Ingrid Graziani nous présente son seul en scène Du ring à la scène !

Bonjour Ingrid,
Merci de nous accorder un peu de votre temps pour répondre à nos questions.
1/ Vous êtes actuellement à l'affiche, chaque lundi soir, au Montmartre Galabru avec le spectacle « Du ring à la scène ». Pour commencer, comment présenter ce seul en scène ? Quel en est le contenu ?
C'est tout à fait l'histoire drôle de ma vie. J'y raconte en premier lieu à quel point c'est galère, pour une fille, d'avoir un passé avec la boxe. J'aborde la féminité, quand j'étais petite j'étais très garçon manqué et j'ai toujours été attirée par les jeux connotés garçons. C'est vrai que, du coup, j'ai plongé à l’adolescence dans un sport connoté masculin. En tant que fille, je me suis posée pas mal de questions sur ce qu'est être une fille. Peut-on être une fille et aimer jouer à la bagarre ? Aussi les cheveux longs qui sont gênants, les robes qui ne sont pas pratiques pour courir, les couleurs comme le rose qui sont salissantes.
Je m'interroge également sur le regard qu'ont les gens sur une championne du monde de boxe. D'autant que, quand on me voit, ça paraît assez étrange que j'ai ce titre. Je valide ce regard qu'on les gens sur moi, je peux le comprendre. C'est tout un parcours que j'ai eu et dans lequel je me pose beaucoup de questions sur la féminité.
J'aborde aussi ma reconversion en tant que comédienne. Passer de l'univers de la boxe à celui artistique est un virage à 180 degrés. Je prends du recul sur ma vie et je me dis qu'elle est un peu rigolote, je suis passée de la salle de sport où ça sent les chaussettes sales au milieu artistique où les gens ont beaucoup à faire au regard des autres. Je raconte aussi l’image de boxeuse qui me colle à la peau dans ma vie d'artiste. On me propose souvent des rôles liés à la violence, rarement des choses glamours. Je mets donc en avant les clichés que l'on peut avoir sur les gens par rapport à leur parcours.
Je prends beaucoup de recul aussi par rapport à moi-même, je ris beaucoup de moi dans ce spectacle. Je parle aussi un peu de l'élection de Miss France à laquelle j'avais participé. Je l'avais fait pour reconnecter avec ma féminité. A la base, ce n'était pas forcément fait pour moi.
J'ai commencé le théâtre il y a dix ans, après la boxe. Très vite, j'ai voulu en faire pour divertir. Mais mon passé sur les rings m'a rattrapé, on m'a de suite proposé des rôles assez physiques. Je m'éloignais donc rapidement de la comédie. Mais je continuais à écrire des sketchs car j'aime cela. Seulement maintenant je réussis à prendre du recul et à écrire des choses drôles en lien avec la boxe. C'est un peu thérapeutique pour moi. La fin du spectacle ouvre sur quelque chose d'assez poignant.
2/ Comment s'est fait le choix des thèmes et la sélection des sujets ?

Cela n'a pas été simple, il a fallu que je prenne du recul sur ma propre vie. Il a fallu en tous les cas structurer mon propos et, à l'intérieur de tout cela, je ne vous cache pas, en plus de toute les vérités, que certaines choses sont un peu fictionnées. Ce spectacle est une vraie histoire et non pas un enchaînement de sketchs.
Je raconte même le doute que j'ai eu quand j'ai pris ce virage à 180 degrés après ma carrière de boxeuse. Je n'avais alors presque plus d'identité. A présent, je suis en paix avec moi, je me sens bien dans ma peau. Pour raconter cette période difficile, j'invite les gens sur Air Dépression, ce qui est assez drôle.
Tout au long du spectacle, je ramène tout à la boxe. Même dans les expressions de mes nouveaux collègues. Je fais de nombreux parallèles. Je confonds le ring et la scène, les loges et le vestiaire, les tenues de combat et les costumes.
Ces dix années d'attente pour l'écriture ont été nécessaires en tout cas.
3/ Selon vous, quelles sont les clés du succès de ce spectacle ?
C'est, je pense, mon parcours atypique qui attise la curiosité. Je le vois même en dehors du spectacle au travers de mes rencontres. Rapidement un intérêt apparaît, même si j'ai toujours du mal à parler de moi. Ce parcours est une petite note un peu originale par rapport à d'autres seuls en scène.
4/ Après quelques représentations seulement, vous permettez-vous encore quelques petites adaptations du contenu ?
Des changements ont déjà été faits dans les premières dates. Notamment sur la fin du spectacle, que nous avons élargi. Le but n'étant pas, pour autant, que ça bouge tout le temps car ce n'est pas du stand-up avec une blague toutes les trois phrases.
Même si je pense que certains passages peuvent encore être approfondis et davantage exploités.

5/ Au-delà des dix premières dates au Montmartre Galabru, quelle suite aimeriez-vous donner à ce spectacle ?
Ces dix premières dates permettent de muscler le spectacle et d'avoir un seul en scène costaud et solide. J'aimerais ensuite pouvoir le jouer en dehors de Paris. Au travers de mon parcours en boxe, je connais des personnes un peu partout.
Souvent des artistes rodent leur spectacle en province avant de monter ensuite sur Paris. J'ai fait le choix du contraire.
Je cherche aussi une production pour me concentrer davantage encore sur l'artistique.
Ce fut un plaisir, Ingrid, de nous entretenir avec vous !