Emilie Crubezy évoque la nouvelle pièce de théâtre de sa compagnie !

Publié le par Julian STOCKY

 

Bonjour Émilie,
 
C'est un plaisir d'effectuer cette nouvelle interview avec vous.
 
1/ Vous serez à l'affiche, mardi 12 et mercredi 13 décembre, à Gare au Théâtre, de la pièce « Le renard envieux qui me ronge le ventre ». Quelle histoire y est racontée ? Quelles thématiques y sont abordées ?
 
C'est une pièce à cinq personnages, dans laquelle on suit leurs histoires respectives, sur cinq tableaux. Les thématiques principales sont le conditionnement relatif au genre et les comportements de discrimination intériorisée qui en découlent. C'est-à-dire comment les discriminés deviennent discriminants, comment victime, on devient soi-même ensuite bourreau. 
 
2/ Comment présenter votre personnage? Quelles sont ses principales caractéristiques ?
 
J’interprète Jeanne, une jeune fille que l'on suit dans son passage de l'enfance à l'âge adulte, qui a envie d'assumer sa féminité pour se libérer en tant que femme, notamment sexuellement. Elle fonctionne en duo avec un autre personnage, Sam, qui elle suit le même parcours mais se définit beaucoup plus en rejet de sa féminité et base son idée du pouvoir sur des qualificatifs masculins. 
 
Les deux sont indissociables, nous incarnons ainsi, avec ma partenaire Loris Reynaert, deux couleurs très précises et très opposées, deux faces qui constituent cette attitude schizophrénique qui peut découler d'un conditionnement relatif aux rôles de genre féminin. 
 
3/ Quelles ont été les principales sources d'inspiration pour le développement de cette pièce ?
 
Elles ont été très nombreuses, puisque nous avons travaillé pendant deux ans à partir d'une écriture plateau. Me concernant, j'ai été marquée par le Cafézoïde « Le paradis pour les enfants », qui nous avait permis, pendant tout un après-midi, d'interroger des enfants. De manière ludique pour ne pas qu'ils se sentent jugés. 
 
Nous leur avions demandé par exemple pourquoi ils étaient contents d'être un garçon (ou une fille). Ou encore, s'ils estimaient que certaines choses n'étaient pas réalisables chez un sexe ou un autre. Les réponses étaient très intéressantes et nous avons pu voir à quel point les enfants pouvaient déjà être dans certains schémas éducatifs ou culturels, sans même s'en rendre compte. C'était génial.
 
Nous avons aussi lu énormément de bouquins. J'ai dévoré le livre d'une prostituée, une femme assez extraordinaire. Cela m'a beaucoup marqué. C'est l'occasion de mieux comprendre pourquoi des gens extrêmement intelligents peuvent faire des choix pour se libérer et, en même temps, en se libérant, comment ils se détruisent eux-mêmes sans le capter. C'était très beau.
 
Ce sont aussi beaucoup de situations vues dans la vie ou que, nous-mêmes, avons pu vivre. 
 
Le contenu a énormément changé depuis le début. La metteuse en scène, qui est aussi l'autrice, a écrit quatre versions de la pièce. Cette dernière a vraiment évolué dans le temps. S'agissant d'une écriture plateau, qui vient donc de nous, de nos improvisations, ce spectacle nous appartient énormément. J'ai l'impression que c'est une partie de moi. 
 
Il y a beaucoup de choses dont nous avons parlées qui ont ensuite été retranscrites. En tant que comédienne, c'est vraiment génial de voir que l’œuvre passe à travers soi.
 
4/ Selon vous, quelles sont les clés de réussite de cette pièce ? Pourquoi plaira-t-elle aux nombreux spectateurs qui viendront vous voir sur scène ?
 
Les premiers retours obtenus après les filages devant la compagnie montrent que, même si c'est un thème qui n'est pas facile à aborder, nous le traitons avec pas mal d'humour. Cela fait plaisir aux gens d'arriver, face à des thèmes compliqués, à être suffisamment détachés pour pouvoir en rire. De façon générale, le débat est d'autant plus riche, la réflexion du public beaucoup plus profonde, justement parce que nous abordons ces thèmes avec de la distanciation.
 
Je pense que l'on se reconnaît dans le spectacle. Pas forcément sur le conditionnement relatif au genre mais dans des choses que l'on a tous vécues et qui, sur scène, sont évidentes. C'est aussi assez touchant de voir tous ces êtres humains qui essaient de s'en sortir, qui trébuchent mais qui réessaient. 
 
5/ Au-delà de ces deux dates, quelle suite aimeriez-vous pouvoir donner à ce spectacle ?
 
Nous allons jouer deux autres dates au théâtre des Halles, les 8 et 9 février. Après, nous espérons une diffusion francilienne sur un plus long terme et surtout une diffusion dans notre Région, la Région Centre-Val-de-Loire où est ancrée la compagnie.
 
Nous souhaiterions aussi le présenter à des scolaires, plus particulièrement à des lycéens car ces thèmes ne sont pas souvent abordés auprès des jeunes, alors qu'ils leurs sont très familiers. Ce serait aussi l'occasion de jouer devant des jeunes pour, ensuite, pouvoir en parler avec eux et connaître leur vision. Et bien sûr, il nous paraît très important d'ouvrir l'esprit des adultes de demain sur des questions d'inégalités sociales dues au genre.
 
6/ Pour terminer, que dire pour inciter, si ce n'est pas déjà fait, les lecteurs à venir voir la pièce ?
 
C'est terriblement actuel. En même temps, on aborde des sujets comme la condition de la femme au travail. On pourrait croire que c'est un thème sur lequel la société ne fait que radoter. Mais c'est sans doute le signe que rien n'avance. Donc il faut absolument continuer à en parler pour éclairer les esprits. Tout cela est fait avec humour et légèreté. 
 
L'équipe a envie de partager ce spectacle avec vous. C'est la première fois que je suis aussi fière, en tant que comédienne, de défendre un spectacle. Je travaille dessus depuis deux ans, j'ai hâte que vous découvriez le résultat. 
 
Ce n'est que le début d'une longue aventure je l'espère. 
 
Merci Émilie de nous avoir accordé un peu de votre temps !
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Publié dans Théâtre

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