Marion Cador évoque sa pièce de théâtre, actuellement à l'affiche !
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Bonjour Marion,
Quelle joie d’effectuer cette interview avec vous !
Vous êtes actuellement sur scène, au théâtre La Boussole, dans la pièce « Les Demoiselles ». A titre personnel, on imagine sans doute le plaisir et la joie que cela doit être pour vous ?
Oui, c’est un grand plaisir parce que, déjà, c’est six shows semaine, avec le lundi off. Ce qui est très plaisant, c’est que l’on est cinq nanas, avec Stan Cramer, le pianiste, on s’entend vraiment hyper bien, c’est un plaisir de se retrouver tous les jours pour se préparer, jouer ensemble et, ensuite, de temps en temps, on va boire un coup après. Vraiment, c’est une aventure, en plus d’être artistique, qui est très humaine et ça fait du bien.
Avec vos mots, comment présenter ce spectacle ?
Ca raconte l’histoire de cinq jeunes femmes, qui se retrouvent à travailler en tant que réceptionnistes téléphoniques d’un bureau de poste, rue Drouot, dans les années 50. Il y a un certain traintrain avec Nicole, celle qui dirige ces réceptionnistes. On va rencontrer Joe et Lili, qui sont là depuis pas mal de temps, on pense que Lili est celle qui a le plus de background dans cette équipe. Il va y avoir Claudine, la femme du patron, ancienne réceptionniste, qui soupçonne son mari de la tromper avec les autres réceptionnistes. Il y a donc quand même un poids dans ce bureau de poste, face auquel Nicole va devoir faire face. Quelqu’un vient d’être viré donc il y a une stagiaire qui arrive, Catherine, mon personnage, qui débarque, de sa Normandie, en étant toute contente, heureuse de pouvoir faire carrière à Paris et d’avoir un travail. A l’époque, ce n’était pas gagné, pour une femme d’avoir un travail... Catherine, qui est assez carriériste, est contente de pouvoir être indépendante, elle est prête à tout pour réussir, pour y arriver et elle va se rendre compte que ça ne va pas être aussi simple que cela. Parce qu’être une femme à l’époque, c’est bien sympa, on a de belles coiffures, de belles robes, de beaux jupons mais il faut quand même avoir du caractère pour survivre dans ce milieu-là.
Je pense que, au-delà de parler des années 50, ce qui est bien dans cette pièce, c’est que justement on est dans une période passée, qui est actée pour tout le monde comme étant un moment où être une femme faisait grandir dans un monde très misogyne. Donc les gens ne font pas tout de suite le parallèle avec aujourd’hui mais il y a des choses que l’on peut trouver encore, qui sont assez similaires, au niveau de la condition, du travail. On essaie de faire passer ce message-là mais d’une façon très douce, très subtile, en monde « il n’y a aucun jugement » parce que l’on a quand même fait du progrès, beaucoup de pas ont été réalisés depuis les années 50. Mais ce n’est pas encore totalement corrigé, oui, à l’époque c’était dur d’être une femme mais, encore aujourd’hui, on se retrouve dans des situations un peu injustes et misogynes, surtout dans le travail. Il est bon de savoir que ça existe encore de nos jours, c’est un peu le message de cette pièce qu’a voulu faire passer l’autrice, Hélène Buannic…
C’est aussi, on l’a compris, un spectacle musical…
Dans la comédie musicale, j’aime bien décliner les sous-catégories. Ici, c’est du théâtre musical, c’est une pièce musicale, avec une base de théâtre où il y a de petits interludes musicaux. J’aime bien cette définition de la comédie musicale, qui n’est pas de moi mais que je ressors à chaque fois : « quand l’émotion est trop forte pour juste la dire, on la chante et quand elle est encore plus forte, on la danse ». Je trouve cela très poétique. Du coup, c’est ce qui se passe dans cette pièce-là, on a toute notre moment un peu très expressif où on va se mettre à chanter une composition originale. Mais ce qui est le plus important, c’est le jeu, c’est l’interprétation. Ce n’est pas juste du chant, on n’est pas là pour un concert, on est là avant tout pour interpréter et jouer les moments musicaux, comme le souhaite notre metteur en scène Julien Husser. Notons que la musique est signée Grégory Garell et les paroles Louise Salle.
Quels sont les principaux retours que vous pouvez avoir du public ?
En étant dedans, il est sûr que l’on a perdu un peu d’objectivité par rapport à la pièce. On espère et on souhaite qu’elle plaise au plus grand nombre de personnes. On est très contentes et agréablement surprises des retours que l’on a quand on sort du théâtre. Il y a des gens qui nous attendent pour nous féliciter, ils ressortent très contents de la pièce, le message passe très bien. La petite subtilité de la fin plait énormémentJ. On voit même des femmes pleurer….Mais je ne vous en dis pas plus. En tout cas, ça fait vraiment chaud au cœur, je suis encore surprise de ces réactions, je me dis « oh là là, on arrive à faire ressentir cela aux gens, c’est fort ». C’est là que je remercie la vie de m’avoir offert ce cadeau.
Les commentaires sur internet sont aussi très bons, on nous dit passer par toutes les émotions, les gens rient beaucoup au début puis il y a un moment où ça bascule un peu dans le drame, embarquant aussi le public.
Au moment de vous approprier ce personnage, vous étiez-vous plongée dans le contexte historique de l’époque pour bien en percevoir les enjeux ?
Oui, bien sûr ! Ça fait quand même quelques années que je m’intéresse à la condition de la femme et que je la défends. Surtout l’équité et l’égalité entre les hommes et les femmes. Donc, oui, je me suis penchée dessus, pour comprendre si les femmes, en général, étaient ok avec ces conditions-là, si c’était vraiment dans les habitudes et les mœurs. Je me suis rendue compte que non, on se taisait parce qu’il fallait se taire. Mais il y avait quand même des combats qui commençaient à se mener. Par exemple, les femmes tatouées étaient rejetées et mal vues. Aujourd’hui, ça devient vraiment quelque chose de banal…Le droit de vote est arrivé pas longtemps avant et, encore, sous certaines conditions.
On a toutes les cinq regardé des documentaires pour savoir comment travaillaient les réceptionnistes, pour ne pas faire des gestes inappropriés. On est beaucoup avec des dossiers dans le spectacle, c’est quelque chose que l’on a ramené dans la pièce car, à l’époque, les femmes devaient surtout répondre au téléphone et n’avaient pas forcément beaucoup le droit d’écrire.
Catherine a un peu une « singularité », elle est homosexuelle, elle le cache, elle se dit qu’en arrivant à Paris, elle ne peut pas en parler, qu’elle aura une vie différente, en épousant un homme et en ramenant elle-même l’argent à la maison. Ce qui en fera la fierté de la famille. C’est son but, de se cacher elle-même, de débarquer avec une toute autre identité, c’est un nouveau départ pour elle. Au final, elle se rend compte que le naturel revient au galop, elle rencontre une lesbienne dans son centre rue Drouot, ça la perturbe un peu de voir qu’il peut y avoir des femmes qui défendent cela et qui sont quand même assez courageuses pour le revendiquer. Donc elle se laisse prendre au jeu et, finalement, elle va totalement se libérer de cela. C’est quelque chose que l’on retrouve encore aujourd’hui d’ailleurs.
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La pièce est à l’affiche jusqu’au 11 septembre. Sans doute aimeriez-vous voir l’aventure se prolonger ?
Exactement ! On espère aller vraiment loin avec cette pièce. Là, il est encore trop tôt pour annoncer d’éventuelles prolongations ou un éventuel déménagement. Mais on en a très envie !
En complément, quels sont vos autres projets artistiques du moment ?
Je suis en création d’un trio vocal, « Les jingle ladies », avec deux amies, Marianne Millet et Nina Brégeau. On essaie de ramener un petit peu de modernité, on se concentre sur les musiques de télé, notamment les génériques à partir des années 80, avec « Une nounou d’enfer », « Pokémon », « Friends »,…et on les décline en country, en jazz, en rock, … pour que les gens reconnaissent les musiques sans les reconnaitre. Il y aura un côté un peu interactif avec le public, on travaille avec un compositeur qui nous réarrange les musiques justement et, sans trop en divulguer, ce sera le public qui choisira la musique et le style. Du coup, on va faire un petit melting pot avec tout cela.
Merci, Marion, pour toutes vos réponses !