Coraly Zahonero évoque sa nouvelle pièce de théâtre !

Publié le par Julian STOCKY

©Stéphane Lavoué, collection Comédie-Française

 

Bonjour Coraly,

 

Merci de nous accorder un peu de votre temps.

 

Vous serez à l'affiche, à partir du 24 mai, jusqu'au 7 juillet, de la pièce Hors la loi, au Théâtre du Vieux Colombier. Très simplement, comment présenteriez-vous ce spectacle ?

 

C'est l'histoire de Marie-Claire, une jeune fille de 15 ans, qui est tombée enceinte suite à un viol, en 1971, et qui, aidée par sa mère, s’est faite avorter. À l'époque, cette pratique était interdite, elle a donc subi un avortement clandestin, qui l'a amenée à l'hôpital. L'histoire a fait que des gendarmes sont venus les arrêter, elle et sa mère, après une dénonciation. Elle a vécu un cauchemar. L’avocate Gisèle Halimi, s’est emparée de cette affaire. Elle en a fait un procès médiatique qui tombait à point parce que les groupements de femmes, le MLF, avaient créé un journal qui s’appelait « Choisir », destiné à lutter pour la légalisation de l’avortement.

 

On l’a appelé : le procès de Bobigny. En 1972 sont jugées Marie-Claire, Michèle, sa mère, l'avorteuse et la copine de la mère qui avait fait le lien entre les femmes. Ce procès a fait beaucoup de bruit à l'époque, il a été très important pour la cause féministe. Gisèle Halimi a mobilisé des personnalités, beaucoup de gens sont venus témoigner, comme Michel Rocard, Jacques Monod, Delphine Seyrig. Ce procès a permis à la presse de parler beaucoup du sujet, aux consciences de bouger et d'évoluer et à la loi légalisant l'avortement de passer en 1975, grâce à Simone Veil. Comme tout changement de société, c'est un chemin : d’abord changer les consciences, montrer la réalité de ce dont on parle.

 

Pauline Bureau, jeune metteure en scène et auteure, s'est emparée de ce fait divers marquant pour le retranscrire. C'est une fresque poétique, ce n'est pas uniquement un théâtre réaliste, il y a vraiment une transposition qui fait que cette histoire est aussi racontée avec une poésie qui font de toutes ces femmes des héroïnes.

 

Quelles sont les principales caractéristiques des différents personnages que vous interpréterez ?

 

Je joue deux personnages, ainsi qu’une apparition. On raconte une fresque et, du coup, chacun est amené à jouer plein de rôles, ce processus est très lié à la création de Pauline, dans laquelle nous nous sommes investis avec beaucoup de plaisir.

 

Je joue le rôle de Michèle Chevalier, la mère de Marie-Claire, qui s'est retrouvée sur le banc des accusés avec sa fille. J'interprète également Delphine Seyrig, qui vient donc témoigner au procès.

 

En termes d'appropriation de ces personnages, comment avez-vous fonctionné ? Vous êtes-vous replongée dans des documents de l’époque ?

 

J'ai lu beaucoup et visionné pas mal de documentations. Je considère le droit de disposer librement de son corps comme quelque chose d’absolument fondamental, les luttes des féministes de l’époque me touchent et nous leur devons beaucoup. Je leur suis reconnaissante.

 

Je me suis aussi renseignée sur la Delphine Seyrig militante, que j'ai découverte car je ne savais pas à quel point cette femme l'était. J'ai vu son film Sois belle et tais-toi, dans lequel elle interviewe des actrices et où elle démontre à quel point le patriarcat conditionne le regard que l'on porte sur les femmes. Delphine a eu cette pertinence de démonter cela en allant à la source, en faisant parler les femmes.

 

Ses interventions télévisées, que j’ai visionnées, m’ont fait prendre conscience de son courage. J'ai appris qu'elle avait été carrément blacklistée à l'époque pour ses prises de position féministes. Elle a été mise de côté par certains producteurs à cause de ses engagements. Tout cela m'a beaucoup nourrie. Delphine est tellement marquante que l'idée n'est pas de l'imiter mais de l'évoquer poétiquement. J'essaie de lui rendre hommage.

 

Quant à Michèle Chevalier, comme elle n'est pas connue, il n'y a pas le même rapport pour le spectateur, nous avons du coup une plus grande liberté.

 

©Brigitte Enguérand, collection Comédie-Française

 

Selon vous, qu'est-ce qui pourra justement plaire aux nombreux spectateurs qui viendront voir la pièce ?

 

Je crois qu'il est bon de rappeler les luttes de ces femmes, ce qu'il a fallu faire pour conquérir nos droits, comment c'était avant. Pour ne pas perdre de vue à quel point rien n'est jamais gagné pour toujours.

 

J'ai aussi un grand coup de foudre pour Pauline Bureau, pour son univers, pour son travail. Ses projets ont du sens, tout en étant des objets d'art, des objets poétiques. C'est fin et sensible.

 

Vous évoquiez le fait de jouer deux rôles dans ce spectacle. Avez-vous, à ce titre, des petites astuces personnelles pour passer rapidement d'un personnage à un autre ?

 

A la Comédie-Française, nous pratiquons l'alternance, c'est un de nos piliers, nous sommes donc habitués à passer d'un répertoire à un autre. C'est une gymnastique à laquelle nous sommes rodés.

 

Je crois aussi qu’à partir du moment où l'on met le costume, la bascule se fait.

 

©Brigitte Enguérand, collection Comédie-Française

 

A quelques jours du démarrage, dans quel état d'esprit êtes-vous ?

 

Du stress, de l'appréhension, du trac, bien sûr, comme avant chaque nouveau spectacle. Il y a également une impatience car l'enthousiasme est tel pour moi que je suis très curieuse de voir si ça va rencontrer le public. C'est très excitant.

 

Quelle que soit la réception, je cautionne ce projet, je l'aime, je le trouve cohérent, important.

 

Pour terminer, comment définitivement inciter les lecteurs à venir voir la pièce ?

 

Venez assister à une création contemporaine qui parle des femmes, de la vie des femmes, des luttes féministes pour conquérir des droits très importants.

 

Ce fut un plaisir, Coraly, d'échanger avec vous !

Publié dans Théâtre

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