Jean Seleskovitch revient sur son parcours et nous explique ses projets !
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Bonjour Jean,
Merci d’avoir accepté de répondre à quelques questions pour notre blog.
1/ Vous êtes, de part votre formation, musicien professionnel. Avant de vous orienter ensuite vers le métier de comédien. Quelle est l’origine de cette nouvelle orientation ?
Depuis tout petit, j’ai le plaisir de dire des textes et de chanter. En classe de 6è, « Barbara » de Prévert a été la première fois où j’ai senti que je pouvais peut-être être un petit peu intéressant. Quand j’ai entendu le silence se faire pendant que je lisais.
J’avais sans doute déjà beaucoup d’orgueil et d’amour propre à l’époque. Je me suis, ce jour-là, senti écouté et c’était très agréable. Chez moi, à la maison, je faisais des imitations, notamment celle de Jacques Dutronc chantant le générique d' "Arsène Lupin", une série culte de l'époque, ce qui plaisait beaucoup à mes parents.
En parallèle, dès l’âge de quatre ans, j’ai commencé à apprendre le piano et cela se passait plutôt bien. Ce qui m’a permis d’approfondir ce domaine et de suivre un parcours classique. En faisant du cor à partir de 12 ans, avant d’intégrer le conservatoire national supérieur de musique de Lyon. Le théâtre est alors resté lettre morte, un domaine inexploré que j’ai mis de côté, ne pouvant m’adonner aux deux choses à la fois.
J’ai donc ainsi mené ma vie de musicien, avant, à 35 ans, de prendre des cours de théâtre. Par, au départ, volonté de me donner confiance sur scène pour y être plus à l’aise. Ce fut alors à la fois le coup de foudre, et comme si j’avais aimé avant cet art sans en avoir totalement conscience. J’ai alors eu la volonté de m’orienter plus concrètement dans cette voie. Mais il s’est passé beaucoup de temps avant que je ne décide, il y a un an et demi, de me donner les moyens de tenter d'y parvenir. En mettant entre parenthèse ma carrière musicale.
2/ En quoi votre première expérience professionnelle vous aide-t-elle dans ce nouveau domaine ?
Cela m’aide sur tous les plans. Notamment pour la préparation, parce que les musiciens sont très exigeants. A l’image des danseurs, ils ont une grande discipline quotidienne de travail, d’astreinte, de technique.
Mon expérience de soliste d'orchestre m'a bien aidé, notamment sur le plan de la concentration et de la gestion du stress.
Tout ceci m’a beaucoup aidé à avancer dans ma nouvelle carrière. Mais cette première casquette m’a aussi ponctuellement desservie, car je me suis aperçu que la façon de travailler des comédiens peut différer selon les écoles. J’ai donc dû m’adapter aux façons de faire des réalisateurs, des metteurs en scènes mais aussi des formateurs.
3/ Quelles complémentarités retrouvez-vous entre les différents exercices artistiques pratiqués, que ce soit la scène, au travers du théâtre ou bien les plateaux de tournage ? Vous préparez-vous de la même façon dans les deux cas ?
Je me prépare toujours de la même façon, mais selon le domaine abordé. Pour un casting, j’apprends le texte le plus possible au rasoir, vraiment avec les virgules, les points et les mots qui sont écrits. Pour ensuite pouvoir m’en défaire. Le temps est imparti, il n’est pas possible d’approfondir les caractéristiques du personnage car c’est comme pour un slalom en ski, seulement quelques secondes sont données pour convaincre. J’axe donc mon travail sur la mémorisation.
Ce qui n’est pas possible au théâtre. On ne peut pas, au départ, se contenter d’apprendre le texte. Il y a en effet tout un parcours du personnage au sein d’une œuvre. Une recherche artistique est donc à faire sur son corps et son vécu. Mais aussi sur ce qui va lui arriver, sur les autres personnages, sur l’histoire et sur la situation.
4/ Vous avez récemment tourné dans le court-métrage « Les petits pains », pour La Fémis. Pourriez-vous nous en dire davantage sur ce beau projet ? Quel est en le contenu ?
C’est une histoire très drôle écrite et réalisée par Luce Jalbert, d’une famille excessivement conservatrice. Les parents sont aisés et carrés, peut-être même un peu trop.
Ils achètent à leurs enfants des lapins, qui se reproduisent à une vitesse exponentielle. S’en suit ainsi tout un parcours humoristique et provocateur sur le fait que la nature fasse irruption dans ce foyer. Où les deux enfants découvrent brutalement que la sexualité existe, comme les enfants de paysans l'apprennent, sauf que c'est ici dans un bel appartement parisien! Et sur la réaction des parents, avec une finalité très dôle et en même temps dramatique. Ces derniers vont tout faire pour expliquer à leurs progénitures que la sexualité est quelque chose qu’ils auront bien le temps d’explorer... plus tard!!
J’y interprète donc le père de famille, qui est très colérique et soupe au lait. On comprend qu’il ne se passe plus grand chose avec sa femme. On ne sait d’ailleurs pas s’il s’est passé grand chose précédemment. Il est très sur la défensive. J’ai décidé de le jouer le plus humoristiquement possible. Il se bat contre des moulins à vent et se débat dans ses contradictions.
Il s’agissait de mon premier tournage avec La Fémis et ce fut pour moi un vrai privilège. Cette école a le mérite, à chaque fois, de proposer un vrai travail de qualité. L’ambiance y est à la fois studieuse et détendue. La rigueur est présente à chaque moment.
5/ De façon plus générale, quelles sont vos autres envies et projets artistiques actuels ?
Après avoir tourné pour TMC dans « Les Mystères de l’Amour », vous pourrez prochainement me retrouver encore en télévision dans d’autres programmes.
Chantant depuis un certain temps, j’aimerais aussi faire de la comédie musicale. C’est une envie, un projet et à la fois un rêve. Il faudra tout d’abord que j’apprenne à danser un peu mieux! Disons que, selon moi, le chant et la comédie se recoupent. J’ai donc décidé d’écrire un spectacle. C’est tout récent, ce n’est pas encore une actualité mais j’espère que cela va le devenir. Il s’appellerait peut-être "Jean qui rit et Jean qui pleure"...
Des chansons dans un registre musical mélancolique, au piano. Des sketchs qui mettraient en avant le côté léger et parfois absurde de la vie. Ce pour l'instant qu'une ébauche. J’ai, par le passé, déjà interprété de petites pastilles humoristiques dans un cabaret parisien.
J’ai également suivi une formation théâtrale à Vitry-sur-Seine, dans une école formidable que je recommande à tout le monde, dirigée Par M. Florian Sitbon: le Studio de Formation Théâtrale. Ce fut une expérience passionnante, même si je n’ai pu y rester qu’une seule année en raison de la nécessité de devoir gagner et de rester intermittent. J’aimerais, à ce titre, beaucoup et plus régulièrement jouer au théâtre. C’est, je pense, l’aboutissement pour tout comédien. Il s’agit de la pierre de touche.
6/ Pour finir, si ce n’est pas déjà fait, que dire aux lecteurs pour les inciter à s’investir dans l’art ?
Même si je ne suis plus tout jeune, je découvre combien ce métier est difficile et combien il faut avoir une lucidité permanente. C’est aussi un combat. Il faut poursuivre son rêve, mais il est nécessaire de faire attention à ne pas confondre risque et danger. L’art est traitre, car, lorsque l’on voit un grand comédien, cela parait tellement facile. Toutefois, il faut savoir que c’est un travail titanesque qui engage tout l’être.
Puis, une fois que vous y êtes, foncez et investissez vous complètement. L’abnégation est primordiale. Vous êtes seul face à vous-même, mais vous ne ferez rien sans les autres. Je suis partisan du lâcher prise, plutôt que d’une prise de pouvoir de l’individuel. N’hésitez donc pas à rejoindre une troupe.
Il faut bien se connaitre et savoir ce qu’on aime. C’est un art où l’on n’est jamais aussi convaincant que lorsque l’on est proche de soi, pour pouvoir interpréter un autre. C’est passionnant et dangereux. Il faut réussir à n’être ni complètement étanche ni poreux avec sa vie privée. Ce qui est un travail de chaque instant.
Et qu'ils se méfient de certaines écoles, dont je tairai le nom, qui font faire aux jeunes élèves comédiens des exercices de "gainage" musculaire en leur demandant de proférer à haute voix: "je serai comédien! je serai comédien! Si vous êtes en présence de cela, déguerpissez le plus vite possible! Ou faites du sport à la place...
Ce fut un plaisir, Jean, d’échanger avec vous !