VRAIe ! : Prisca Demarez évoque son spectacle actuellement à l'affiche !

Publié le par Julian STOCKY

 

Bonjour Prisca,

Quel plaisir de vous retrouver pour ce nouvel entretien !

Vous êtes actuellement à l’affiche, au théâtre de l’Archipel, avec votre spectacle « VRAIe ! ». On imagine le plaisir et la joie que ce doit être de retrouver, chaque jeudi et chaque vendredi, le public ?

C’est un kiff de chaque instant, je savoure chaque seconde parce que l’on ne sait pas où l’on va. Je savoure chaque seconde encore plus qu’avant parce que ça m’a manqué, parce que j’ai retravaillé et parce que je ne sais pas trop combien de temps ça va durer, avec le contexte sanitaire actuel. Je ne suis pas trop rassurée pour les théâtres, du coup, oui, je profite de chaque instant en me disant que j’ai la chance d’être en scène. Pourvu que ça dure… il est urgent de donner, c’est ça.

Beaucoup de gens indiquent, sur Facebook, que c’était leur premier spectacle depuis la reprise, il y a un peu ce côté « à nouveau je respire, à nouveau je sors, je t’ai choisie ». Ce n’est pas rien, c’est très agréable, il y a un bonheur pour nous d’être sur scène et une prise de conscience de ce précieux temps, encore plus. Et un bonheur des gens de retourner dans les salles, d’aller à nouveau rire, d’aller à nouveau se laisser emmener dans des histoires, se laisser embarquer dans un manège, dans ce grand huit.

 

@ Jeanne Degois

 

La coupure avec le confinement vous a sans doute, malgré tout, permis  de prendre du recul sur le spectacle, de l’appréhender différemment et d’y apporter des retouches ?

Je suis une grosse bosseuse, du coup j’ai pris le manège, j’ai démonté tous les boulons, j’ai tout ré-analysé, regardé ce qui fonctionnait, ce qui ne fonctionnait pas, les endroits où c’était un peu bancal. En fait, j’ai remodelé tout cela, on a retravaillé, réécrit beaucoup de choses aussi, très concrètement. J’ai retravaillé ma voix également, pour être plus à l’aise, je me suis plus entrainée, je me suis plus préparée parce que c’est un vrai marathon. Pas tant au niveau chant que la globalité. Les chansons ne sont que des monstres à sortir et, entre chacune, il y a aussi plein de personnages durs à tenir. Tout cela a été donc retravaillé pour pouvoir aller vers un spectacle qui correspond de plus en plus à ce que j’avais envie de donner. On n’y est pas encore à 100% pour moi mais on s’en approche. Comme il va y avoir un mois et demi d’arrêt, je vais pouvoir m’y remettre et je pense que, à la rentrée, on aura un petit bijou.

Chaque nouvelle représentation, il y en a déjà eues 18 au total, est donc un bonheur supplémentaire et un pas supplémentaire pour vous ?

C’est un peu comme cela que je vois la vie en général. Souvent, on me dit « oh là là, le quotidien tue la vie ». Moi, je n’arrive pas à faire le tour de moi-même donc je ne vois pas comment j’arriverais à faire le tour de quelqu’un d’autre. Je trouve la vie passionnante, on ne peut pas en faire le tour. J’adore les spectacles, une représentation c’est « remettre au présent », on n’y pense pas à cela. Du coup, à chaque fois, c’est quelque chose qui n’existe pas. Chaque public est différent, chaque public apporte une énergie et un spectacle différents, c’est ce qui m’émerveille dans le spectacle vivant. D’une représentation à une autre, les gens n’ont pas vu la même chose.

 

@ Jeanne Degois

 

En plus, de séance en séance, je travaille, je réfléchis, par exemple une chanson de Piaf a été remplacée par une autre de Dalida, pour de vraies raisons. Je travaille aussi sur la justesse du ton, sur les phrases, les tournures, j’enlève certaines choses qui ne marchent pas et j’en remets d’autres. Je suis tout le temps en train de retravailler donc, oui, c’est chaque fois meilleur, c’est comme un bon ragout.

Ma vision s’affine. Il y a quelques jours, une dame m’est tombée dans les bras en me disant « je crois que vous êtes en train de me sauver la vie ». Je le dis au début du spectacle, « ce n’est pas pour faire joli ce que l’on vient de faire, il y a un message dedans ». Ce spectacle n’est pas pour faire joli, c’est aussi une invitation à faire un point sur soi-même. Qui qu’on soit, artiste ou pas. Pour se demander où l’on en est de sa vie, de ses rêves, de son présent. Plusieurs personnes m’ont dit que ça les a remises en marche, que ça leur a donné l’envie de se relever, d’arrêter de s’asseoir au pied du mur, l’envie de se redresser pour l’escalader. J’écoute chaque retour, même les plus violents. Pour retravailler et défendre ce message que je voulais apporter. On passe du rire aux larmes souvent en deux secondes dans le spectacle, c’est cela aussi qui fait le grand huit, mais la vie c’est également ça.

Du coup, aujourd’hui, présenteriez-vous votre spectacle différemment à présent ?

J’ai refait ma note d’intention du spectacle. Je voulais repréciser pourquoi j’avais écrit ce spectacle. A la base, je voulais faire un tour de chants, après deux ans de théâtre pur. En le préparant, je m’étais dit que j’allais raconter des conneries vraies, pour passer d’une chanson à une autre. J’ai testé cela en vacances, avec des amis. Avec les retours qu’ils m’avaient faits, je m’étais demandé s’il n’y avait pas possibilité d’en profiter pour faire passer des messages. C’est là qu’a commencé l’histoire de ce spectacle, qui s’est construit petit à petit.

En réétudiant pourquoi j’avais voulu faire ce spectacle, je me suis dit qu’il y avait plein d’histoires qui sont costauds à vivre, qui sont un peu violentes mais que l’on a deux façons de voir les choses. Soit on les voit comme violentes, on se prend le mur, on s’assoit et on pleure, soit on fait de chaque mur un tremplin. En reprenant l’histoire, j’ai compris que j’avais réussi à transformer chaque difficulté en force. Finalement, ma plus grande force avait été d’être fragile, peut-être que c’était de ne pas m’être travestie dans ma fragilité, de l’avoir accueillie. En fait, je pense que venir vraie peut apporter quelque chose de très fort. Ma quête est justement d’aller de plus en plus vers le vrai, de ne pas se cacher, de ne pas aller vers la facilité.

 

@ Jeanne Degois

 

Vous avez commencé à l’évoquer, quels sont les principaux retours que vous fait le public ?

Ce qui revient le plus souvent, c’est le grand huit d’émotions, c’est le manège, en passant du rire aux larmes. C’est mon grand kiff. Il y a beaucoup de gens qui sont très émus, ça me touche d’avoir réussi à les emmener dans cette émotion. Beaucoup de gens me disent que ça les bouleverse dans leur vie, que ça les remet en question, qu’ils se disent qu’il serait temps qu’ils se réveillent. Beaucoup de femmes…et c’est le « e » mis au rouge à lèvres dans le titre. Il est important car ce spectacle est aussi une parole de femme. Pour moi, c’est aussi un gros chemin, pour la première fois je monte sur scène en disant « je suis femme, je m’autorise femme ». Je suis d’ailleurs beaucoup plus femme sur scène, beaucoup plus coquine, beaucoup plus assumée, beaucoup plus féminine qu’à la première. Du coup, j’ai beaucoup de retours de femmes qui me disent avoir eu l’envie de s’autoriser à être femme, de prendre leur place de femme, dans ce monde d’hommes, en étant fières, quel que soit leur âge.

Plein de jeunes en écoles de comédie musicale se sont rendus compte également que ce métier n’était pas facile. Pour moi, c’est un cadeau de leur dire « eh, ne rêvez pas, ce ne sera pas simple mais, par contre, qu’est-ce que c’est beau ». Beaucoup de jeunes me disent « merci » parce qu’ils comprennent que, en s’accrochant, tout est possible. Ça leur a donné l’envie de s’investir plus dans le travail.

Ma maman est venue voir le spectacle et, en sortant, a dit « je me suis retrouvée dans sa chambre de petite fille ». Pour moi, c’est le plus beau compliment que l’on ait pu me faire. Ça m’a touchée qu’elle voit cela et non pas une performance. Je viens sur scène pour donner mon cœur et mes tripes.

Pour terminer, après une pause fin juillet, vous serez de retour à partir de mi-septembre…

Oui, en pleine forme et en pleines bêtisesJ. Je pense que le spectacle aura encore évolué, grandi, muri. J’ai hâte, déjà, de la reprise.

Merci, Prisca, pour toutes vos réponses !

Publié dans Théâtre

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