener ce que l’on sait faire.
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Vous êtes sur RTL depuis 26 ans, vous avez pu nouer, ainsi, de nombreux et forts liens artistiques…et on ressent cette volonté de les partager aux auditeurs, en leur ouvrant un peu ces portes…
Il y a quelque chose de très marrant qui m’est arrivé il y a quelques années. Pendant très très longtemps, j’ai fait parler les autres et m’étais effacé parce que je considérais – et que je considère encore – qu’en interview, la personne qui parle est plus importante que moi. Mais je ne me donnais pas de format d’émission où c’est moi qui étais en avant. Pendant le confinement, j’ai commencé, sur Instagram, à faire des histoires de chansons. Souvent, dans les soirées, je racontais déjà d’autres histoires mais que je n’utilisais pas à l’antenne. Quand on a commencé à faire « Bonus Track » avec un directeur des programmes qui s’appelle Gauthier Hourcade, on s’est dit que j’allais arrêter de faire parler les autres et que j’allais, moi, raconter des choses. Je pensais que j’allais ennuyer les auditeurs mais je l’ai quand même fait et il se trouve que les gens ont trouvé cela chouette. Donc je le fais beaucoup maintenant !
Tout ce que je raconte est aussi, en fait, le fruit de dizaines d’années à lire. Si vous veniez chez moi, il y a des tonnes de livres de biographies d’artistes. Pour ce week-end, je me ramène des revues et des bouquins pour la maison, en prévision d’une émission à venir. Je ne cesse de me nourrir et de ressortir ces informations…
Il y a donc eu un moment, dans ma carrière, il y a quelques années, où on a décidé que j’allais raconter des trucs. Avant, je ne le faisais pas, avant je me planquais derrière les artistes et, du coup, bizarrement, j’étais moins connu car j’étais moins mis en avant que quand je fais le conteur. Mais ce n’est pas une histoire d’égo, c’est une histoire de « bon, allez, on y va, tu es assez grand pour être crédible quand tu racontes une histoire ». Il y a, chez moi, un profond et permanent complexe de l’imposteur, contre lequel j’ai passé beaucoup de temps à lutter en travaillant plus que les autres. Cela dure depuis des années…Qui suis-je pour raconter des anecdotes, alors que Philippe Manœuvre existe ? Finalement, je suis quelqu’un d’autre que Philippe, qui est super balaise et qui est notre maitre à tous, mais j’ai le droit de le faire aussi ! J’ai osé le faire…
A l’antenne, au moment où le micro s’ouvre, votre ton est posé et calme, toujours en proximité avec les auditeurs, dans cette volonté de vulgarisation et de transmission au plus grand nombre…
Oui ! Je dis encore beaucoup trop de gros mots, je me fais fâcher par ma famille d’ailleurs. Mais il y a cette volonté d’expliquer aux gens : à chaque fois que j’ouvre le micro, inconsciemment, je me dis que je vais ouvrir mes bras pour raconter une histoire aux auditeurs. Je crois que je l’ai volé à un mec que j’adorais écouter, qui s’appelle Stéphane Paoli. C’était un grand journaliste et, quand j’étais étudiant, il faisait « Europe midi ». C’était le moment où j’allais manger, je l’écoutais, avant « Crime story », « Les inconnus » et Laurence Boccolini. Stéphane avait ce truc d’aller vers les gens, avec une voix si particulière…Je pense que je lui ai piqué cela, tellement j’étais fan de lui. J’ai souvent parlé de lui mais je ne l’ai jamais rencontré…Je me suis approprié, en tout cas, le fait d’animer à sa façon…C’est, je crois, le journaliste à qui j’ai piqué le plus de choses…
Vous savez, j’ai commencé la radio à 15 ans et, à cet âge-là, je ne savais pas trop quoi faire…Je parlais tout le temps. Je faisais aussi le DJ, j’animais les podiums d’été sur les plages, devant 20 000 personnes, pour financer mes études. Je viens de là…Je suis un gars de province, originaire de la campagne, je ne connaissais personne à Paris, je n’étais donc pas destiné, de base, à ce métier. C’est peut-être de là que vient le syndrome de l’imposteur que j’évoquais…Je suis tout allé chercher tout seul, j’ai fait tout ce qui était possible et imaginable…J’ai même fait des animations de Noel dans la rue…Jusqu’au prime de TF1…J’ai fait tout ce qu’il est possible de faire quand on parle dans un micro ! Je n’ai donc pas peur de parler au micro ni de monter sur scène devant un public nombreux. J’ai, notamment, fait trois fois la tour Eiffel – le spectacle de Johnny, un autre sur D8 pour SOS Racisme et un pour France 2 -, devant un million de personnes. Dans ces moments-là, je suis concentré, j’ai la pression mais je n’ai pas peur !
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J’ai ce gêne-là, j’ai toujours su parler mais, quand tu es un animateur qui se construit, tu écoutes des gens : j’ai travaillé dans les mêmes radios que Julien Courbet et, en fait, je me suis aperçu que je n’étais pas fait pour l’humour, j’adore Zégut mais je n’avais déjà pas son style, lui qui fait de l’humour et du burlesque en plus du rock…Je ne trouvais pas encore ma place…Mon truc était, en fait, de parler de musique, en étant assez chaleureux et enveloppant, comme Stéphane Paoli. J’ai donc certainement piqué un peu à tous ces mecs que je viens de citer. C’est comme un arbre qui pousse avec l’aide de tuteurs, à un moment, il n’en a plus besoin, il est grand, il est lui-même et il devient ce qu’il est. Je suis un type, je pense, qui, à chaque fois que j’ouvre le micro, pense « Je vais te raconter une histoire ».
Quand je reçois quelqu’un, c’est là aussi une de mes particularités, par définition, je l’aime. Quand Jean-Marc Morandini fait une interview, c’est plutôt une citation à comparaitre, moi c’est plutôt « Je vais trouver ce que tu as de plus beau ». C’est Jean-Louis Aubert qui m’a donné cette définition, il m’a dit que j’étais comme lui, un paranoïaque à l’envers : par définition, on pense que les gens sont bien et par définition, on ne se méfie pas. Dès fois, on est déçu mais, souvent, on n’est pas déçu ! Je suis toujours comme cela, j’essaie systématiquement de trouver ce qu’il y a de chouette dans la personne en face de moi quand je l’interviewe et de mettre cela en avant. Même quand un album n’est pas terrible, si j’ai décidé d’inviter un mec, ce n’est pas pour le défoncer…Cela me met hyper mal à l’aise !
Ce sont donc mes deux particularités : d’une, si je te reçois, c’est que je prends position de t’aimer et, de deux, si je te parle, c’est que j’ai envie de te raconter une histoire. C’est comme cela que je fonctionne !
Pour terminer, on l’a dit, on peut vous retrouver dans différentes émissions, aux principes variés – les votes du public, le flux musical, les lives, les interviews, les histoires,… - mais avec la musique comme dénominateur commun. Cela vous permet une palette large de thèmes, tout en restant centré sur votre passion…
Le moment charnière de ma vie professionnelle, j’en parlais, a été quand j’ai décidé de me mettre en avant en parlant de musique. Mais, au moment où j’ai décidé cela, j’ai aussi décidé que je ne parlerai plus d’autres choses. Pendant longtemps, je me suis mis dans la mêlée des animateurs, j’ai fait des émissions sur France 3, où je ne parlais pas de musique, mais je ne suis pas un très bon animateur. Je suis, je pense, un bon animateur qui parle de musique, en ce moment je suis bien placé pour cela en France, mais quand on me met dans la mêlée pour présenter un jeu ou une émission de télé, franchement Cyril Féraud ou encore Bruno Guillon sont mille fois meilleurs que moi ! Je ne suis pas vif comme eux, ou comme peut l’être Julien Courbet, eux ont la vanne de suite, alors que, moi, comme le disait Montaigne, j’ai l’esprit d’escalier, c’est-à-dire que j’ai la bonne vanne mais quand je descends les escaliers pour rentrer chez moi. Tout cela a fait que j’ai arrêté de faire de la télé, après en avoir fait pendant très longtemps. Je m’étais alors enfin mis à écrire des bouquins, ce que beaucoup de monde me disait de faire depuis longtemps. J’ai aussi fait un documentaire, j’ai adoré cet exercice.
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Donc je me suis concentré à ne plus parler que de musique. A ce moment-là, les planètes se sont alignées….RTL2 m’a fait une proposition pour la matinale, ce que je ne pouvais pas faire mais j’ai accepté d’essayer d’animer le 16/19. J’y suis allé avec la trouille car, quand tu descends d’une radio à douze points pour aller sur une à quatre, si tu te plantes, tu n’es pas bon…Mais il se trouve que ça a bien marché !
Aujourd’hui, entre « Stop ou encore », « Bonus Track », « Le Grand Studio » sur RTL, et RTL2, j’ai, en France, je crois, la gamme la plus large de musique. Il n’y a pas un seul mec qui fasse ce que je fais ! Je passe de Voulzy à Dépêche Mode, en passant par Badi ou les Stones…J’ai une gamme de produits dont je peux parler qui est inédite en France, et tout le monde trouve ça normal, ce qui est cool ! J’ai été interviewé récemment pour parler de Zaz sur « 50 minutes inside », le lendemain je suis passé au JT de France 2 pour parler de Dylan,…Je suis un médecin généraliste de la musique, vraiment : je ne suis pas hyper bon partout mais, là où je ne suis pas bon, je sais qui appeler. Je connais à peu près, en général et, surtout, je sais qui sont les spécialistes. Du coup, c’est une place de ouf, que je n’avais jamais eue avant, que j’ai maintenant depuis quatre à cinq ans. Je suis centré exactement où j’avais envie d’être.
Pendant longtemps, j’étais un peu malheureux, à la télé de ne pas être qui je voulais être mais j’y suis allé quand même, pour l’égo et l’argent. Je me suis rendu compte, à partir du moment où j’ai arrêté de passer à la télé, pour ne parler plus que de musique, que c’est alors que j’ai été le plus connu ! Donc, là, je suis dans une situation qui ne durera pas – parce que rien ne dure – mais qui est hyper rigolote…Je ne sais pas quand ça va s’arrêter…Mais il y aura un moment où ma radio va trop changer et où je ne vais pas me reconnaitre, ou un moment où je ne serai plus à la mode et où ma radio ne va pas me reconnaitre, ou un moment où je serai vraiment un animateur du passé, ce qui est normal. A ce moment-là, je crois que j’irai écrire des livres. En tout cas, comme le dit un de mes meilleures potes, Bruno Guillon, « si tu prenais l’homme le plus heureux sur terre à un instant t et que tu lui dis que c’est lui l’homme le plus heureux, le mec ne s’en rend pas compte » donc peut-être que je suis, en ce moment, l’homme le plus heureux sur terre et que je ne m’en rends pas compte…En tout cas, je suis assez au fait du fait que ce que je fais en ce moment est vraiment cool. C’est aussi pour cela que je travaille autant ! Je veux bien que ça s’arrête parce que c’est normal que ça s’arrête mais je ne veux pas que ça s’arrête parce que j’ai déconné, parce que j’ai été paresseux ou parce que j’ai été con. Je ne veux pas que ça s’arrête à cause de moi !
Merci, Eric, pour toutes vos réponses !